De la glorification nationale à la lutte pour la liberté : les croisades baltiques au travers du temps

Louis Provost-Brien

Université de Sherbrooke

Résumé :

L’évangélisation de la Livonie médiévale fut le résultat d’un effort missionnaire, mais aussi de bains de sang causés par les croisades s’y déroulant. Alors que les évangélisateurs tentaient de convertir les païens par leur seule parole, des princes laïcs, principalement allemands, prirent les armes pour forcer la christianisation autour des années 1200. Ce phénomène, connu principalement sous le nom de croisades baltiques, fit couler beaucoup d’encre au cours de l’Histoire. Ce sont les perspectives de ces différents historiens d’horizons multiples, allant de la glorification nationale à la lutte pour l’indépendance, que nous nous proposons d’étudier dans ce texte.

Mots clés : Croisade, mission, Europe Baltique, Livonie, historiographie, teutonique.

 

Table des matières
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    Les missions et croisades baltiques au service de l’histoire

    La chrétienté médiévale a, tout au long de son histoire, cherché à étendre ses frontières. Pour ce faire, elle agit parfois par la force des armes, et d’autres fois, par l’assimilation des populations avoisinantes. Ce phénomène est particulièrement perceptible au moment des croisades, qui commencent en 1095 suite à l’appel du pape Urbain II [1]. Ces dernières devaient entraîner les chrétiens en une foule de lieux afin d’y livrer des combats au nom de la foi : la Terre sainte, l’Espagne ainsi que l’Europe baltique par exemple. L’évangélisation de ce dernier territoire, situé à la frontière nord-orientale de la chrétienté, à la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle, fut le théâtre d’un effort missionnaire, mais aussi, d’effusions de sang causées par les croisés. Alors que les évangélisateurs espéraient que la force de leur seule parole permettrait de convertir les païens au tournant des années 1200, des laïcs, principalement allemands, entrèrent au service de l’Église et prirent la croix et les armes afin de contraindre la christianisation de ce qui allait devenir la Lettonie, l’Estonie et la Lituanie actuelles. Cédant sous le poids des autorités religieuses, des croisés, des Porte-Glaive puis des chevaliers teutoniques, les païens allaient éventuellement se convertir après près de 200 ans de conflits [2].

    Cette longue entreprise militaire et religieuse fit couler beaucoup d’encre chez des historiens de divers horizons et d’époques multiples. Certains de ceux-ci en firent une fierté nationale, y voyant même la légende fondatrice de leur nation [3]. D’autres, par contre, y décelèrent plutôt une conquête sanglante, voir une atteinte à leur liberté, pour laquelle leur peuple entreprit une lutte à partir du Moyen Âge jusqu’à la fin du XXe siècle [4]. Bref, en fonction de leur origine ethnique, de leur perception et attachement au passé médiéval, les historiens traitèrent cette double intervention de la mission et de la croisade de bien des façons. C’est de cette historiographie conflictuelle et passionnée dont il sera question dans ce texte. 

    En fait, trois horizons principaux seront explorés. Dans un premier temps, la vision allemande des croisades baltiques sera présentée, alors que les historiens de Prusse, puis d’Allemagne, en firent une entreprise civilisatrice, glorifiant leur nation en devenir. Ensuite, il est nécessaire de voir l’apport que les historiens baltes et slaves apportèrent à cette historiographie, y discernant plutôt un bain de sang et une perte de liberté. Enfin, il existe, depuis la fin des années 1990, une vision culturelle du problème, tentant de comprendre les tenants et les aboutissants des missions et des croisades livoniennes.  

    Les croisades baltiques : le flambeau civilisateur des peuples germaniques

    Contexte historico-politique : l’émergence d’un nationalisme germanique

    Pour bien comprendre l’historiographie germanique concernant les croisades baltiques, il faut saisir le contexte politique européen du XIXe siècle. À la suite du Congrès de Vienne de 1815, réunissant les pays ayant vaincu la France, la Prusse prit une nouvelle importance [5]. Peu après la création du Concert des Nations la même année, une nouvelle génération n’ayant connu ni les guerres ni les révolutions passées entra sur la scène politique et historique internationale, mettant de l’avant un nationalisme excessif inspiré du romantisme allemand [6]. Ce nationalisme était entre autres une réponse à l’émersion de la Russie du XIXe siècle [7]. Le romantisme, pour sa part, supposait une identification de sources nationales, une mise en place d’un passé historique germanique et donc, d’une histoire ayant des visées politiques [8]. Ainsi, lorsqu’arriva le Printemps des Peuples en 1848, l’Allemagne tint un rôle primordial, mettant de l’avant un discours nationaliste :  

    Les discours que l’on entendait au parlement de Francfort étaient fort inquiétants pour les Britanniques et les autres puissances européennes : on évoquait une Allemagne de 100 millions d’habitants, on parlait d’une “mission” du germanisme contre les peuples slaves et latins. 

    Georges-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, p. 70.

    Ce mode de pensée devait perdurer jusque vers 1945. Les Teutoniques et les croisades baltiques furent mis au premier plan de cette harangue : « Disculper l’Ordre, c’était protéger le IIe Reich» [10]. Cela devint encore plus vrai après la défaite de la Première Guerre mondiale : 

    […] avec d’autres symboles tels que les Germains de l’Antiquité, la Hanse, Frédéric II de Prusse ou le Saint Empire romain germanique, l’État centré autour de Marienbourg devint la matrice d’une nouvelle Allemagne appelée à se redresser après l’humiliation de 1919. 

    Ibid., p. 608.

    Cette idée se cristallisa avec la société de la marche vers l’est, ou l’Ostmark, dont les membres mettaient de l’avant que la population allemande devait se défendre de ses voisins polonais et ainsi, éviter une nouvelle défaite de Tannenberg [12]. Usant de ce ton nationaliste, positiviste et romantique, Himmler alla même jusqu’à défendre l’idée selon laquelle les Teutoniques avaient créé, au Moyen Âge, un État moderne, s’en inspirant pour organiser les SS [13]. 

    Les signes de ce courant au travers des œuvres iconographiques et historiques 

    Avant de s’attaquer à l’historiographie, il faut mentionner qu’il y eut au XIXe siècle un courant artistique autour du thème de l’évangélisation de la Livonie. Les plus célèbres enluminures à ce sujet sont de Friedrich Ludwig von Maydel et s’intitulent Fünfzig Bilder aus der Geschichte der deutschen Ostsee-Provinzen Russlands [14]. Dans ces dernières, l’artiste chercha à démontrer que les croisés germaniques menaient le combat de la civilisation contre la barbarie. Les piliers de la culture germaine étaient alors l’Église et la religion chrétienne, ce qui expliquait les nombreuses représentations du païen brutal et cruel combattant les chevaliers et martyrs chrétiens, hommes pieux et braves. Fait intéressant, l’artiste représenta aussi le côté civilisateur de l’entreprise religieuse, illustrant des scènes plus pacifiques, comme la fondation de Riga, la tenue de pièces de théâtre chrétiennes ou encore, de baptêmes [15]. 

    Néanmoins, la figure de proue de ce courant historiographique est sans aucun doute Heinrich von Treitschke, historiographe officiel de la Prusse à partir de 1886 [16]. Ce dernier avait publié en 1862 Das Deutsche Ordensland Preußen [17], que l’on peut traduire par La Terre allemande et l’Ordre de Prusse [18]. Cet ouvrage présente les traits positivistes, nationalistes et romantiques de l’historiographie allemande de cette époque. En fait, selon les traducteurs anglais de l’édition de 1942, on peut dire de son ouvrage qu’il :  

    […] exemplifies the writer’s most salient characteristics: a worship of the State; belief in the fundamental excellence of the German race and of German ways (a belief which made him a forerunner of Nazism); and a conviction that, by divine dispensation, it had been the mission of the Hohenzollerns, working through Prussia, to unify Germany and ensure the unrestricted predominance of those who are now usually spoken of by Germanophils as Nordics or Aryans. 

    Heinrich von Treitschke, Origins of Prussianism (The Teutonic Knights), traduit par Eden et Cedar Paul, New York, Howard Fertig, 1969 [1942], p. 8.

    Ainsi, dans les premières pages de son livre, Treitschke introduit déjà l’idée d’une Allemagne triomphante, mentionnant que la jeune génération ne peut seulement imaginer quelle fut la grandeur de la « germanicité » de l’époque médiévale. Pour lui, les Germaniques médiévaux, dont les Teutoniques, les missionnaires et les croisés en premier plan, furent des conquérants, des civilisateurs capables d’imposer une discipline aux peuples slaves incultes [20]. D’ailleurs, les Prussiens de son temps seraient, de son point de vue, les héritiers de ces héros médiévaux, alors qu’il trace dans son texte une continuité entre la Prusse du XIIIe siècle et celle de 1862. Les chevaliers teutoniques avaient tracé la voie vers l’État moderne qu’allait devenir l’Allemagne [21]. En outre, la conquête de la Livonie ne serait qu’une suite logique de la soumission de la Prusse, le but des Allemands étant seulement d’évangéliser et de civiliser ses voisins qualifiés d’arriérés. Les missionnaires et les croisés, usant d’un esprit nationaliste, étant plus évolués que la moyenne, auraient voulu, grâce à leur triple fierté de chrétiens, de chevaliers, et surtout, de Germaniques, faire un immense front contre les païens dans le but de les éduquer et de les convertir [22]. Pour Treitschke et ses homologues, l’expansion de la « germanicité » n’avait pour but que d’octroyer une plus grande liberté à la population païenne de Prusse, de Livonie et d’Estonie [23]. Les historiens prussiens et allemands ne pouvaient cependant nier l’existence de révoltes des populations soumises. Ils reconnaissaient dès lors l’existence de certains abus de la part des conquérants, mais surtout, une perfide corruption des mœurs venant des Slaves : « In a word, was it to be permitted that the strict State and the easy-going customs of the Germans should be substituted for the anarchic crudity of Polish Slavs? [24]» Néanmoins, il est souligné que ces dernières n’auraient pu avoir lieu sans la technologie importée par les conquérants germaniques en terres baltiques [25]. Il s’agissait donc de « dégâts collatéraux » de la mission. 

    Cette vision nationaliste, hostile au-delà de toute mesure envers les Slaves (et particulièrement, les Polonais), transformait aux yeux des historiens germaniques ces peuples en traîtres, en schismatiques alliés aux païens et devant être aussi civilisés [26]. C’est pourquoi elle put aisément traverser les époques jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, alors que le nazisme réutilisa certaines de ces valeurs dans sa propre propagande. Treitschke avait déjà lancé l’idée, reprise par les dirigeants nazis, selon laquelle il fallait reconquérir les terres perdues, l’espace vital allemand : « Since then, however, the evil days of oppression have returned, thanks to the excesses of a Panslavist Muscovite party [27]». « Day by day Germans are still carrying the advantages of civilization to the east [28]». 

    Les croisades baltiques : un âge de ténèbres

    Une lutte pour la liberté : l’historiographie balte

    L’historiographie balte, pour sa part, s’inscrit à la base dans un processus de lutte de la classe paysanne afin d’obtenir de meilleures conditions socio-économiques et légales, associées au nationalisme européen du XIXe siècle [29]. On voulait en fait se libérer de la tutelle de ceux que l’on considérait comme les descendants des Germaniques conquérants de l’âge des croisades. Dans ce courant, il est fait mention de la fin d’un âge d’or estonien, en raison de l’arrivée d’hommes de fer et de leur conquête de l’Estonie, tel que le mentionne Friedrich Reinhold Kreutzwald dans son Klevipoeg datant de 1853 [30]. Cet ouvrage devait certes donner le ton au courant historiographique, mais non pas l’influencer de manière définitive.  

    L’œuvre emblématique de ce courant, dressant un portrait plutôt sombre de la croisade et de la mission livonienne, est celle de Carl Robert Jakobson, Kolm isamaa kŏnet, aussi connue sous le nom de L’âge de lumière, de noirceur et de l’aube du peuple estonien, datant de 1868. C’est en fait dans cette monographie qu’il établit ce qui devint la structure traditionnelle de l’histoire estonienne en trois âges : la lumière des temps anciens et libres, la noirceur de la conquête et de l’esclavage et enfin, l’aube ou l’éveil du peuple moderne [31]. Pour lui, « [the ancient times] show us the Estonian people in a spirit so high, as we see it only amongst the most highly educated ancient peoples [32]». Ainsi, sous sa plume, ce que l’on dépeignait comme la lumière de la vraie foi devint la nuit de l’esclavage, la noirceur du paganisme se transformant en l’âge d’or du paradis ancien, les pieux croisés en de cruels conquérants et les païens sauvages et barbares en de nobles héros [33]. Cette adoration des temps anciens, dans un contexte marqué d’un fort mouvement nationaliste, justifia la mise en lumière de la culture, de l’histoire et même de la religion d’autrefois. On cherchait à retrouver ces valeurs oubliées en raison de la conquête cruelle et violente de la croisade par l’épée [34]. Alors que pour les Prussiens, puis les Allemands, la croisade était une entreprise civilisatrice, Jakobson écrit que « there almost did not pass a year when people’s blood would not have bled like creeks of water [35]». De ce fait, l’historiographie germanique et la mission vantée par cette dernière n’étaient, aux yeux des Baltes, qu’une hypocrisie visant à s’approprier de nouveaux territoires.  

    Ce courant, noircissant l’image de la croisade, donna naissance à de nombreux romans historiques, tous aussi marqués du mouvement nationaliste [36]. Cette tendance s’accentua davantage lors des guerres d’indépendance de la Lettonie et de l’Estonie, se déroulant toutes deux de 1918 à 1920. Le discours, qui s’était jusqu’alors basé sur une lutte des classes, changea d’orientation. Le but était désormais de lutter pour la liberté, l’indépendance, et non plus de mettre en place une lutte des classes [37]. Ainsi, on ne parlait plus seulement d’un oppresseur allemand, mais bien d’un tyran ayant brimé la liberté d’un peuple pendant environ sept siècles. Considérant le cadre politique en place, le positivisme historique ne pouvait que faire surface dans le discours nationaliste, et on n’hésita pas à prendre des raccourcis, à interpréter les sources pour favoriser cette soif de liberté. L’Allemand n’est donc plus civilisateur, il est destructeur de sociétés et de cultures [38].  

    Cette tendance se concrétisa peu avant la Deuxième Guerre mondiale. On associa dès lors la croisade à une résistance héroïque des Lettons et des Estoniens plutôt qu’à une défaite face aux Allemands. Hans Kruus écrivit pendant l’entre-deux-guerres et au début du second conflit mondial (de 1935 à 1940) une Histoire Estonienne en trois volumes. Dans cette dernière, il offrit une perspective nationaliste poussée à l’extrême, dénigrant toute l’entreprise allemande et voyant dans la résistance permanente des peuples baltes une source de fierté. En fait, il décrivit cette lutte ainsi : « The ancient fight for freedom is put into the service of present national interests and presented as an everlasting source of national pride that « last as long as the Estonian nation lives and fight »[39]».

    Bref, le dépouillement de la liberté et la fin d’un âge d’or des peuples anciens furent les principaux angles d’analyse de cette vision historiographique balte. De ce fait, ils virent dans la résistance de leurs aïeuls un combat constant pour l’indépendance contre l’oppresseur allemand. La perception du croisé, pur et noble, était noircie, et le païen, jusqu’alors ennemi du peuple, devint son héros. 

    Un bain de sang préparant la Seconde Guerre mondiale : l’historiographie slave

    L’historiographique slave, que l’on pourrait même qualifier de soviétique, fit surtout son apparition autour de la Seconde Guerre mondiale, au sujet de laquelle il faut rappeler quelques faits. En 1945, l’Allemagne est déclarée responsable de la guerre [40]. Cette dernière engendra de lourdes conséquences : environ 50 millions de morts, la mise en place d’une politique raciste de la part de l’Allemagne (particulièrement à l’encontre des Juifs, des Tziganes et des Slaves), l’établissement de camps de concentration et la propagation d’une politique très dure en Pologne, en Ukraine, en Russie et dans les Balkans. En outre, particulièrement en Europe orientale qui avait subi les plus dures répressions de la part de l’Allemagne du IIIe Reich, il y eut un traumatisme durable [41]. Il fallut reconstruire l’Europe, et ce processus prit un temps différent d’une région à l’autre : « L’Europe centrale (en dehors de la RDA) a bénéficié de la reconstruction politique et culturelle libérale après 1945, l’Europe orientale en revanche, sous la chape du communisme, n’a pas pu procéder à cette reconstruction [42]». 

    De ce fait, l’historiographie issue des peuples slaves ne put que s’accorder avec celle déjà véhiculée par les peuples d’Europe baltique, c’est-à-dire que l’on diabolisa les croisades baltiques, et surtout, les missionnaires, croisés allemands et ordres militaires qui y participèrent. À cette époque, même du côté occidental de l’Allemagne, on ne put préserver la vision idéalisée que l’on avait de ce processus civilisateur, et ce, pour les quarante-cinq années subséquentes :  

    Là aussi, l’année 1945 a bien été une “année zéro”. La rupture forcée avec les traditions historiques de l’avant-guerre, l’épuration des universités, l’orientation culturelle pro-occidentale de ce qui va devenir, en 1949, la République fédérale d’Allemagne conduisent, dans le champ scientifique, à une marginalisation quasi totale de l’histoire teutonique. 

    Danielle Buschinger et Mathieu Olivier, Les Chevaliers teutoniques, p. 428.

    Il faut considérer qu’il y avait eu des précurseurs à ce courant, tel qu’il fut constaté avec les peuples baltes. Dès les débuts du XXe siècle, dans les pays slaves, il y eut une histoire noire des croisades, portant sur la violence, mais encore marginale. C’est seulement à la suite de la Deuxième Guerre mondiale que cela explosa, les historiens de cette époque allant jusqu’à comparer les ordres militaires, et en premier plan, les chevaliers teutoniques, aux nazis. Certains virent même en Heinrich von Plauen, Grand Maître de l’Ordre teutonique de 1410 à 1413, un Adolf Hitler des temps médiévaux. Cette tendance négative s’étendit aussi en République démocratique allemande, alors qu’elle souhaitait se distancier de ses compatriotes de l’ouest [44].

    Parmi les auteurs notables de cette période, il faut compter Karol Gorski, un historien polonais. Dès 1937, ce dernier avait voulu revisiter l’historiographie des croisades baltiques et la renouveler. Il voulut d’abord la regarder d’un point de vue neutre, faisant une histoire comparative entre l’Ordre des chevaliers teutoniques et les autres ordres militaires de l’époque, à savoir les Templiers et les Hospitaliers. Toutefois, à la suite du conflit de 1939-1945, l’orientation de ses travaux se modifia drastiquement pour se fusionner à la ligne directrice de l’historiographie slave et balte d’alors, c’est-à-dire, celle d’une histoire où l’on ne cherchait plus à mettre en perspective les ordres militaires, les croisades et la christianisation de la Livonie et de l’Estonie médiévales en fonction des mentalités de cette époque.  

    Dans le même ordre d’idées, il est possible de soulever l’œuvre de Mgr Wincenty Urban, évêque de Wroclaw en 1959. Pour ce dernier, il est indubitable que les Teutoniques, les missionnaires et les croisés étaient en fait les prédécesseurs des nazis, des brutes sanguinaires et ambitieuses, en soif de conquêtes et de domination :  

    Sous le couvert de convertir la population de Prusse à la foi chrétienne et de l’attacher à l’Église du Christ, ils la subjuguaient d’une façon atroce, ils détruisaient son indépendance, l’exterminaient, établissant à sa place des colons de l’Europe occidentale, surtout des Allemands, qui leur étaient tout dévoués.

    Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 618.

    Ce courant, surtout en vogue sous la chape de l’Union des républiques socialistes soviétiques, absorba bientôt l’historiographie des pays baltes, et les deux tendances n’en firent bientôt qu’une seule. Néanmoins, en 1991, à la suite de la chute de cette URSS, l’Estonie et la Lettonie entreprirent une seconde guerre d’indépendance, compliquant de ce fait l’historiographie des croisades et missions baltiques. De plus, il fallait désormais que ces pays comptent avec la création de l’Union européenne et conséquemment, avec le processus d’européanisation qui commença à s’immiscer dans l’historiographie européenne, ce qui ouvrit la voie à un nouveau courant. Il y eut donc, pendant quelque temps, deux tendances historiographiques parallèles, mais difficiles à combiner [46]. 

    Et aujourd’hui? Une historiographie culturelle des croisades baltiques

    Un contexte de renouveau

    Enfin, une autre orientation historiographique prit naissance lors de la fin de la Guerre froide. Déjà en 1989, avec la chute du Mur de Berlin, des mouvements politiques et historiques empreints de changements commencèrent à se manifester. Ces derniers se concrétisèrent avec la dissolution de l’URSS en 1991. Cette courte période marque en fait la brusque fin du communisme soviétique. Les transformations politiques souhaitées par Gorbatchev échappèrent rapidement au contrôle de Moscou, ce qui, joint à l’exaspération des populations, créa un soulèvement ouvrant la porte à une plus grande perspective historique [47]. Pour les historiens, la chute de la puissance soviétique signifiait l’ouverture des archives du bloc de l’est et donc, de nouvelles avenues de recherche [48]. On pouvait dès lors tenter de mettre en place une histoire plus neutre des croisades et des ordres militaires, le tout en tenant compte des mentalités médiévales [49]. Cela fut grandement favorisé par les débats portant sur l’identité européenne, avec la création précédemment évoquée de l’Union européenne [50]. 

    Les missions et croisades livoniennes : un choc des cultures 

    Si, officiellement, ce courant se démarqua surtout à partir des années 1990, il ne faut néanmoins pas négliger une monographie datant de 1980 et faisant œuvre de précurseur de cette tendance. Il s’agit de The Northern Crusades: The Baltic and the Catholic Frontier 1100-1525, écrit par Eric Christiansen. Ce dernier, très critique vis-à-vis de ses prédécesseurs, remarqua qu’il n’y existait pas, à sa connaissance, d’historiographie neutre traitant de l’Europe baltique. Le sujet était resté selon lui purement allemand, balte ou slave, ce qui créait un problème important : l’absence de recul pour traiter cette question autrement que d’un point de vue intéressé et nationaliste [51]. Cet historien se fixa donc comme objectif de remédier à la question. 

    Malgré le regard qu’il posa sur l’historiographie, on ne peut pas dire que l’œuvre de Christiansen soit totalement dépourvue d’une vision tendancieuse, ce qui en fait une œuvre charnière plutôt qu’une réelle marque de nouveauté historienne. En effet, son analyse historique reste fortement imprégnée des opinions défavorables datant de la Seconde Guerre mondiale. Tout comme ses homologues slaves et baltes, il considère et affirme dès le début de son ouvrage que les missionnaires, les croisés et les ordres militaires n’entreprirent l’évangélisation de la Prusse et de la Baltique que dans le but d’y établir des royaumes indépendants des autres puissances européennes, et ce, peu importe le prix [52]. Conséquemment, il a une tendance à accorder une plus grande considération aux dimensions violentes de la christianisation de ces territoires. Néanmoins, il ouvre la voie à une perspective culturelle. En effet, il tente de comprendre ce qui, dans la culture européenne médiévale, permit et justifia la tenue des croisades dans ces territoires pourtant dénués de lieux saints à défendre ou reprendre [53]. Cela le poussa par la suite à offrir une définition de la croisade telle qu’elle était établie et telle qu’elle évolua au Moyen Âge et non pas en fonction d’une optique nationale [54]. En conséquence, cela porte parfois cet historien à nuancer sa vision de l’intégration religieuse de ces territoires à la chrétienté. Malgré une composante majoritairement violente de la conversion, il considère que ce ne furent pas tous les membres de l’élite ecclésiastique qui étaient en accord avec ce processus [55]. Il ajoute à cela que les monastères jouèrent un rôle important dans le processus de conversion, servant en quelque sorte de phares aux néophytes et permettant leur instruction dans la foi chrétienne [56]. Néanmoins, s’appuyant sur des sources telles que la Chronica Slavorum d’Helmod, prêtre de Bosau, il suppose que la croisade servait surtout des objectifs économiques et politiques [57]. 

    Quoi qu’il en soit, l’ouverture de Christiansen permit l’émergence d’un nouveau courant historiographique, se penchant sur les mentalités, les idées et la culture entourant la mission et la croisade. Parmi les contributions importantes à ce mouvement, nous pouvons compter deux actes de colloques. Tous deux dirigés par Allan V. Murray, ils s’intitulent Crusades and Conversion on the Baltic Frontier 1150-1500 [58] et The Clash of Cultures on the Medieval Baltic Frontier [59]. Afin de demeurer concis dans notre propos, nous allons seulement nous concentrer sur le second ouvrage cité.   

    Tel que le titre le mentionne, la notion clé de ce recueil est le choc culturel. En fait, au fil de la lecture, il devient évident que les modifications imposées par les croisés et les missionnaires supposèrent une foule d’autres changements : au niveau moral, culturel, politique, social et économique. Dans son introduction, Allan V. Murray écrit : 

    The conquest and conversions of the lands on the southern and eastern shores of the Baltic Sea by Germans, Danes and Swedes from around 1150 to 1300 represented not only a confrontation between the Christianity of the conquerors and the diverse pagan beliefs of the native peoples. The crusaders, settlers, military orders and ecclesiastical authorities which established Christian control of Pomerania, Finland, Livonia and Prussia brought with them an alien culture, which was manifested in the arrival of diverse new institutions, artifacts and practices. 

    Allan V. Murray, « Introduction », dans Alan V. Murray, dir., The Clash of Cultures, p. 1.

    Un point nouveau de cette historiographie est la supposition que la conversion ne se fit plus seulement par la confrontation des missionnaires et des païens ou par la force. Une grande partie de l’évangélisation aurait en fait passé par la christianisation de l’espace. Il s’agissait donc d’un phénomène pouvant être symbolique (sanctification de la terre au nom de la Vierge Marie) ou visible (construction d’églises). Pour Carsten Selch Jensen, il faut mentionner un changement des frontières culturelles. Pour ce dernier, les églises et les forteresses chrétiennes étaient certes des centres de pouvoir et de domination, mais aussi des symboles perceptibles de la christianisation du territoire. En effet, pour les païens, ils étaient typiquement chrétiens, puisqu’il s’agissait des premiers ouvrages défensifs de pierres et de briques présents en Livonie. Ces monuments prirent donc la signification de symboles culturels, sur lesquels il faut porter un regard nouveau [61]. Eva Eihmane, pour sa part, mentionne dans son article que l’existence d’un choc culturel entre les païens et les chrétiens, ainsi que la résistance des premiers, démontre la volonté de ne pas oublier une culture ancestrale [62]. Ainsi, il faut tenter de connaître cette culture, de dresser un portrait de ses grandes lignes pour que l’on puisse mesurer l’impact qu’elle eut sur les envahisseurs [63]. Tiina Kala souligne cependant une difficulté de ce nouveau champ historiographique : il nous est impossible de savoir ce que les païens pensaient réellement de l’arrivée du christianisme. Il ne faut pas oublier en effet que les païens ne possédaient pas l’écriture et, faute de sources, il demeure difficile pour l’historien d’évaluer toutes les subtilités entourant la croisade, la réception du christianisme et l’instruction des néophytes d’un point de vue autre que chrétien. Néanmoins, le fait de se demander comment la christianisation et la croisade furent perçues par les païens dénote une nouveauté [64]. Enfin, les historiens travaillant sur l’Europe baltique médiévale commencent de plus en plus à définir deux vagues ou moments dans l’évangélisation de la Livonie : un premier, plutôt pacifique, et un second violent, faisant suite à l’échec des missionnaires [65].  

    Plus récemment, nous pouvons mentionner un dernier recueil d’actes de colloque datant de 2011. Ce dernier, dirigé par Marek Tamm, Linda Kaljundi et Carsten Selch Jensen a pour titre Crusading and Chronicle Writing on the Medieval Baltic Frontier [65]. Les contributeurs se concentrent surtout sur la relecture de la principale source pour parler des débuts de la mission livonienne, c’est-à-dire le Heinrici Chronicon Livoniae. Portant un regard nouveau sur cette dernière, on tente d’y déceler autre chose qu’un simple récit factuel. Les articles font ainsi mention de la conversion de l’espace, du rôle du chroniqueur dans la transmission du savoir, de l’historiographie entourant la chronique et enfin, de la représentation que l’auteur se faisait des pratiques religieuses et militaires entourant la conversion de la Livonie. 

    Du nationalisme au multiculturalisme

    Ainsi, nous avons pu constater l’existence, depuis le milieu du XIXe siècle jusqu’à aujourd’hui, de trois courants principaux. Tout d’abord, il y eut un courant fortement nationaliste et pro-allemand, inspiré du positivisme et du romantisme. Ce dernier présentait une vision très positive de la croisade, de la mission et des ordres militaires considérés en fait comme un tout permettant de civiliser et de christianiser des peuples baltes et slaves, jugés jusqu’alors arriérés. Les deux conflits mondiaux ne faisant qu’alimenter ce nationalisme, il fallut attendre la fin de la Deuxième Guerre mondiale pour le voir s’estomper. En parallèle, il y eut un courant balte et slave qui s’inspira aussi de la montée du nationalisme européen et, dans une certaine mesure, de la lutte de la classe paysanne pour obtenir plus de droits, tout comme celle pour l’indépendance et la liberté de l’Estonie et de la Lettonie. Cela mena les historiens adoptant la ligne de ce courant à utiliser l’histoire pour générer une identité nationale forte pour les peuples baltes. La volonté de s’approprier cette dernière devait d’ailleurs les mener à revisiter leur histoire, pour y déceler une lutte constante contre les Germaniques afin d’obtenir leur indépendance. Après 1945, tant chez les Slaves que les Baltes, ce courant devait d’ailleurs prendre plus d’importance, menant certains historiens à dresser un parallèle entre les croisades baltiques et la Deuxième Guerre mondiale, entre les croisés, les ordres militaires et les nazis. En fait, selon Sylvain Gouguenheim, on peut dire de l’historiographie de cette époque que :  

    Ancêtre glorieux, prédécesseur gênant ou ennemi ancestral, l’Ordre fut donc un élément constitutif des identités nationales de cette partie de l’Europe. On se déterminait par rapport à ses actes, on choisissait ce que l’on revendiquait ou rejetait de son héritage. Son histoire mise au service du nationalisme prit la forme, en Allemagne comme en Pologne, d’une “germanisation” de l’Ordre. 

     Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 623.

    Enfin, depuis les années 1990, un mouvement culturel s’est implanté chez les historiens de ce mouvement. Ces derniers tentent plutôt de percevoir tout ce qu’impliquait une entreprise d’une telle envergure. Ce n’est plus, dès lors, un simple mouvement militaire et conquérant, mais aussi une œuvre missionnaire, religieuse et culturelle. 

    Ainsi, l’historiographie entourant les croisades et les missions baltiques s’est décentralisée au cours de son histoire. D’abord traitées par les principaux intéressés, c’est-à-dire les descendants des médiévaux y ayant participé, elles sont aujourd’hui traitées par des historiens de divers horizons, mais s’intéressant tous aux chocs culturels et à la formation historique de l’Europe.

    Références

    [1] Georges Duby, Le Moyen Âge de Hugues Capet à Jeanne d’Arc (987-1460), Paris, Hachette Littérature, 2008, p. 185. 

    [2] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, Paris, Tallandier, 2007, 775 p. 

    [3] Linda Kaljundi avec la collaboration de Kaspars Kļaviņš, « The Chronicler and the Modern World : Henry of Livonia and the Baltic Crusades in the Enlightenment and National Traditions », dans Marek Tamm, Linda Kaljundi et Carsten Selch Jensen, dir., Crusading and Chronicle Writing on the Medieval Baltic Frontier, Aldershot, Ashgate, 2011,  p. 410. 

    [4] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 410. 

    [5] Georges-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, 1ère éd. Presse Universitaire de France, 2007, p. 49. 

    [6] Georges-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, p. 60-61.

    [7] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 417.

    [8] Ibid., p. 418.

    [9] Georges-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, p. 70.

    [10] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 603.

    [11] Ibid., p. 608. 

    [12] Bataille de 1410 marquant la plus grande défaite de l’Ordre Teutonique contre les forces lituaniennes et polonaises. Pour plus de détails, voir Henry Bogdan, Les chevaliers teutoniques, Paris, Perrin, 2002 [1995], p. 161. 

    [13] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 610. 

    [14] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 419. 

    [15] Ibid., p. 422.

     [16] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 604.

    [17] Danielle Buschinger et Mathieu Olivier, Les Chevaliers teutoniques, Paris, Ellipses, 2007, p. 418. 

    [18] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 604.

    [19] Heinrich von Treitschke, Origins of Prussianism (The Teutonic Knights), traduit par Eden et Cedar Paul, New York, Howard Fertig, 1969 [1942], p. 8. 

    [20] Ibid., p. 18. 

    [21] Ibid., p. 21. 

    [22] Henrich von Treitschke, Origins of Prussianism, p. 39. 

    [23] Ibid., p. 57. 

    [24] Ibid., p. 66. 

    [25] Ibid., p. 45.

    [26] Ibid., p. 110-140. 

    [27] Heinrich von Treitschke, Origins of Prussianim, p. 148-149. 

    [28] Ibid., p. 161.

    [29] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 423.

    [30] Ibid., p. 425.

    [31] Ibid. 

    [32] Carl Robert Jakobson, Kolm isamaa kŏnet, Tallin, Rudolf Pōldmäe, 1991 (1868), p. 17, dans Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 426. 

    [33] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 426. 

    [34] Ibid., p. 427. 

    [35] Ibid., p. 428. 

    [36] Ibid., p. 430. 

    [37] Ibid., p. 431.

    [38] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 433-434.

    [39] Ibid., p. 434.

    [40] Georges-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, p. 256. 

    [41] Ibid., p. 258. 

    [42] Ibid., p. 260. 

    [43] Danielle Buschinger et Mathieu Olivier, Les Chevaliers teutoniques, p. 428.

    [44] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 618.

    [45] Ibid.

    [46] Linda Kaljundi, « The Chronicler and the Modern World », p. 444-445. 

    [47] George-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, p. 316. 

    [48] Danielle Buschinger et Mathieu Olivier, Les Chevaliers teutoniques, p. 430. 

    [49] Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers Teutoniques, p. 624. 

    [50] George-Henri Soutou, L’Europe de 1815 à nos jours, p. 329.

    [51] Eric Christiansen, The Northern Crusades: The Baltic and the Catholic Frontier 1100-1525, Londres, The Macmillan Press LTD, 1980, p. 4.

    [52] Eric Christansen, The Northern Crusades, p. 4. 

    [53] Ibid., p. 8-47. 

    [54] Ibid., p. 48. 

    [55] Ibid., p. 54. 

    [56] Ibid., p. 52.

    [57] Ibid., p. 57. 

    [58] Allan V. Murray, dir., Crusades and Conversion on the Baltic Frontier, 1150-1500, Farhnam, Ashgate, 2001, 300 p.

    [59] Allan V. Murray, dir., The Clash of Cultures on the Medieval Baltic Frontier, Aldershot, Ashgate, 2009, 369 p.

    [60] Allan V. Murray, « Introduction », dans Alan V. Murray, dir., The Clash of Cultures, p. 1. 

    [61] Carsten Selch Jensen, « How to Convert a Landscape: Henry of Livonia and the Chronicon Livoniae », dans Allan V. Murray, dir., The Clash of Cultures, p. 154.

    [62] Ibid., p. 157. 

    [63] Eva Einhame, « The Baltic Crusades: A Clash of Two Identities », dans Allan V. Murray, dir., The Clash of Cultures, p. 40. 

    [64] Tiina Kala, « Rural Society and Religious Innovation: Acceptance and Rejection of Catholicism Among the Native Inhabitants of Medieval Livonia », dans Allan V. Murray, dir., The Clash of Cultures, p. 172. 

    [65] Andris Šnē, « The Emergence of Livonia: The Transformation of Social and Political Structures in the Territory of Latvia during the Twelfth and Thirteenth Centuries », dans Allan V. Murray, dir., The Clash of Cultures, p. 155. 

    [66] Marek Tamm, Linda Kaljundi et Carsten Selch Jensen, dir., Crusading and Chronicle Writing, 522 p.

    [67]  Sylvain Gouguenheim, Les Chevaliers teutoniques, p. 623.