Loisirs, divertissement et conscience de classe : Le cas des chômeurs et du Parti communiste du Canada au cours de la Grande Dépression

Benoit Marsan
Université de Sherbrooke

Mots clés : Loisir, Divertissement, Canada, Québec, Parti communiste du Canada, Chômeurs, Grande Dépression, Marxisme, Conscience de classe

 

Table des matières
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    Loisirs, divertissement et conscience de classe : Le cas des chômeurs et du Parti communiste du Canada au cours de la Grande Dépression

    A priori, il nous semblait difficile d’intégrer le sujet de nos recherches dans le cadre d’un colloque intitulé Divertir, jouir et consommer : excès et discrétions du plaisir dans l’histoire[1]. Généralement, chômeurs, communisme et crise économique ne riment pas avec des concepts tels le plaisir ou la jouissance. Cependant, en dépouillant certaines sources, comme le RCMP Security Bulletins : The Depression Years, The Worker, ou encore le Building a Mass Unemployed Movement du National Council of Unemployed Councils (NCUC)[2], nous avons trouvé certains indices qui permettent d’aborder la dimension culturelle du mouvement des sans-emploi et l’importance de certaines activités et expressions sociales et culturelles, que l’ont peut associer aux loisirs et au divertissement. Bien entendu, cet article n’est pas le fruit d’un travail exhaustif. Il s’agit avant tout de pistes de recherche pouvant mener à une meilleure compréhension du développement de la conscience de classe au cœur de la Grande Dépression. Comme le démontre E.P. Thompson dans son classique The Making of the English Working Class, il s’agit d’un phénomène complexe qui recoupe plusieurs dimensions[3]. Nous nous concentrerons donc sur l’aspect culturel du mouvement, et ce, à travers le sport et le chant.

    Cet article se décline en quatre parties. Une première consiste en un bref survol historiographique du mouvement des chômeurs et du Parti communiste du Canada (PCC) pendant la Grande Dépression. Une deuxième aborde la question de la conscience de classe. Une troisième se consacre aux loisirs et aux divertissements. La quatrième fait office de conclusion.

    Survol historiographique

    L’historiographie occidentale présente généralement les sans-emploi comme des victimes passives de l’histoire. À travers une étude transnationale de la mobilisation des sans-travail depuis deux siècles, l’ouvrage collectif Unemployment and Protest : New Perspectives on Two Centuries of Contention s’attaque à cette conception[4].

    […] many of those who were out of paid employment protested against their fate, long before the unemployed were recognized as a distinct social group. This protest was not always politically motivated; nor was it necessarily collective. It was certainly not continuous, but then, no protest activities ever are. Nor did all the unemployed, or even just a majority of them, participate, but this, too, mirrors the pattern of political participation in society at large. […] The repertoires and patterns of protest changed over time, as the essays in this book demonstrate, but the notion that the state had to pay attention to the unemployed to preserve social and political stability remains a constant feature of all economic and social crisis from the nineteenth to the twenty-first century[5].

    En histoire du Québec, il n’existe aucune véritable étude sur le mouvement des sans-emploi durant la Grande Dépression ou qui fait de ces sans-travail des acteurs historiques à part entière, à l’exception de Denyse Baillargeon dans sa publication Ménagère au temps de la Crise[6].Il est cependant possible d’en déceler quelques traces dans des ouvrages généraux ou encore dans des travaux qui abordent l’histoire du mouvement ouvrier ou celle des secours. Bien qu’il date quelque peu, il est instructif d’observer comment les auteurs de l’ouvrage de synthèse Histoire du Québec contemporain, le Québec depuis 1930 abordent le sujet. Le collectif d’historiens affirme que la mobilisation des chômeurs est « un phénomène minoritaire » et que « ce qui frappe surtout, c’est l’absence d’action collective massive de la part des chômeurs »[7]. À la lecture de tels propos, il est donc facile de conclure que les sans-travail québécois et montréalais sont apathiques et acceptent leur sort. Cependant, les travaux d’Andrée Lévesque et de Marcel Fournier, bien qu’ils ne portent pas spécifiquement sur le mouvement des sans-emploi, mais plutôt sur la gauche, le communisme et l’anticommunisme au Québec, contredisent de telles affirmations. Comme l’activité du PCC au Québec durant les années 1930 est intimement liée à la lutte des sans-travail, c’est dans ces travaux qu’il est surtout possible de voir les sans-emploi montréalais en action[8].

    La production historique relative aux secours traite abondamment des sans-emploi et du phénomène du chômage. Cependant, l’acteur principal est l’État à travers son intervention. Cette historiographie n’a pas pour objet de présenter les chômeurs à titre d’acteurs. Par exemple, les travaux de François Bisson s’inscrivent dans une perspective de régulation sociale, alors que ceux de James Struthers, Terry Copp et Mary Mackinnon portent sur la construction de l’État-Providence et l’interventionnisme étatique[9]. Dans ces ouvrages, les sans-travail sont rarement présentés en position de résistance, mais essentiellement à travers les politiques ou l’absence de politiques de l’État. D’autres études sur les secours, notamment celle de Claude Larivière ou de Suzanne Clavette, se démarquent et laissent une place importante aux sans-emploi et à leurs luttes, bien que cet aspect ne soit pas leur sujet principal[10].

    Pour voir les sans-emploi portés au rang d’acteur historique à part entière, il faut se tourner du côté de l’historiographie canadienne-anglaise où quelques travaux abordent leurs luttes au cours de la Grande Dépression. Cette historiographie se divise en deux thématiques. La première concerne les ouvrages qui traitent de la grève dans les camps de travail et de la Marche sur Ottawa de 1935[11]. Ils décrivent les luttes menées par les jeunes chômeurs célibataires de l’Ouest canadien. Quant à la deuxième catégorie, elle porte sur les luttes des sans-travail urbains dans leurs différentes dimensions[12]. L’ensemble de cette littérature permet de tirer quatre principaux constats sur le mouvement. Premièrement, que les sans-travail qui y participent font preuve de détermination et d’imagination en déployant une panoplie de moyens d’action pour améliorer leurs conditions. Deuxièmement, l’État fait preuve d’intransigeance et préfère répondre à la mobilisation par la répression. Troisièmement, à travers diverses organisations qui lui sont directement ou indirectement affiliées, le PCC est la principale force politique derrière cette agitation. Finalement,il s’agit d’un mouvement organisé et concerté qui s’active et se manifeste dans les différentes régions canadiennes[13].

    Malheureusement, il est impossible dans le cadre de cet article d’entrer dans les détails relatifs aux débats entourant l’histoire du PCC. Cependant, selon l’historien John Manley, le parti est loin d’être un acteur politique isolé de la classe ouvrière au cours des années 1930. Par son action auprès des travailleurs inorganisés, il entre en contact et mobilise un large éventail de travailleurs et de travailleuses sur le terrain de la lutte de classe, phénomène qui ne s’était pas produit en Amérique du Nord aussi largement depuis les années 1919-1920[14]. De plus, se référant aux partis communistes canadien et américain, John Manley affirme :

    They consciously set out to organize groups whom the craft unions had often ignored or patronized—women, immigrants from Asia and south, east, and central Europe, and (in the United States) African Americans—and in the process burrowed into open-shop plants and established some of the salient from which the CIO would move forward a few years later[15].

    Toujours selon lui, la signification ouvertement politique du mouvement ne doit pas être exagérée. Par contre, un aspect à ne pas négliger est la vie sociale que le parti génère et qui semble attirer en grand nombre les sans-emploi et leurs familles. Pour les sans-travail et leurs proches, échapper à la dure réalité de la période joue un rôle important[16].

    Par exemple, les sans-emploi de Vancouver peuvent participer à sept différentes activités sociales organisées par les groupes de chômeurs proches du PCC entre le 9 janvier et le 4 février 1932. Parmi ces événements, on retrouve entre autres des danses, des concerts, des banquets, etc. Sans avoir procédé à une recension systématique, il est possible de retrouver le même genre de phénomène à Montréal ou dans d’autres grandes villes canadiennes[17].

    Conscience de classe

    Comme l’affirme E. P. Thompson dans son ouvrage The Making of the English Working Classe, la classe ouvrière n’est pas le fruit d’une apparition mythique. Elle était présente à sa propre formation. Il s’agit d’un phénomène historique qui lie une série d’événements disparates, pouvant paraître isolés a priori, mais qui sont issus de l’expérience matérielle et de la conscience. Elle n’est ni une structure, ni une catégorie, mais le produit de relations humaines[18].La classe naît d’expériences communes et en opposition à des intérêts divergents. Ces expériences sont grandement déterminées par les relations productives dans lesquelles les hommes et les femmes naissent ou sont forcés[19].

    If we stop history at a given point, then there are no classes but simply a multitude of individuals with a multitude of experiences. But if we watch these men over an adequate period of social change, we observe patterns in their relationships, their ideas, and their institutions. Class is defined by men as they live their own history, and, in the end, this is its only definition[20].

    En résumé, la classe n’est pas une catégorie strictement économique. Elle est également une catégorie sociale et culturelle qui naît des relations humaines et apparaît dans le contexte des contradictions d’une époque donnée. Il est possible de discerner une ou des logiques de classe, mais pas d’en dégager une loi. Bien que la notion de classe soit au centre de la conception matérialiste de l’histoire, nous croyons, tout comme Bryan D. Palmer, qu’elle n’est pas l’unique critère analytique valable. Elle est certes déterminante en dernière instance, mais elle doit être mise en relation avec

    other developments, increasingly important in the shifting gears of modernity’s movement: gender, race, empire and imperialism, social movements, identity and subjectivity, national states, and the collectivities of struggles localized and generalized[21].

    Chez Thompson, la conscience est liée à l’expérience de classe : « Class-consciousness is the way in which these experiences are handled in cultural terms: embodied in traditions, value-systems, ideas, and institutional forms »[22]. La conscience se manifeste en outre à travers l’agencéité (agency). Celle-ci se définit à travers la lutte de classe, mais aussi par la capacité humaine d’action autodirigée, d’efficacité et de pouvoir, le tout dans une perspective à la fois individuelle et collective[23]. La conscience et l’agencéité permettent donc à la classe ouvrière de passer « d’une classe en soi à une classe pour soi »[24]. Par sa propre expérience et le développement de sa conscience, elle peut ainsi devenir une agente de transformation sociale qui vise son autoémancipation. Dans la tradition thompsonienne, c’est l’agencéité de classe, orientée par la conscience, qui influence l’histoire humaine et rend possible d’envisager un autre type de société[25].Notre approche s’oppose à une conception substitutioniste héritée de l’orthodoxie marxiste-léniniste où la classe ouvrière est incapable de développer spontanément ou de manière autonome sa conscience[26].

    Un autre problème, quant à l’étude de ce phénomène, provient de la méthode adoptée par certains sociologues. Ces derniers ont essayé de déterminer son existence ou son niveau de développement en procédant par sondages. Cette approche ne rend pas compte de sa complexité. Elle l’analyse dans un cadre fixe et statique : « A sum of the opinions of individual respondents recorded at a given moment in time may appear wholly different from the “consciousness” expressed by those same “respondents” in the midst of collective action and interaction »[27]. Selon Rick Fantasia, cette approche pose problème au niveau méthodologique, mais aussi au plan théorique[28]. Dès lors, pour reprendre ce concept emprunté à la théorie marxiste, il faut se référer à l’épistémologie de Marx où l’objectivité et la subjectivité du sujet (la classe) ne sont pas séparées l’une de l’autre, mais complémentaires[29] : « The point is that analyses of class consciousness should be based on actions, organizational capabilities, institutional arrangements, and the values that arise within them, rather than on attitudes abstracted from the context of social action »[30].

    C’est pour libérer la notion de conscience de classe de ces a priori, que Rick Fantasia développe le concept de cultures of solidarity (que nous traduisons par cultures de solidarité). Il ne s’agit pas d’une sous-culture, mais plutôt de l’apparition de formes culturelles qui se manifestent à travers des pratiques et des discours qui s’opposent à la culture hégémonique[31]. Ces cultures de solidarité se développent de plusieurs façons, à des degrés variables et dans une multitude de lieux[32]. Premièrement, elles se constituent dans le cadre de la lutte de classe. Deuxièmement, à travers les activités, les valeurs et les formes organisationnelles que la lutte génère tout au long d’un conflit, il se crée « an alternative cultural formation in many respects distinct from, and in opposition to, the dominant society »[33].

    Loisirs et divertissement

    Au-delà de la lutte politique, une des tâches du mouvement des sans-travail préconisée par le PCC est l’éducation et l’organisation des activités sociales de la classe ouvrière :

    The unemployed movement should likewise organize the social and recreational activities of workers in the neighborhoods. Social activities are a powerful factor in developing solidarity of the workers […] The forms of social activities are numerous […] Dances, house parties, picnics, outings, etc., are common forms in addition to which it is advisable to organize bands, orchestras, choirs, dramatic groups, sports activities, etc. Social and recreational activities are a medium through which the aims of the unemployed movement can reach new sections of the workers and create possibilities to draw in new forces into our work and our educational activities[34].

    Par exemple, les joutes sportives, les danses, les banquets et les pique-niques sont des activités qui ont pour effet d’attirer en grand nombre les sans-travail et leurs familles. Pour ces derniers, échapper à la dure réalité de la période joue un rôle important[35]. Le sport est l’un de ces aspects de l’intervention culturelle du PCC et des organisations de sans-travail. Ceci est confirmé par le compte rendu d’un agent de police présent à une réunion de la cellule numéro deux du district de Montréal tenue le 25 novembre 1935. Un militant procède à un résumé de la dernière réunion du Plenum de la Jeunesse communiste tenue à Toronto :

    The most important decision at (sic), at the Plenum, was to the effect that in (sic) future the league will largely work through mass organizations and clubs. It will be the special task of the members of the league to join various clubs and sports associations for the purpose of “boring from within”[36].

    Les militants communistes ne se limitent pas à infiltrer les associations sportives. Le parti met aussi sur pied ses propres ligues et activités. Les 24 et 25 mai 1931 la Workers’ Sport Association (WSA), affiliée au PCC, organise une journée pancanadienne de compétitions sportives nommée le « Spartakiade Day ». Elle se déroule simultanément à Montréal, Toronto, Sudbury et Port Arthur. Sont également prévues des joutes entre des organisations sportives ouvrières canadiennes et américaines.

    National Spartakiade Day must be a day of the mass mobilization of adult and young workers around issue of Workers’ Sport versus Bosses’ Sport. All sport clubs, trade Unions, etc., must be approached and their members rallied for these meets. National Spartakiade Day must be a day for mass demonstration of young workers for Workers Sport Unity[37].

    En quoi ces pratiques culturelles nous intéressent-elles dans le cadre de nos recherches? Contrairement à John Manley, nous estimons qu’il faut analyser ce phénomène plus en profondeur et ne pas le voir strictement comme un exutoire pour les sans-emploi et leurs familles. Bien que les initiatives présentées ne soient pas développées de façon autonome par la classe ouvrière, mais plutôt dans des lieux d’encadrement mis en place par le PCC, de telles manifestations participent néanmoins à la construction de cultures de solidarité et influent sur le développement de la conscience de classe. Elles s’élaborent et se développent en dehors du cadre des institutions de loisirs et de divertissement offertes par les patrons, l’État, les institutions religieuses, etc. Ces manifestations culturelles se produisent sur un terrain qui se situe, du moins partiellement, en opposition à la classe dominante. Elles visent et attirent un public plus large que les seuls membres et sympathisants de l’organisation. Ces lieux de regroupement et de rencontre participent ainsi à certaines formes de socialisation à travers des pratiques culturelles qui tendent à échapper partiellement à la culture dominante. Elles sont par conséquent complémentaires à la lutte politique. Selon Harry Cleaver, un des éléments importants à retenir du Capital de Marx est la dynamique totalisante du capitalisme qui impose sans fin le travail à toutes les sphères de l’activité humaine[38]. Du travail découle l’aliénation. L’aliénation par le travail et l’aliénation des fruits du travail peuvent s’étendre à d’autres sphères sociales qui ne sont pas nécessairement reliées au travail salarié. L’aliénation s’applique aussi à d’autres activités humaines touchant à la reproduction de la force de travail.

    Education is reshaped as schoolwork, preparing and sharing food or taking care of children is reshaped as housework. Athletic activity is reorganised as sport- some waged, some unwaged. Each cluster of activity become work and each kind of work involves alienation[39].

    Harry Cleaver souligne qu’un des slogans des ouvriers luttant pour la journée de huit heures au 19e siècle était « Eight hours of work, eight hours of sleep and eight hours for what we will »[40]. À mesure que la classe ouvrière obtient la réduction du nombre d’heures de travail par jour et la réduction des jours travaillés par semaine, le système capitaliste intervient de plus en plus pour empêcher que le temps libre serve à organiser la lutte, tendant plutôt à orienter l’ensemble des activités hors des lieux de travail en fonction de ses intérêts. À chaque fois que la classe ouvrière réussit à organiser des activités sociales à l’extérieur des cadres imposés et aménagés par le capitalisme, elle fait preuve de résistance et se libère ainsi en partie de l’aliénation[41].

    Une de ces pratiques culturelles ayant attiré notre attention est le recours aux chants lors des rassemblements et des manifestations. En fait, c’est après la lecture d’un extrait de rapport de police où l’agent spécifie que les manifestants s’abstiennent de chanter des chants révolutionnaires, que nous nous sommes intéressés à cette question[42]. Par la suite, la présence de ces chants apparaît autant dans les pages du Worker que dans celles des bulletins de sécurité de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC)[43]. Ils sont parfois spontanés ou, à d’autres occasions, ils sont interprétés par une chorale. Il nous apparaît donc pertinent de questionner la signification de telles pratiques culturelles. Des universitaires tels Serge Denissof, Vincent J. Roscigno et William F. Danaher se sont penchés sur ce sujet[44]. Denissof définit la fonction du chant militant en six points :

    1. the song solicits and arouses outside support or sympathy for a social movement or attitudinal orientation;
    2. the song reinforces the value system of individuals who are a priori supporters of a social movement or ideology;
    3. the song creates cohesion and solidarity in organization or movement supporting the singer’s or composer’s ideological position;
    4. the song attempts to recruit individuals to join a specific social movement;
    5. the song invokes solutions to real or imagined social phenomena in terms of action to achieve a desired goal; and
    6. the song directs attention to some problem, situation or discontent, generally in emotion laden terminology[45].

    Pour Roscigno et Danaher une telle pratique au sein des luttes ouvrières participe au développement de la conscience de classe. Se référant au concept de cultures de solidarité, ils affirment que la musique et le chant permettent une appropriation collective de la lutte et des revendications, ainsi que la création de solidarités.

    Nous constatons qu’entre 1930 et 1935, la classe ouvrière montréalaise est aussi conviée à participer à différentes activités culturelles et sociales initiées par le parti et ses différentes organisations. À l’occasion de la journée internationale des femmes en mars 1930, un encadré du Worker annonce un discours de Beckie Buay suivi d’un concert et d’activités spéciales[46]. En janvier 1932, un article du même journal invite les travailleurs à assister à un concert au Flamingo Hall. La prestation est donnée par un orchestre ouvrier nouvellement formé. On y souligne, « [it] is to be hoped that a large number of workers will take advantage of this opportunity to hear some fine music […]. At the same time, a large assistance will also encourage these worker-players in their important work »[47]. Le parti offre aussi d’autres types de divertissements. Par exemple, il met à la disposition des familles ouvrières un camp de vacances à l’extérieur de Montréal. La publicité se lit ainsi : « ATTENTION MONTREAL! Camp Nitgedieget. The only proletarian camp around Montreal opens June 17. New Improvements. Physical and cultural activities. Rates $11 and $13 per week »[48]. Ces activités et événements ne servent pas exclusivement de lieu pour propager le discours de l’organisation. Ils créent également des lieux de socialisation et de solidarité. Ils servent enfin à financer la défense légale des sans-emploi, comme un bazar organisé par la Ligue canadienne de défense ouvrière (LCDO) les 5, 6 et 7 mai 1932 où la danse est au rendez-vous les trois soirs de l’événement[49].

    Au niveau sportif, la WSA anime entre autres une ligue de soccer ouvrière à Montréal où les membres du PCC sont regroupés au sein de trois équipes (une de la section finlandaise, une de la section hongroise et une dite internationale). Des efforts semblent aussi dirigés vers la création d’une ligue féminine. On retrouve dans cette ligue des noms d’équipes telles que : Workers, Workers Spartak, W.S.A. Juveniles, mais aussi Rosemount, Wolfs et Bluebonnets[50]. Une partie amicale entre les équipes d’étoiles des ligues montréalaise et torontoise du WSA est même organisée le 13 septembre 1931 dans la métropole[51]. La ligue de soccer est toujours active en 1934, alors que le Worker annonce dans les activités à venir : « All organizations and workers are requested to keep Sunday, April 22nd open for the Grand Banquet, to open the football season » au Sylva Hall, situé au 3956 boulevard St-Laurent. Discours, rafraîchissements et animation sont alors au menu de la soirée et le prix d’entrée est fixé à 25 sous[52].

    Chez les francophones, c’est plutôt la balle-molle qui semble avoir la cote. Dans ses mémoires, le militant communiste Henri Gagnon relate comment il entre en contact avec le parti et le mouvement des chômeurs au milieu de la décennie 1930. C’est en participant à une ligue de balle-molle pour sans-emploi qu’il amorce sa politisation.

    Après avoir complété mes années d’apprentissage, je devins électricien durant les années de crise. J’avais une licence C, mais pas de travail. Comme j’avais beaucoup de temps libre, je devins un assidu du parc Lafontaine. Avec d’autres chômeurs, j’ai contribué à former un club de balle molle et, par la suite, une ligue composée de six équipes. La particularité de cette ligue était d’être entièrement composée de chômeurs. Dans le groupe, il y avait un conférencier de l’Association humanitaire de la salle Montcalm, des frères Godin. Il nous invitait à joindre son organisation, pour y compléter des discussions souvent commencées, mais jamais finies. […] C’est au cours de ces années que je connus Jos Duchêne. Mais ce n’est que plusieurs années après, que j’appris que Duchêne était un membre du Parti communiste, des plus militants. Il devint l’un de mes meilleurs camarades. À ma connaissance, il était un militant sur lequel le parti pouvait compter en tout temps[53].

    Un autre témoignage d’un militant de la Jeunesse Communiste confirme le rôle et l’importance des activités sportives chez les Canadiens français.

    On avait un centre sur la rue Sainte-Catherine. On montrait la lutte, la boxe, le ping-pong. On jouait aux cartes, on était connus dans le quartier. C’était surtout des jeunes en chômage qui venaient. […] On a même créé un club de balle-molle et on lui a donné le nom de Clarté, comme le journal. On distribuait le journal pendant les parties et des gens qui supportaient le club de la Fédération criaient : « Allez-y les communistes »[54].

    Quant aux chants, il en est fait mention assez régulièrement lors de différents événements. Par exemple, lors d’un grand rassemblement au Stade De Lorimier le 28 décembre 1935, l’agent de la GRC explique que « Fred Rose then introduced Tim Buck. Tremendous applause followed by the singing of “The International” greeted the introduction »[55]. Autre exemple, la LCDO organise une soirée commémorative en mars 1935 pour les martyrs de la Commune de Paris. La foule est estimée à 1000 individus par la police. L’agent décrit la scène ainsi : « [the] meeting opened with the singing of French revolutionary songs rendered by a group of young men on the stage »[56]. De telles références reviennent aussi dans les pages de l’hebdomadaire du parti. Plus tôt, au moment où se prépare une série de marches de la faim en 1932 devant les assemblées législatives provinciales et la Chambre des Communes à Ottawa, le Worker publie des chansons thématiques, sur des airs connus de l’époque, que l’on encourage à chanter lors des manifestations[57].

    Conclusion

    L’examen du développement de la conscience de classe est complexe. Elle recoupe plusieurs dimensions et fait l’objet de nombreux débats au sein des sciences humaines. Ici, nous voulions démontrer que les loisirs et le divertissement peuvent y jouer un certain rôle. Bien entendu, notre étude est loin d’être exhaustive et vise surtout à proposer certaines pistes de recherche.

    Par son travail au sein du mouvement des sans-emploi, le PCC poursuit ses propres buts et objectifs. Bien entendu, les activités sociales et culturelles sont encadrées par le parti, et ses organisations affiliées, ce qui n’en fait pas, à proprement parler, des lieux où se construit l’autonomie de classe. Néanmoins, les activités proposées s’inscrivent dans le cadre d’un mouvement qui développe des pratiques s’opposant à l’hégémonie libérale et au discours dominant. Ainsi, ces lieux font œuvre de politisation pour une partie de la classe ouvrière et sont complémentaires à la lutte politique. Nos sources, essentiellement utilisées pour comprendre la contribution du PCC au mouvement des sans-emploi, nous limitent donc à une étude partielle de la question et nous empêchent d’étudier le phénomène hors du cadre de la mouvance communiste.

    Notre objectif, en lien avec la thématique du colloque, est de démontrer que l’étude de la formation de classe recouvre des thématiques et des dynamiques beaucoup plus larges que sa simple dimension politique qui est exprimée par les mouvements sociaux. Elle est aussi tributaire du quotidien et des différentes expériences qui y sont vécues. Sans tenir compte de cette dimension, il est difficile de saisir pleinement ce que représente l’expérience de classe telle que définie par l’historien E.P. Thompson.

    Références

    [1] Afin d’enrichir le contenu de cet article, j’ai jugé pertinent de reproduire certains extraits tirés de mon mémoire de maîtrise. Benoit Marsan, « Battez-vous, ne vous laissez pas affamer ! » : la lutte des sans-emploi et le Parti communiste du Canada durant la Grande Dépression à Montréal (1930-1935), Mémoire de maîtrise (histoire), Université de Sherbrooke, 2013, 142 p.

    [2] Les historiens Gregory S. Kealey et Red Whitaker ont édité les bulletins de la Gendarmerie Royale du Canada consacrés à la surveillance des activités subversive au cours de la Grande Dépression. Nous nous sommes entre autres servi de ces sources très riches en information pour cette communication, plus particulièrement les rapports des années 1933 à 1935. Gregory S. Kealey et Red Whitaker, dir., R.C.M.P. Secutity Bulletins: The Depression Years Part I, 1933-1934, St-Jean T.-N., Canadian Committee on Labour History, 1994, 514 p.; Gregory S. Kealey et Red Whitaker, dir., R.C.M.P. Security Bulletins: The Depression Years Part II, 1935, St-Jean T.-N., Canadian Committee on Labour History, 1995, 728 p.; The Worker, Toronto, 1930-1931; National Committee of Unemployed Councils, Building a Mass Unemployed Movement, Toronto, 1933, 32 p.

    [3] E.P. Thompson, The Making of the English Working Class, Londres, Victor Gollancz, 1965 [1963], 848 p.

    [4] Matthias Reiss et Matt Perry, dir., Unemployment and Protest: New Perspectives on Two Centuries of Contention, New York, Oxford University Press, 2011, 438 p.

    [5] Matthias Reiss et Matt Perry, « Beyond Marienthal: Understanding Movements of the Unemployed », dans Matthias Reiss et Matt Perry, dir., Unemployment and Protest, p. 6.

    [6] L’historienne n’aborde cependant pas la lutte des sans-emploi à Montréal. Par contre, ces ménagères sont campées dans le rôle d’actrice de la période, d’où pour nous le principal intérêt de l’ouvrage. Denyse Baillargeon, Ménagères au temps de la crise, Montréal, Éditions du remue-ménage, 1993, 312 p.

    [7] Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain tome II, le Québec depuis 1930, Montréal, Boréal, 1989 [1979], p. 82. John A. Dickinson et Brian Young abordent brièvement la Crise et restent silencieux sur les sans-travail. John A. Dickinson et Brian Young, Brève histoire socio-économique du Québec, Québec, Septentrion, 1992, 382 p. Quant à elle, Nadia Attalah traite de l’impact de la Grande Dépression sur les quartiers ouvriers montréalais, mais décrit uniquement les conséquences sur les conditions de vie de la classe ouvrière. Nadia Attalah, « Les quartiers ouvriers de Montréal pendant la Grande Dépression », Bulletin de l’Institut Pierre Renouvin, no. 27 (2008), http://ipr.univ-paris1.fr/spip.php?article402, consulté le 5 octobre 2010. Paul-André Linteau, dans son histoire de Montréal, se limite à la description des effets du chômage sur les classes populaires montréalaises et des maux dont elles sont victimes (problème de logement, manque de ressources financières et problèmes de santé). Paul-André Linteau, Histoire de Montréal depuis la Confédération, Montréal, Boréal, 2000, p. 283-312.

    [8] Andrée Lévesque, Virage à gauche interdit, les communistes, les socialistes et leurs ennemis au Québec 1929-1939, Montréal, Boréal Express, 1984, 186 p.; Marcel Fournier, Communisme et anticommunisme au Québec 1920-1950, Montréal, Albert Saint-Martin, 1979, 165 p.

    [9] François Bisson, La gestion des chômeurs célibataires sans-abri au cours de la dépression : le cas du camp de Val Cartier, 1932-1936, Mémoire de maîtrise (histoire), Québec, Université du Québec à Montréal, 1999, 195 p.; James Struthers, No Fault of Their Own: Unemployment and the Canadian Welfare State 1914-1941, Toronto, University of Toronto Press, 1983, 268 p.; Terry Copp, « Montreal’s Municipal Government and the Crisis of the 1930s », dans Alan J. Artibise et Gilbert A. Stelter, dir., The Usable Urban Past: Planning and Politics in the Modern Canadian City, Toronto, Macmillan of Canada, 1979, p. 112-129; Mary MacKinnon, « Relief not Insurance: Canadian Unemployment Relief in the 1930s », Explorations in Economic History, vol 21, no. 1 (1990), p. 46-83.

    [10] Pour Clavette, par leurs actions, ils participent à faire pression sur l’État pour l’amélioration des secours. Suzanne Clavette, Des bons aux chèques : aide aux chômeurs et crise des années 1930 à Verdun, Mémoire de maîtrise (histoire), Québec, Université du Québec à Montréal, 1987, 364 p. Selon Larivière, les mesures prises par les autorités publiques pour faire face à la Crise visent avant tout le contrôle social et sont une réponse à la mobilisation de la classe ouvrière. Il reprend ici la thèse de Piven et Cloward. En d’autres termes, la mise en place de l’État-Providence, à travers ses politiques sociales (tel le New Deal aux États-Unis), vise avant tout à sauver le capitalisme, diminuer l’influence des radicaux au sein de la classe ouvrière et endiguer la révolte sociale. Claude Larivière, Crise économique et contrôle social (1929-1937): le cas de Montréal, Montréal, Éditions coopératives Albert St-Martin, 1977, 265 p.; Frances Piven Fox et Richard A. Cloward, Regulating the Poor: the Functions of Public Welfare, New York, Vintage Books, 1972, 389 p.

    [11] Victor Howard, We Were the Salt of the Earth!: A Narrative of the On-to-Ottawa Trek and the Regina Riot, Régina, University of Regina, 1985, 205 p.; Lorne Brown, La lutte des exclus, un combat à refaire, Montréal, Écosociété, 1997, 310 p.; Bill Waiser, All Hell Cant Stop Us: The On-To-Ottawa Trek and Regina Riot, Toronto, Fifth House, 2003, 316 p.

    [12] Lorne Brown, « Unemployed Struggles in Saskatchewan and Canada, 1930-1935 », Prairie Forum, vol. 31, no. 2 (2006), p. 193-216; Gordon Hak, « The Communist and the Unemployed in The Prince George District, 1930-1935 », BC Studies, no. 68 (1985), p. 45-61; Gaétan Héroux et Bryan D. Palmer, « ‘Cracking the Stone’: The Long History of Capitalist Crisis and Toronto’s Dispossessed », Labour/Le Travail, no. 69 (2012), p. 9-62; Carmela Patrias, Relief Strike: Immigrant Workers and The Great Depression in Crowland, Ontario, 1930-1935, Toronto, New Hogtown Press, 1990, 54 p.; John Manley, « ‘Starve, Be Damned!’ Communists and Canada’s Urban Unemployed, 1929-1939 », The Canadian Historical Review, vol. 79, no. 3 (1998), p. 466-491.

    [13] Lorne Brown, « Unemployed. Struggles », p. 200.

    [14] John Manley, « Moscow Rules? ‘Red’ Unionism and ‘Class Against Class’ in Britain, Canada and the United States, 1928-1935 », Labour/Le Travail, Vol. 56 (automne 2005), p. 47.

    [15] Ibid.

    [16] John Manley, « ‘Starve, Be Damned!’», p. 466-491.

    [17] Dans les pages du journal The Worker, l’hebdomadaire du PCC, il est possible de retrouver dans presque chaque numéro une publicité faisant la promotion de ce type d’événements, majoritairement pour les villes de Montréal et de Toronto. The Worker, Toronto, 1930-1931.

    [18] E.P. Thompson, The Making of the English Working Class, p. 9-11.

    [19] Ibid., p. 10.

    [20] Ibid., p. 11.

    [21] Bryan D. Palmer, « Historical Materialism and the Writing of Canadian History: A Dialectical View », Journal of the Canadian Historical Association / Revue de la Société historique du Canada, Vol. 17, no. 2, 2006, p. 58.

    [22] E.P. Thompson, The Making of the English Working Class, p. 10.

    [23] Kelvin Knight, « Agency and Ethics, Past and Present », Historical Materialism, vol. 19, no. 1 (2011), p. 145-146.

    [24] Harvey J. Kaye, The Education of Desire: Marxists and the Writing of History, New York, Routledge, 1992, p. 10. Ceci revient au principe énoncé par Marx dans les Statuts de l’Association Internationale des Travailleurs, à savoir que l’émancipation de la classe ouvrière sera l’œuvre de la classe ouvrière. Karl Marx, Statuts de l’Association Internationale des Travailleurs, 1864, [en ligne], http://www.marxists.org/francais/marx/works/1864/00/18640000.htm, consulté le 12 juin 2011. C’est aussi ce qui anime en partie l’esprit du Manifeste selon Kaye. Harvey J. Kaye, The Education of Desire, p. 10.; Karl Marx et Frederich Engels, Le manifeste du parti communiste, 1847, [en ligne], http://www.marxists.org/francais/marx/works/1847/00/kmfe18470000.htm, consulté le 4 avril 2011.

    [25] Bryan D. Palmer, « Reasoning Rebellion: E. P. Thompson, British Marxist Historians, and the Making of Dissident Political Mobilization », Labour/Le Travail, vol. 50 (2002), p. 187-216.

    [26] Harvey J. Kaye, The Education of Desire, 11-12 p. Kaye fait remarquer que l’interprétation marxiste de la conscience, héritée de Lénine et propagée par les tenants du « socialisme réellement existant », a occulté d’autres visions et interprétations du même concept chez d’autres auteurs marxistes contemporains de Lénine. Il donne notamment comme exemple Antonio Gramsci et Rosa Luxembourg. « The Leninist conception of class formation (in the full sense) was furthered by – at the same time that it provided much of the theoretical legitimation for – Communist Party orthodoxy and Soviet authoritarism ». Harvey J. Kaye, The Education of Desire, 11-12 p.

    [27] Rick Fantasia, Cultures of Solidarity: Consciousness, Action, and Contemporary American Workers, Berkeley, University of California Press, 1988, p. 6; Rick Fantasia, « From Class Consciousness to Culture, Action and Social Organization », Annual Review of Sociology, vol. 21, no. 1 (1995), p. 269-287.

    [28] Rick Fantasia, Cultures of Solidarity, p. 8-9.

    [29] Ibid., p. 9-11.

    [30] Ibid., p. 11.

    [31] Ibid., p. 17.

    [32] Fantasia donne l’exemple d’événements culturels ou de divertissement (piqueniques, concerts, danses, etc.), mais aussi de manifestations, de piquets de grève, de diffusion de propagande, d’auto-organisation, de confrontation avec la police et le système judiciaire, etc. Ibid., 304 p.

    [33] Ibid., p. 217.

    [34] Ibid., p. 27.

    [35] John Manley, « ‘Starve, Be Damned!’», p. 466-491.

    [36] « R.C.M.P. Security Bulletin », no. 784 (4 décembre 1935), dans Gregory S. Kealey et Red Whitaker, dir., R.C.M.P. Security Bulletins: The Depression Years Part II, 1935, p. 620.

    [37] « Prepare National Spartakiade Day », The Worker, vol. 8, no. 436, 11 avril 1931, p. 3.

    [38] Harry Cleaver, « Forword: Sports? », dans Ben Carrington et Ian McDonald, dir., Marxism, Cultural Studies and Sport, New York, Routledge, 2009, p. xxvi-xxvii.

    [39] Ibid., p. xxvii.

    [40] Ibid., p. xxx.

    [41] Ibid., p. xxix-xxxi. Pour illustrer son propos, Cleaver donne l’exemple des sit-downs utilisés durant la Grande Dépression dans l’industrie du caoutchouc à Akron aux États-Unis. Selon un commentateur de l’époque, ce moyen de lutte tire son origine d’une partie de baseball entre les ouvriers de deux usines. Ces derniers s’assoient sur le terrain et refusent de jouer pour protester contre la présence d’un arbitre non syndiqué. « The method was soon carried by the workers into their factories. Clearly not only was playing baseball helping those workers survive their obnoxious, unregulated conditions of work but it sparked an idea of struggle that swept through and beyond the US labour movement to become a worldwide tactic on all kinds of terrain ». Ibid., p. xxxii.

    [42] Voici l’extrait en question : « Approximately 100 people attended a farewell demonstration at Moreau Station, Montreal, Que., on 6th September, when the five arrested in Montreal last May on charges of “sedition” left for Amos to stand trial. A large number of Constables were on duty but there was no singing of revolutionary songs ». « R.C.M.P. Security Bulletin », no. 773 (18 septembre 1935), dans Gregory S. Kealey et Red Whitaker, dir., R.C.M.P. Security Bulletins: The Depression Years Part II, 1935, p. 496.

    [43] Par exemple, au cours de l’année 1934, The Worker publie une rubrique intitulée « Sing as You Fight » où sont reproduits les différents classiques des chants révolutionnaires ou du mouvement ouvrier. On y retrouve aussi des adaptations de chansons sur des airs connus à l’occasion de certaines campagnes politiques ou manifestations.

    [44] Serge Denisoff, « Protest Movements: Class Consciousness and the Propaganda Song », Sociological Quaterly, vol. 9, no. 2 (1968), p. 228-247; Vincent J. Roscigno et William F. Danaher, « Media and Mobilization: The Case of Radio and Southern Textile Worker Insurgency, 1929 to 1934 », American Sociological Review, vol. 68 (2001), p. 21-48.

    [45] Serge Denisoff, « Protest Movements », p. 229-230.

    [46] The Worker, vol. 7, no. 381, 1 mars 1930, p. 4.

    [47] « Form Workers’ Orchestra », The Worker, vol. 10, no. 476, 23 janvier 1932, p. 4.

    [48] The Worker, vol. 11, no. 493, 21 mai 1932, p. 2.

    [49] « Montreal CLDL Plans Defense BAZAAR », The Worker, vol. 11, no. 488, 16 avril 1932, p. 3.

    [50] S.S., « Montreal Workers Sports Developing Its Activities », The Worker, vol. 11, no. 495, 4 juin 1932, p. 3.

    [51] « Soccer Rally in Montreal », The Worker, vol. 8, no. 457, 12 septembre 1931, p. 4.

    [52] « Coming Events », The Worker, vol. 12, no. 592, 14 avril 1934, p. 2.

    [53] Henri Gagnon, Les militants socialistes du Québec : d’une époque à l’autre, St-Lambert, Héritage, 1985, p. 51.

    [54] Marcel Fournier, « À la défense des intérêts immédiats : les années trente », dans Robert Comeau et Bernard Dionne, dir., Le Droit de se taire. Histoire des communistes au Québec, de la Première Guerre mondiale à la Révolution tranquille, Outremont, VLB, 1989, p. 74.

    [55] « R.C.M.P. Security Bulletin », no. 739 (9 janvier 1935), dans Gregory S. Kealey et Red Whitaker, dir., R.C.M.P. Security Bulletins: The Depression Years Part II, 1935, p. 24.

    [56] « R.C.M.P. Security Bulletin », no. 750 (27 mars 1935), dans Gregory S. Kealey et Red Whitaker, dir., R.C.M.P. Security Bulletins: The Depression Years Part II, 1935, p. 197.

    [57] A. Nesbitt, « The Crusade for Work », The Worker, vol. 10, no. 478, 6 février 1932, p. 4; M.G., « Hunger March Song », The Worker, vol. 10, no. 480, 20 février 1932, p. 4.