L’ingénieur civil des mines de Saint-Étienne et les réseaux d’ingénieurs : organisation, esprit de corps et affirmation d’une identité industrielle (1816-1920)

LUC ROJAS
Université de Lyon- Université de Saint-Étienne

 

 

Table des matières
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    Les études publiées au sujet des ingénieurs, depuis la fin des années 1970, privilégient généralement l’approche par la formation de ces acteurs. Les Anglo-saxons, notamment Terry Shinn[1], J. H. Weiss[2] ou encore Charles R. Day[3], contribuent largement à ce mouvement. Quelques années plus tard, les travaux d’Antoine Picon[4] renouvèlent l’historiographie mettant en lumière le rôle prééminent du réseau saint-simonien. Il est vrai que cette doctrine a rencontré un large écho dans le monde des ingénieurs, faisant ainsi de nombreux adeptes au sein de cette profession, comme Ferdinand de Lesseps, constructeur des canaux de Suez et de Panama. La contribution de Georges Ribeill[5] parue en 2011 sur les centraliens offre un regard nouveau. Ribeill analyse, en effet, la sociabilité des ingénieurs issus de l’École Centrale et démontre que celle-ci s’insère dans une stratégie défensive, puis offensive, des centraliens contre les ingénieurs d’État afin de faire valoir le titre d’ingénieur civil et de s’inscrire activement dans le développement industriel de la France de cette époque. Georges Ribeill met également l’accent sur la mise en place d’organisations corporatives comme l’association des anciens élèves afin de promouvoir leur titre et de consolider l’entraide professionnelle et sociale. Si l’ouvrage d’Anne-Françoise Garçon[6] sur l’École des Mines de Saint-Étienne n’est pas spécifiquement dédié aux réseaux sécrétés par cet établissement, mais à l’évolution de l’école et de son enseignement, il nous apporte cependant de nombreuses informations sur les entités composant ce réseau. Au détour de ce travail, nous découvrons, en effet, l’impact de la Société amicale des anciens élèves ainsi que l’importance de la Société de l’industrie minérale. En 1986, dans sa contribution à la Revue française de sociologie, Georges Ribeill étudie les associations d’anciens élèves, nous offrant ainsi l’analyse d’une composante essentielle de ces réseaux[7]. Si ce texte est très intéressant, il convient néanmoins de remarquer qu’il ne mène pas une prospective sur l’ensemble des associations d’anciens mais sur six sociétés[8]. Toutefois, la recherche en question démontre les rôles et les missions de ces institutions, ce qui constitue aussi un moyen d’affirmer un statut social pour l’ingénieur, ainsi que l’expression d’une identité collective. Si Ribeill décrit également ces associations comme un procédé de sociabilité, il ne traite que peu des mécanismes qui permettent le fonctionnement du réseau. Deux ans auparavant, Charles R. Day publie un texte qui traite du développement des écoles d’Arts et Métiers et le rôle des anciens élèves[9]. Au sein de cette contribution, l’auteur présente les anciens comme un groupe de pression qui cherche à faire avancer le niveau des études, à promouvoir auprès du grand public le rôle des écoles et à garantir la tradition des « gadzarts ». Bruno Jacomy, dans son travail sur la Société des ingénieurs civils[10], nous offre l’étude d’un autre pan de ces réseaux. Il décrit plus particulièrement les missions que s’assigne cette société. Il insiste notamment sur la lutte menée par l’association et ses membres afin d’établir une différenciation nette entre ingénieurs civils et ingénieurs d’État. Nous sommes ici au cœur d’une préoccupation centrale pour ces réseaux : la reconnaissance professionnelle et sociale du diplôme d’ingénieur. Malgré ces études de grande qualité, force est de constater que ce sont toujours les mêmes structures, à l’image de l’École Centrale ou de Polytechnique, qui bénéficient de ces analyses. À l’instar des associations d’anciens élèves, il n’est également jamais question d’étudier un réseau dans son intégralité, mais en tant que simple composante.

    Si la présente contribution se limite qu’à un seul cas d’étude, elle a l’avantage de bénéficier de sources archivistiques[11] très complètes. Malgré la forme monographique, le texte suivant est motivé par de multiples ambitions. Nous désirons, tout d’abord, réaliser l’étude d’un réseau d’ingénieurs en insistant notamment sur les mécanismes qui permettent le fonctionnement de cette organisation informelle, une démarche qui, à notre connaissance certes relative, n’a été que rarement mise en œuvre. Le second enjeu de notre travail consiste à établir les missions que s’assigne cette association. Il n’est évidemment pas question d’en rester au simple stade de l’énumération mais d’en exposer également les portées. Ainsi, notre regard se posera sur la solidarité des membres à l’intérieur des différentes organisations et sur l’identité professionnelle et sociale des ingénieurs stéphanois. L’objectif poursuivi consiste donc à mettre en lumière les spécificités du réseau de l’École des Mines de Saint-Étienne et également les points communs avec les autres organisations d’ingénieurs déjà étudiées par l’historiographie. Le dernier axe de réflexion de notre recherche tentera de comprendre quelle figure sociétale de l’ingénieur tente de promouvoir le réseau stéphanois. Quelle image de l’ingénieur est ici mise en avant ?

    L’École des Mines de Saint-Étienne est fondée en 1816 par la volonté de l’État français désireux de fournir à son industrie minière et métallurgique naissante les techniciens nécessaires à son développement. Il n’est pas question de former des ingénieurs civils, mais plutôt de maître mineur; l’institution ne décerne donc pas le titre d’ingénieur, mais d’élève breveté. Cependant, pour reprendre la formule de Louis-Joseph Gras[12], le titre est rapidement éludé et la chose est consacrée, ce qui fait de l’école stéphanoise la première structure française à former des « ingénieurs civils » avant l’École Centrale en 1829. Malgré une formation de haut niveau d’où sont issus de brillants élèves comme Benoît Fourneyron, inventeur de la turbine hydraulique, l’école doit attendre plusieurs décennies avant de pouvoir délivrer officiellement le titre d’ingénieur civil[13].

    Un esprit de corps naît au sein des premières promotions qui ambitionnent de créer, dès 1826, un premier regroupement en publiant une correspondance[14]. Si cette tentative échoue, une nouvelle démarche est entreprise dix ans plus tard par les élèves afin de constituer un « Cercle de l’École des Mineurs de Saint-Étienne ». Les objectifs de cette association sont décrits ainsi :

    Notre but étant d’établir un esprit de corps, qui par la suite établissant des ramifications avec les élèves sortant versé dans l’industrie est entièrement basé sur l’utilité qui peut en résulter pour notre avenir[15].

    La direction de l’école refuse de créer l’association, sous prétexte que le cercle est une occasion permanente de négliger les études et de dépenser beaucoup d’argent et que, dans certaines situations politiques, il pourrait devenir une cause de troubles[16]. Malgré ce refus, dès 1837, les élèves éditent une correspondance[17]. Les articles de cette publication répondent à la nécessité d’échanges techniques et scientifiques au sein d’un métier d’ingénieur civil récent et en pleine expansion. Cependant, la Correspondance ne peut demeurer, pour ses membres, une simple publication scientifique et technique : elle doit avoir un but réel d’utilité pour les élèves. Bouchard, lors de la seconde assemblée générale de l’année 1844, milite pour une association qui offrirait aide et protection à tous ses membres. Cette proposition est très bien accueillie, le conseil d’administration traduisant ainsi la doléance :

    Le conseil d’administration s’occupera de placer les élèves. À cet effet, il se mettra en rapport avec les propriétaires de mines, d’usines et constructeurs, en leur adressant, avec un des prochains numéros, une circulaire, et en insérant dans chaque bulletin deux avis, l’un pour les usiniers, et l’autre pour les élèves[18].

    Si le cercle des élèves ne voit pas le jour et que la Correspondance s’arrête en 1847, ces initiatives constituent pourtant les prémices d’un réseau qui se développera à partir des années 1855. Néanmoins, il convient de remarquer que ces actions sont celles des élèves, alors que le réseau qui naît dans la seconde partie du siècle est l’œuvre d’anciens élèves. Ceux-ci, contrairement à leurs prédécesseurs, jouissent d’une liberté d’action qui les dégage de la tutelle de l’école et de positions affirmées dans le monde industriel.

    Loin de l’image simplificatrice qui fait d’un réseau la réunion d’un agrégat de « relations », la présente étude démontre la complexité de l’organisation. L’esprit d’association ayant une influence importante dans le monde des ingénieurs, nous débuterons notre analyse par l’étude de la communauté scientifique qui anime ce réseau; puis, nous nous attacherons au rôle social, pour terminer notre propos par la représentation de l’ingénieur véhiculé par cette organisation informelle.

    Former une communauté scientifique et technique : la Société de l’industrie minérale

    Si le réseau de l’École des Mines de Saint-Étienne s’exprime à travers plusieurs associations, il s’agit d’abord un regroupement d’ordre scientifique en 1854, qui amène les anciens élèves à se grouper et à s’affirmer.

    S’arroger un domaine industriel : fondation et but de la Société de l’industrie minérale

    Le 4 février 1854, une réunion a lieu dans une salle de l’École des Mineurs de Saint-Étienne et réunit vingt-deux personnes, tous d’anciens élèves à l’exception de Louis-Emmanuel Grüner, ingénieur d’État et directeur de l’école. Cette assemblée décide de la formation d’une société d’ingénieurs et d’industriels qui ait pour motivation principale la publication périodique d’un recueil industriel qui concerne l’art des mines et de la métallurgie[19]. Le 5 mai 1855, lors de la première séance du conseil d’administration, Grüner met à la disposition de la société un local au sein de l’école[20]. L’ensemble des membres du conseil d’administration, à l’exception du président qui est par défaut le directeur de l’école, sont tous des anciens élèves. Ainsi le premier conseil de l’histoire de la société est composé d’ingénieurs de mine, de forge et de construction mécanique qui ont été formés au sein de l’établissement stéphanois[21].

    Le Bulletin de la société de l’industrie minérale est l’expression matérielle de l’existence de la société. Michel Cotte nous fait remarquer que le processus est, depuis la Restauration, assez classique, le bulletin périodique constituant un outil privilégié au cœur du système de diffusion de l’information technique et industrielle[22]. Dans son propos introductif du premier tome du Bulletin, Grüner insiste sur l’esprit d’association qui doit guider la publication et la société :

    En toutes choses, on le sait, l’isolement favorise la routine et le découragement, tandis que le contact développe, parmi les hommes, l’émulation et le progrès. Si les arts industriels ont fait un pas immense, dans le cours des vingt-cinq dernières années, à quoi doit-on l’attribuer, au moins en grande partie, sinon à l’application, sur une large échelle, du principe si fécond de l’association[23]?

    Cette allocution fait référence au contexte dans lequel la société a vu le jour. En 1854 l’Empereur Napoléon III fractionne, en quatre grandes compagnies, le trust houiller qui s’était emparé de l’ensemble du terrain houiller stéphanois au fil des circonstances, en qui entraîne alors la plus grande dépression charbonnière de France[24]. Nombre d’ingénieurs et de techniciens au service de cette entreprise déplorent cet éclatement qui, selon eux, met fin au progrès technique engendré par le regroupement de toutes les concessions. Ainsi, la création de la Société de l’industrie minérale peut être vue comme une réponse des ingénieurs à ce fractionnement, puisque l’association maintient des contacts scientifiques entre les différents ingénieurs qui exploitent le terrain houiller stéphanois.

    À travers le discours de Grüner, les buts et les préoccupations de la société se dessinent rapidement. Ainsi, la création d’une communauté d’ingénieurs soucieux du progrès des industries minières, métallurgiques et mécaniques apparaît comme le but premier de l’association[25]. Si l’on retrouve ici l’esprit d’association cher aux saint-simoniens, les propos du premier président de la société vont plus loin et décrivent la constitution d’une équipe de recherche et de sa méthode de travail :

    Très souvent l’ingénieur isolé néglige l’étude de questions fort importantes, ou ne saurait s’y livrer, malgré son désir, parce qu’il ignore ce qui a été fait par d’autres, dans des circonstances analogues, et que les termes de comparaison lui manquent. Eh bien ! ce qu’un ingénieur, abandonné à ses propres forces, ne saurait entreprendre, l’association peut accomplir par un échange raisonné de communications mutuelles. Pour atteindre ce but, les membres de la Société pourront être invités, tantôt à recueillir des renseignements précis sur certaines questions d’intérêt général, tantôt à diriger leurs observations sur tel appareil spécial ou telle méthode nouvelle d’exploitation, le plus souvent à transmettre simplement au conseil d’administration les documents détaillés que chacun des membres est appelé à puiser dans sa propre pratique de l’art des mines ou de la métallurgie. Ces diverses notes, mises en ordre et comparées avec soin, pourront être consultées utilement par tous, et auront, de plus, nous l’espérons du moins, l’avantage précieux de provoquer fréquemment l’esprit de recherches et d’activités là où auparavant régnaient la routine et l’apathie[26].

    Ainsi, c’est l’art des ingénieurs civils de l’industrie minérale qui est mis en avant et qui doit progresser à travers ces recherches. La communauté scientifique qui se crée autour du Bulletin est notamment fondée sur les spécialités des ingénieurs formés au sein de l’École des Mineurs de Saint-Étienne : exploitation des mines, métallurgie et construction mécanique. Malgré ce caractère très affirmé, la Société de l’industrie minérale s’inspire également d’autres d’associations : Grüner fait référence à la pratique de certains districts miniers anglais, comme le Cornwall, qui publie tous les mois les résultats économiques des machines d’épuisement[27]. Le conseil d’administration calque le Bulletin sur le format des Annales des Mines[28] et Lan prône, avec succès, l’institution des comités de districts au début des années 1860 en s’inspirant directement du modèle de la Société des ingénieurs civils[29]. Malgré cette influence extérieure et la volonté de créer une communauté scientifique ouverte, la Société de l’industrie minérale conserve à travers ses pratiques des liens structurants avec l’École des mineurs de Saint-Étienne.

    Maintenir et développer une identité

    La Société de l’industrie minérale est, au regard de ses statuts, une association très ouverte : elle accepte des membres en nombre illimité, qu’ils soient français ou étrangers. Les sociétés industrielles et commerciales sont également admises[30]. Rapidement, le nombre d’adhérents est significatif : on compte, dès 1875, huit cents membres répartis dans les différents districts français et étrangers de l’association[31]. L’importance de la société croît au fil du temps, faisant de celle-ci, d’après une note du conseil d’administration en date du 25 novembre 1931, la plus importante en nombre des associations de techniciens après la Société des Ingénieurs civils[32].

    La « Minérale » participe à l’édification d’une communauté européenne des ingénieurs à travers son apport scientifique. Ainsi, de nombreuses collaborations naissent au fil des décennies. En 1859, quatre ans après sa fondation, l’association reçoit régulièrement des revues d’autres sociétés d’ingénieurs, comme le Journal de l’inventeur. Le conseil d’administration entreprend des démarches auprès de certaines associations, comme la Société d’encouragement, pour que celle-ci envoie son bulletin[33]. Il est question d’échanges réguliers de revue entre les associations pour permettre une véritable communauté scientifique qui dépasse largement les frontières nationales. Le procès-verbal du conseil d’administration du 28 février 1895 remarque que les demandes d’échanges arrivent de toute l’Europe. Ce mouvement n’est pas un fait nouveau ; dès 1864, le président du conseil d’administration fait :

    […] part d’une demande en échange, qui lui a été adressée par l’association des ingénieurs allemands du journal de l’association des ingénieurs allemands contre le Bulletin de la société de l’industrie minérale ; cet échange est voté[34].

    Rapidement, cette collaboration scientifique devient européenne, voire mondiale. En 1890, la revue anglaise The colliery engineers demande l’échange avec le Bulletin; cinq ans plus tard, la Société Belge de géologie suit l’exemple britannique. Parfois, ces sollicitations viennent de loin, à l’instar de la requête du 20 novembre 1900 de la Royal Society of New Wales, établie à Sydney[35]. Les échanges se comptent par dizaines, ce qui démontre la place prise par la Société de l’industrie minérale dans le monde des ingénieurs. La « Minérale » compte à tel point dans cet univers minier et métallurgique que la très sérieuse revue anglaise Colliery Guardian demande, en 1906, le soutien de la société dans l’organisation d’une réunion internationale d’ingénieurs :

    Le journal Colliery Guardian chargé d’organiser au mois de juin 1906 une réunion internationale d’ingénieurs à Londres demande les encouragements de la S en vue de ce projet. Le conseil décide de répondre favorablement et d’insérer dans les publications de la société les circulaires qui pourront être préparées pour convoquer nos collègues à cette réunion[36].

    Le Bulletin de l’industrie minérale fait régulièrement état des publications des autres sociétés en rédigeant des comptes-rendus de lecture insérés dans ses propres pages. Si cette pratique est initiée à la fin des années 1850, elle devient systématique et quantitativement très importante en 1900, lorsque la société engage Verney, ancien ingénieur des Houillères de Saint-Étienne, comme adjoint attaché au secrétariat. Il est notamment chargé de recenser et de résumer les publications étrangères qui seront insérées dans le Bulletin[37].

    Malgré cette volonté d’intégrer et de former une communauté européenne des ingénieurs, la Société de l’industrie minérale reste très attachée à ses champs d’études, tous issus des préoccupations de l’École des Mines de Saint-Étienne. Dès sa fondation, la « Minérale » met en place trois commissions qui correspondent aux préoccupations scientifiques de l’association : mine, métallurgie et construction mécanique. L’objectif de ces commissions est d’orienter la recherche dans chacune des trois industries, notamment grâce au système du concours. Ainsi, les questions mises au concours sont votées en assemblée générale et sont habituellement au nombre de trois ou quatre, à l’instar du premier concours, datant de 1856 et comportant quatre questions[38].

    Si le concours est un moyen d’alimenter le bulletin, il représente également un moment de reconnaissance pour les ingénieurs qui ont fourni des textes de qualité. Le conseil d’administration mentionne dès le 26 juin 1855 que dans certains cas, des prix pourront être distribués aux auteurs qui ont résolu des questions importantes mises au concours[39]. Parallèlement, des congrès sont organisés de manière régulière, au sein desquels se succèdent des conférences et des visites d’entreprises. Il s’agit d’un moment propice pour réunir les membres de la société, notamment les adhérents qui appartiennent aux districts éloignés de Saint-Étienne. Ces congrès donnent bien souvent lieu à publication : une partie compose le Bulletin de la société de l’industrie minérale et une autre intègre les Comptes-rendus des réunions de la Société de l’industrie minérale[40].

    L’identité de l’association et des ingénieurs qui la composent ne s’affirme pas uniquement au sein des champs d’études et des publications. Elle est également présente lors de la demande d’adhésion. En effet, l’article 5 du règlement administratif de la société met en avant le principe de cooptation :

    Pour faire partie de la société, il faut avoir été admis par le Conseil d’administration, sur la présentation de deux sociétaires. Ces sociétaires devront fournir sur la personne présentée les renseignements qui pourront être demandés par le conseil[41].

    Il n’est donc pas question d’ouvrir la société à tous, sans aucun contrôle. Le conseil d’administration garde le pouvoir de refuser une adhésion, une situation tout de même rare, car la majorité des candidats sont issus de l’École des Mines de Saint-Étienne. Dès ses premières années d’existence, la conservation de l’identité de la société est centrale. Il n’est pas question de couper le lien existant entre les ingénieurs qui composent majoritairement l’association et leur lieu de formation. La moindre initiative qui pourrait menacer l’identité de la « Minérale » est rejetée par le conseil d’administration. Ainsi, dès 1855, la société refuse une offre de fusion émise par le directeur de L’écho de la métallurgie[42]. Toutes les offres de fusion sont refusées, même celle du prestigieux Journal des mines qui propose en 1857[43] de fusionner sa publication avec le Bulletin est éconduite. La Société de l’industrie minérale demeure un outil qui permet au réseau de créer et de maintenir une identité professionnelle fondée, en premier lieu, sur la compétence scientifique. N’oublions pas que l’établissement stéphanois ne délivre pas avant les années 1890 le titre d’ingénieur, mais d’élève breveté. C’est donc à travers le sérieux du bulletin et de ses articles que les Stéphanois acquièrent la crédibilité scientifique et professionnelle nécessaire à tout ingénieur. L’image de la publication doit donc rester clairement identifiable et associée à l’École des Mineurs de Saint-Étienne.

    Si la communauté scientifique qui s’agrège autour de la Société de l’industrie minérale est fortement marquée par le sceau de l’École des Mineurs de Saint-Étienne, elle ne constitue que le premier pan de ce réseau qui se voit complété à la fin des années 1860 par une seconde association.

    Créer une solidarité de corps : la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne

    L’apparition du métier d’ingénieur d’industrie n’est pas uniquement synonyme de réussite économique. Dans cette seconde moitié du XIXe siècle, l’ensemble des difficultés pour obtenir un poste constitue une lourde réalité qui explique ainsi l’apparition de société d’anciens élèves ayant pour objectif de faciliter l’intégration des nouveaux ingénieurs sur le marché du travail. En 1868, la conjoncture pousse en partie à l’édification de la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne.

    Donner naissance à une famille pour lutter contre l’adversité

    Ils ont voulu établir entre les anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne une association dont l’objet est de resserrer entre eux les liens de confraternité et qui doit trouver une sanction pratique d’une part dans les efforts faits pour procurer à ses membres momentanément déplacés une position dans l’industrie et d’autre part dans l’appui qu’elle compte donner à ceux qui seront atteints par l’adversité[44].

    Tels sont les propos que tient le président Janicot à propos des fondateurs de la Société amicale, lors de la première assemblée générale le 31 mai 1868. L’objectif est sans ambigüité : fournir aux ingénieurs issus de l’école un emploi dans l’industrie. Cette lutte contre le chômage prend des accents corporatistes, voire claniques, dans les discours de plusieurs responsables de l’amicale, qui n’hésitent pas à comparer les ingénieurs issus de l’école à une famille. Ainsi, Luyton déclare lors de l’assemblée générale du 29 mai 1870 :

    Notre but, chers camarades, a été de réunir dans une même famille, tous les élèves sortis de l’École de Saint-Étienne sans distinction d’âge, ni de position, et d’établir ou de conserver, dans cette grande famille, des liens d’amitié et de solidarité qui nous permettent de nous aider dans les difficultés de notre carrière, et si, au milieu de la tourmente de la vie, quelques-uns de nous succombent, de leur tendre une main de frère et d’ami[45].

    La principale préoccupation de la société amicale lors de ses premières années est de faire adhérer tous les anciens élèves. En 1868, Janicot calcule que, depuis 1819, date de fin d’études de la première promotion de l’école, six cents cinquante élèves sont sortis brevetés. Devant un tel constat, l’ambition de l’assemblée générale est de porter à cinq cents le nombre de ses membres. Si le pari n’est pas tenu, la société compte tout de même, en 1875, trois cents trente-et-un adhérents. Cependant, ce chiffre ne semble pas satisfaire les responsables de l’association. Félix Devillaine, alors vice-président, déclare vouloir augmenter chaque année le nombre d’adhésions au moins d’un nombre égal à celui des élèves qui sortent de l’école, car, dit-il, nos jeunes camarades doivent déjà savoir que notre société s’occupe avec sollicitude et succès de leur placement et de leur avancement[46]. La Société amicale connaît, à l’instar des autres associations d’anciens élèves, un taux d’adhésion très élevé à la veille de la Grande Guerre[47].

    Au fil du temps, « la famille des anciens élèves » se structure sécrétant des « cellules familiales » un peu partout en France et dans le monde. En 1888, les membres de la société amicale résidant dans le Nord Pas-de-Calais proposent la création de comités de districts avec des réunions mensuelles[48]. Le conseil d’administration leur donne satisfaction, instituant ainsi des districts d’anciens élèves qui, les années suivantes, fleurissent dans le Nord, le Gard, l’Est, à Paris, en Tunisie, en Russie…

    Ce sont les membres les plus influents de la « famille » qui sont censés aider les ingénieurs en difficulté. Bien entendu, les placements s’effectuent en très grande majorité dans l’industrie minérale, domaine de prédilection de l’école. Les ingénieurs déjà en situation occupent une part importante des postes dans ces industries. Ainsi, en 1929, on estime que 53% des ingénieurs français qui travaillent dans les houillères sont issus de l’École des Mines de Saint-Étienne et qu’un tiers des directeurs et ingénieurs en chef des usines métallurgiques sortent de ce même établissement[49]. Les parcours professionnels des anciens élèves sont assez proches, qu’ils soient ou non placés par la société amicale. Généralement, ils débutent leur carrière d’ingénieur par l’exploitation des mines ou la métallurgie comme ingénieur de fosse ou ingénieur sous-chef de service. Même ceux qui s’orientent vers d’autres industries (construction, électricité, travaux publics…) commencent leur cursus dans l’industrie minérale. Quant à ceux restés fidèles au « monde minéral » ils terminent souvent leur parcours comme ingénieur en chef, directeur ou directeur général de grandes entreprises[50]. À travers cette volonté d’aider et de protéger les détenteurs du diplôme d’élève breveté, puis d’ingénieur à partir des années 1890, l’association valorise également ce même diplôme. Elle joue le rôle de syndicat de défense et de promotion des droits et avantages que vaut la possession de ce titre sur le marché du travail, par le biais notamment de sa politique de placement.

    Le débat sur la constitution d’une caisse de retraite, qui anime la société amicale à partir des années 1880, est représentatif de la solidarité du réseau. Depuis ces années, l’idée de l’association de fonder une caisse de retraite mutualiste destinée aux ingénieurs issus de l’École des Mines de Saint-Étienne est présente. Cette pensée est bien perçue par l’ensemble des membres. Malgré les multiples études commandées par le conseil d’administration, notamment en 1892, qui démontrent l’impossibilité de financer cette caisse par les seuls moyens de la société amicale, les adhérents s’accrochent à cette idée[51]. Si l’ingénieur Jardel réactive ce débat en 1911, faisant perdurer cette idée de solidarité entre les générations au sein de l’association, le problème du financement condamne définitivement l’initiative[52]. Néanmoins, cette attitude est révélatrice de la volonté de l’association de répondre aux carences de la protection sociale. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir ce type de société fonctionner comme une mutuelle de secours.

    La famille des ingénieurs issus de l’École des Mines de Saint-Étienne est loin d’en rester à un vœu pieux. La société amicale des anciens élèves édifie un véritable système destiné à placer les élèves sans emploi et à maintenir une solidarité entre ses membres.

    Créer et maintenir une solidarité au sein du réseau

    Si l’action de la société amicale pour placer les ingénieurs sans emploi se montre rapidement efficace, elle prend à la fin du XIXe siècle un tournant décisif en se dotant de puissants outils. L’année 1897 est marquée par la première publication de la Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines. Il s’agit d’un livret interne à la société, qui parait tous les deux mois et qui est envoyé aux adhérents par courrier. Ce périodique constitue un lien entre les anciens élèves et matérialise leur appartenance au réseau. Au sein de ces quelques pages bimensuelles, il est possible de trouver les changements d’adresse des membres de la société, des nécrologies, des comptes-rendus sur les évènements mondains tels que les distinctions honorifiques, le recensement des nouveaux membres fraîchement diplômés, des résumés des procès-verbaux des séances du conseil d’administration et du conseil de perfectionnement de l’école[53]. Toutefois, l’intérêt majeur de ces feuilles réside dans l’opportunité offerte aux ingénieurs qui recherchent un poste. En effet, on trouve régulièrement des propositions d’emploi qui sont généralement transmises par les membres de l’association. À l’instar de la circulaire de janvier-février 1898, les annonces sont assez précises et fournissent un contact, généralement un ancien élève de l’école : Un ingénieur pour une affaire de phosphates en Algérie, s’adresser à M. Monmert, 14, île Saint-Germain à Amiens[54].

    Dans ce processus, le secrétariat joue un rôle central en servant d’intermédiaire. Il est conçu comme un véritable service de renseignement chargé de collecter les informations concernant les postes vacants et les possibilités d’embauches. Dès 1904, ce service a pour mission de tenir informer les différents districts en leur faisant parvenir une liste des ingénieurs en difficulté :

    Il est décidé qu’à l’avenir tous les membres du conseil et les présidents des groupes régionaux recevront périodiquement une circulaire confidentielle expédiée par notre secrétaire, leur indiquant les noms de nos camarades sans situation. Ils tiendront à honneur d’employer leurs relations en faveur de tel ou tel d’entre eux[55].

    À la fin de la Première Guerre mondiale, le service de renseignements est réorganisé. Six secrétaires sont nommés : un secrétaire général, un pour Paris, un pour la Bourgogne, un pour le Sud-Ouest, un pour le Nord et un pour le Midi[56]. Le maillage destiné à recueillir l’information est plus dense, ce qui augmente les chances d’obtenir des renseignements sur les postes vacants. Au sein de cette organisation, il n’est plus question pour le secrétaire général d’occuper son temps à une autre activité. Correspondance, accueil de visiteurs, visites d’entreprises, contacts téléphoniques ; toutes ses actions sont tournées en direction du placement des anciens élèves de l’école. Loin de se contenter de recueillir l’information et de la diffuser, le secrétaire général effectue régulièrement des voyages de reconnaissance dans certains bassins industriels afin de placer les ingénieurs sans travail. Ainsi, en avril 1919, M. Rouveure, alors secrétaire général, se rend en Alsace et en Lorraine pour rencontrer les autorités politiques. Il veut profiter du contexte avec le retour de ces deux régions dans le giron de la République française puisqu’il croit que les mines et les usines métallurgiques seront demandeuses de personnels qualifiés[57]. Ce système de placement est apparemment très efficace. En 1904, le trésorier-archiviste de la société amicale estime que, durant l’année écoulée, la société a procuré du travail à douze ingénieurs. De leur côté, les anciens élèves Gillot et Guillermin mettent en avant le fait que, durant les années 1920, depuis la réorganisation du service de renseignement, les élèves de l’école sont généralement engagés par les sociétés industrielles plusieurs mois avant la fin de leurs études[58]. Depuis la fin de la Première Guerre mondiale, les moyens alloués au placement des élèves se sont accrus, ce qui a permis au système de se professionnaliser.

    Cependant, le placement des élèves ne dépend pas uniquement d’un système, mais aussi d’un sentiment d’appartenance à la « famille ». Cette sensation est largement entretenue par la sociabilité générée dans la Société amicale des anciens élèves. De nombreux évènements, organisés par la commission des fêtes, réunissent périodiquement l’ensemble des membres de l’association. Chaque année, l’assemblée générale est suivie d’un banquet et d’une soirée qui rassemblent les anciens élèves et leurs familles. Il convient également de remarquer que l’assemblée générale de la Société amicale des anciens élèves a lieu dans la même journée que celle de la Société de l’industrie minérale. Ces deux évènements se déroulent généralement dans le même lieu, les membres étant bien souvent adhérents à l’une et l’autre des sociétés. D’ailleurs, le banquet de fin de journée associe habituellement les deux associations[59]. Au-delà de ce rassemblement annuel, les anciens élèves se retrouvent tous les 4 décembre, afin de fêter la Sainte-Barbe dans leur district respectif. C’est l’occasion d’un banquet au sein de chaque groupe régional[60]. Les liens d’amitié entre les membres de la société sont également entretenus par les repas trimestriels organisés au siège de l’association à Saint-Étienne[61]. Ces festivités constituent donc un cadre de socialisation, destiné à compenser la division du travail qui tend à isoler les ingénieurs, au sein des différentes industries, entre patronat et masse ouvrière.

    En 1897, la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne fait édifier un hôtel particulier, destiné à abriter son siège ainsi que celui d’autres associations d’ingénieurs dont la Société de l’industrie minérale. Cet édifice, conçu pour réunir la « famille », devient le lieu où l’ensemble des festivités du réseau se déroule. Il est également pensé comme un lien entre les anciens élèves et les élèves de l’école. Un mémoire rédigé, en 1897, par la société nous fait remarquer l’intérêt du lieu pour les élèves :

    Il y aurait en effet grand intérêt à voir ces jeunes gens prendre contact avec leurs anciens de tous âges dès qu’ils sont à l’École, créer avec eux des relations qui s’étendraient peu à peu jusqu’aux familles des anciens, les amèneraient à y être reçus, prenant ainsi l’usage du monde dont quelques-uns n’ont pas une connaissance suffisante et n’ayant qu’à s’en féliciter plus tard[62].

    L’hôtel particulier n’est pas qu’un lieu de festivité, il est aussi l’emblème d’un réseau d’ingénieurs. À travers cette représentation, les valeurs du réseau transparaissent et nous donnent à voir le portrait moral type d’un ingénieur civil issu de l’École des Mines de Saint-Étienne.

    Entre valeurs et représentations du réseau

    Les actes et les discours produits par les membres du réseau de l’École des Mines de Saint-Étienne nous livrent des éléments qui permettent de comprendre la constitution et le fonctionnement de cette organisation informelle. Cependant, loin d’une simple architecture mécaniste, ce type d’organisation s’appuie également sur des valeurs et des représentations communes.

    La place de l’ingénieur dans la société selon le réseau de l’École des Mines

    L’ingénieur civil formé à l’École des Mines de Saint-Étienne se définit, en premier lieu, à travers son activité industrielle. N’oublions pas que la Société de l’industrie minérale a pour ambition première de participer au progrès des industries minière, métallurgique et mécanique. Influencés par l’esprit des Lumières, les membres de la « Minérale » se veulent utiles à leur art :

    Le conseil décide que les médailles seront conférées s’il y a lieu chaque année, à tout inventeur qui se sera distingué dans l’art des mines, de la métallurgie ou des constructions, par une découverte importante et utile[63].

    Rapidement, cette thématique de l’utilité apparaît dans le discours des ingénieurs. S’il s’agit d’un élément commun à l’immense majorité des ingénieurs français et européens, les techniciens issus de l’établissement stéphanois donnent un sens restrictif à cet élément en le circonscrivant à leur domaine industriel. A contrario, les ingénieurs influencés par le saint-simonisme se voient comme « les chevaliers blancs » de la société, alors qu’ils placent leur profession au cœur de celle-ci et s’arrogent une utilité sociale universelle. Malgré tout, les Stéphanois ne renient pas totalement leur impact social. Par exemple, à l’occasion de l’édification de l’hôtel de la Société amicale des anciens élèves en 1897, un grand nombre des membres de cette association voient dans ce bâtiment un moyen d’augmenter leur influence sur la sphère publique et industrielle[64]. Au cours des années 1870, le conseil d’administration de la Société de l’industrie minérale manifeste le désir, auprès des autorités compétentes, d’obtenir la reconnaissance d’utilité publique. L’ingénieur Euverte se charge des démarches administratives et ne manque pas de rappeler, au cours d’une de ses allocutions devant le conseil d’administration en 1875, que la Société des ingénieurs civils a acquis cette reconnaissance depuis 1862, donnant ainsi l’impression d’un passage obligé pour une société d’ingénieurs. Son action est relayée et finalisée par M. de Cizancourt, qui obtient la reconnaissance d’utilité publique en 1880[65]. Parallèlement, la société des anciens élèves entreprend les mêmes démarches et bénéficie de la publication d’un décret le 30 janvier 1882[66], conférant à l’association l’utilité publique.

    Dans les années 1930, à l’occasion d’un regard rétrospectif sur leur établissement formateur, le discours des ingénieurs issus de l’École des Mines de Saint-Étienne se fait patriotique en rappelant l’utilité de leurs actions pour la France et ses intérêts :

    Beaucoup d’anciens élèves vont conquérir hors de France de nouveaux domaines à leur activité et à l’influence de leur pays. Ils sont particulièrement nombreux, en dehors de nos colonies, en Espagne et en Pologne (il y a peu de temps encore en Russie) où leur présence est une solide garantie pour les intérêts français[67].

    Le réseau manifeste à plusieurs instants le besoin d’acquérir une représentation sociale. Le regard que la société porte sur les ingénieurs apparaît comme central dans l’esprit des anciens élèves stéphanois. Le processus d’édification de l’hôtel des anciens de l’École des Mines de Saint-Étienne révèle ce besoin. L’un des arguments qui justifie la construction de ce bâtiment repose en partie sur des analogies. Ainsi, l’hôtel est comparé à celui des anciens élèves des Arts et Métiers situé à Paris rue Chauchat et construit en 1895[68]. Le prestige et l’avenir de la Société de l’industrie minérale, qui doit intégrer le futur hôtel, sont également tenus en compte :

    Nous pouvons bien dire que nos regrets vont jusqu’à la honte quand nous comparons l’organisation matérielle de cette société dont les abonnés s’étendent dans le monde entier, à celle de nombreuses sociétés étrangères de même nature et qui, même d’importance moindre, sont richement dotées d’hôtels, de collections, de bibliothèques que chacun se plaît à augmenter […]. Sur ce point, nous avons aussi en France des exemples que nous devons imiter parce qu’ils sont dignes de l’être et parce qu’ils font mieux ressortir l’état d’infériorité dans lequel nous laissons notre Société de l’industrie minérale et la criante que nous avons de la voir déchoir de son rang si nous ne lui faisons pas suivre la marche en avant que font ses semblables, comme la Société des ingénieurs civils dont le magnifique hôtel de la rue Blanche, à Paris, vient de s’ouvrir[69].

    En admettant la Société de l’industrie minérale et ses services au sein de l’hôtel, les anciens élèves ambitionnent de créer un véritable centre scientifique et industriel pour les ingénieurs. Ils souhaitent ainsi donner vie au récit de l’ingénieur Leproux :

    Après le récit que M. l’ingénieur des Mines Leproux avait fait sur son voyage en Amérique pour l’exposition de Chicago et sur les installations des sociétés savantes et industrielles qu’il y avait admirées, M. de Castelnau souhaitait que notre Société de l’industrie minérale ait, comme les sociétés de même nature en Angleterre et en Amérique, au siège social, à Saint-Étienne, son « home » où seraient réunies les archives et la bibliothèque, où l’on trouverait des salles de lecture et de travail, une grande salle pour les réunions et un secrétaire conservateur de la bibliothèque et des archives pouvant donner tous les renseignements utiles[70].

    L’hôtel est également un lieu propice pour rassembler tous les évènements qui constituent la vie mondaine du réseau. Ainsi, les banquets, les bals, les représentations artistiques, les repas trimestriels, les remises de récompenses, toute cette sociabilité qui s’apparente à celle d’une bourgeoisie industrielle, se déroulent à partir de 1897 dans l’hôtel édifié au centre de la ville de Saint-Étienne. Notons que les réseaux de l’École Polytechnique et de l’École des Ponts-et-Chaussés effectuent un processus similaire et profitent également à la fin du XIXe siècle de la création d’un lieu dédié à cette urbanité[71]. Cet édifice s’offre ainsi au regard de la société comme la matérialisation de cette élite industrielle. Outre la place de l’ingénieur des Mines de Saint-Étienne, ce bâtiment renvoie aux valeurs qui traversent le réseau tout au long du XIXe siècle.

    Les valeurs de l’ingénieur civil des Mines de Saint-Étienne

    Bien qu’attachés à leur établissement de formation, les ingénieurs stéphanois semblent conscients de leur appartenance à une plus vaste communauté qui apparaît comme universelle : celle des ingénieurs. Cet aspect universaliste, legs des Lumières, s’exprime à travers les contacts qu’entretient la Société de l’industrie minérale avec les autres associations d’ingénieurs, mais également par l’adhésion de la société des anciens élèves à la Fédération des grandes écoles techniques, qui regroupe les associations amicales des Écoles centrales, des Mines de Paris, des Mines de Saint-Étienne et des Ponts-et-chaussées[72]. Au sein de cette communauté, le sacrifice pour la chose publique constitue une valeur centrale qui peut déboucher sur une rivalité entre les grandes écoles d’ingénieurs. Ainsi, durant la Première Guerre mondiale, les procès-verbaux des réunions du conseil d’administration de la Société des anciens élèves relatent abondamment les exploits au front de ses membres. L’association va jusqu’à compter ses adhérents morts au combat et compare ses pertes à celles des autres écoles d’ingénieurs. Elle est d’ailleurs « très fière » de faire partie des écoles dont les ressortissants ont été les plus touchés par le conflit.

    Ce sens du devoir s’accommode très bien des autres valeurs que veut transmettre le réseau de l’école et notamment le mérite républicain. L’ensemble des discours prononcés nous dresse le portrait d’un élève issu d’une famille modeste qui ne doit sa réussite qu’à son labeur :

    On ne saurait trop insister sur ce fait que ces résultats sont d’autant plus honorables que la grande majorité des ingénieurs de l’École de Saint-Étienne sont issus de familles de moyenne aisance, sans liens industriels ni puissantes relations, et c’est bien à leur science comme à leur labeur que les anciens arrivés aux plus hautes cimes doivent les fonctions qu’ils occupent[73].

    Cette logorrhée se place dans la lignée des objectifs poursuivis par l’École des Mines de Saint-Étienne qui se veut garante de la moralité de ses élèves. L’édification de l’hôtel de la société des anciens est d’ailleurs soutenue par la direction de l’école qui voit dans ce bâtiment un lieu de refuge :

    En outre, nous avons souvent entendu les doléances des directeurs et professeurs de l’École et aussi de M. l’inspecteur général Aguillon, regrettant que leurs élèves n’eussent pas un local constituant une sorte de cercle dans lequel ils puissent se soustraire aux trop grandes fréquentations des brasseries, où beaucoup ne vont que faute de mieux, et qui sont trop souvent la cause de dérangements et même quelquefois de la compromission de l’avenir. C’est donc un objet de préoccupations, constantes, depuis plusieurs années, pour l’administration de notre École qui souvent nous a demandé d’étudier la réalisation du désir qu’elle exprimait ainsi en faveur de nos jeunes gens, nous promettant d’ailleurs, pour nous y aider, tout l’appui dont elle dispose. Cette création serait ainsi, pour nous tous, un gage de voir nos élèves gagner en considération et se maintenir à un niveau moral et de dignité dont ils conservent les effets dans la vie[74].

    Loin de s’envisager uniquement comme des techniciens de haut niveau ou des dirigeants d’entreprise, les membres du réseau de l’École des Mines de Saint-Étienne semblent très marqués par les valeurs du catholicisme social. À plusieurs reprises, ils définissent l’ingénieur des mines comme le chef moral de centaines d’ouvriers en précisant que cette supériorité morale se double d’un labeur acharné ainsi que d’un savoir, d’une aménité et d’un sens de la justice[75]. Apparemment, ils se considèrent comme les pères d’une communauté industrielle et prononcent parfois des discours qui vont à l’encontre de leur position dans l’industrie. Ainsi, l’allocution de Félix Devillaine au sujet du placement de ses jeunes collègues, qui date du 23 mai 1875, laisse transmettre une conception plus humaine de l’industrie dans laquelle les relations entre les hommes jouent un rôle plus important que l’organisation administrative des grandes structures :

    […] Il nous reste donc beaucoup à faire de ce côté. N’oublions pas, Messieurs, qu’à notre époque où les grandes compagnies et les grandes sociétés se multiplient chaque jour et tendent à faire disparaître les influences personnelles, il est plus utile que jamais de mettre en pratique cette maxime, que l’union fait la force.

    Si cette réflexion, au premier abord, apparaît cohérente vis-à-vis des valeurs qui animent le réseau, elle devient beaucoup plus surprenante lorsque l’on connaît la position industrielle de Félix Devillaine. Celui-ci est, à l’heure de son discours, ingénieur en chef de la Compagnie des houillères de Montrambert et de la Béraudière, charbonnage situé dans la région stéphanoise et deuxième entreprise houillère la plus rentable de France après les Mines d’Anzin. L’allocution de Félix Devillaine démontre que l’association se veut un palliatif, autant symbolique que réel, à l’isolement que connaissent les « ingénieurs-salariés » au sein des grandes entreprises.

    Conclusion : entre solidarité et affirmation d’une identité

    De nombreux points communs existent entre le réseau de l’École des Mines de Saint-Étienne et les autres réseaux d’ingénieurs. Ainsi, la solidarité de corps qui s’exprime, bien souvent, à travers les associations d’anciens élèves, constitue une attitude commune. Avec la naissance, au fil du XIXe siècle, de nouvelles écoles et une offensive des laboratoires et instituts universitaires qui offrent des ingénieurs et des techniciens supérieurs en nombre, des réflexes corporatifs d’école se mettent place. L’objectif final est de ne laisser aucun camarade dans l’inactivité afin de préserver le rang social de l’ingénieur et de l’ensemble de cette communauté technicienne issue d’un établissement de formation. Il est également intéressant de noter que ces associations d’anciens élèves sécrètent des sociabilités similaires[76] (banquets, bals, représentations artistiques…) qui constituent également un moyen de se référer à une identité collective tout en promouvant l’image sociale du groupe.

    Si l’association d’anciens élèves constitue un point commun à l’ensemble des réseaux d’ingénieurs, elle représente également, pour les techniciens issus de l’École des Mines de Saint-Étienne, un élément de différenciation important. En effet, ce type de regroupement au sein des autres réseaux peut tenir à la fois de la société savante, du cercle mondain ou de la mutuelle de secours. A contrario, la Société amicale de l’École des Mines de Saint-Étienne a une fonction clairement établie : placer les ingénieurs sans emploi et générer une solidarité entre les membres de l’association. Il n’est pas question ici de multiplier les objectifs au risque de se disperser et il n’est pas concevable que l’association se transforme en société savante, contrairement à d’autres structures. En effet, des associations d’anciens élèves comme celles de l’École des Arts et Métiers et de l’École de physique et de chimie industrielle de Paris ont, toutes deux durant le XIXe siècle, publié des bulletins à vocation scientifique[77]. Au contraire, c’est la Société de l’industrie minérale qui affirme, au sein du « réseau stéphanois », l’identité scientifique et industrielle. Il s’agit ici d’une caractéristique propre aux ingénieurs stéphanois. N’oublions pas que l’École des Mines de Saint-Étienne doit, contrairement à d’autres formations d’ingénieurs, revendiquer sa compétence et sa crédibilité scientifique, car elle ne délivre pas, avant 1891, le titre d’ingénieur.

    Nous avons donc affaire à un réseau structuré autour de deux sociétés, dont chacune a une charge très précise au sein de cette organisation informelle. Les ingénieurs membres des deux associations adoptent une attitude très hermétique, voire « schizophrénique ». En effet, ils ne confondent à aucun moment les domaines d’action des deux entités. À l’intérieur de la Société amicale des anciens élèves, il n’est jamais question que de placement des camarades et de solidarité alors qu’au sein des travaux de la Société de l’industrie minérale les techniciens abordent uniquement les problèmes scientifiques et industriels collaborant ainsi à l’élaboration d’une identité industrielle. Seul l’exemple du réseau de l’École Centrale peut se rapprocher de celui de l’établissement stéphanois, les centraliens possédant une association d’anciens élèves et une société savante, la Société des Ingénieurs civils. Celle-ci constitue, cependant, un point de distinction essentiel entre centraliens et mineurs stéphanois. Contrairement à la Société de l’industrie minérale, la Société des ingénieurs civils n’a pas pour mission de procurer une crédibilité scientifique aux ingénieurs, mais d’affirmer l’identité des ingénieurs civils en les différenciant des ingénieurs d’État[78].

    Références

    [1] Terry Shinn, Savoir scientifique et pouvoir politique, l’École Polytechnique 1794-1914, Paris, Presses de la FNSP, 1980.

    [2] J. H. Weiss, The making of technological man. The social origins of rench engineering education, London, The MIT Press, 1982.

    [3] Charles R. Day, Les écoles d’art et métiers : l’enseignement technique en France XIXe-XXe siècles, Paris, Belin, 1991.

    [4] Antoine Picon, Les Saint-Simoniens : raison, imaginaire et utopie, Paris, Belin, 2002.

    [5] Georges Ribeill, « La sociabilité des centraliens en perspective : du militantisme corporatif des ingénieurs civils à l’organisation mondaine des centraux », dans Jean-Louis Bordes, Pascal Desabres et Annie Champion, L’ingénieur entrepreneur, les centraliens et l’industrie, Paris, PUPS, 2011, p. 371-388.

    [6] Anne-Françoise Garçon, Entre l’État et l’usine. L’École des Mines de Saint-Étienne au XIXe siècle, Rennes, PUR, 2004.

    [7] Georges Ribeill, « Les associations d’anciens élèves d’écoles d’ingénieurs des origines à 1914 », Revue française de sociologie, no. 26 (1986), p. 317-338.

    [8] Les six associations sont issues des écoles suivantes : Polytechnique, Ponts-et-Chaussées, Centrale, Arts et Métiers, École de physique et de chimie industrielle de Paris.

    [9] Charles R. Day, « Des ouvriers aux ingénieurs : le développement des Écoles d’Arts et Métiers et le rôle des anciens élèves », Culture technique, no. 12 (1984), p. 281-291.

    [10] Bruno Jacomy, « A la recherche de sa mission. La Société des Ingénieurs Civils », Culture technique, no.12 (1984), p. 208-219.

    [11] Nous avons la chance de bénéficier pour les deux associations composant le réseau de l’École des Mines de Saint-Étienne de fonds d’archives assez fournis : fonds de la Société de l’industrie minérale et fonds de la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne. Ces ressources archivistiques sont conservées aux Archives municipales de la ville de Saint-Étienne. Nous possédons également les nombreuses publications de ces associations : Bulletin de la Société de l’industrie minérale, Les Comptes-rendus de la Société de l’industrie minérale et Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne.

    [12] Louis-Joseph Gras, Histoire économique générale des mines de la Loire, Tome 1, Saint-Étienne, Imprimerie Théolier, 1922, p. 107.

    [13] Voir sur le sujet l’ouvrage d’Anne-Françoise Garçon, Entre l’État et l’usine…

    [14] A-F. Garçon, Entre l’État et l’usine…, p. 137.

    [15] Archives départementales Loire, 9 M 216, École des Mines de Saint-Étienne, Scolarité : lettre du directeur de l’École des Mines au sous-préfet (23 décembre 1836).

    [16] Ibid.

    [17] Correspondance des élèves brevetés de l’École des Mineurs de Saint-Étienne.

    [18] Anonyme, « Compte-rendu de la séance du 10 août 1844 de la seconde assemblée générale », Correspondance des élèves brevetés de l’École des Mineurs de Saint-Étienne, no. 3 (juillet-septembre 1844), p. 255-259.

    [19] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Rapport du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (4 février 1854).

    [20] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Rapport du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (5 mai 1855).

    [21] Louis-Emmanuel Grüner, « But et travaux de la société », Bulletin de la société de l’industrie minérale, t. 1 (1855-56), p. 1-12.

    [22] Michel Cotte, De l’espionnage à la veille technologique, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, Pôle éditorial de l’Université de technologie de Belfort-Montbéliard, 2005, p. 67-69.

    [23] L-E. Grüner, « But et travaux de la société », p. 1-12.

    [24] Voir sur le sujet : Pierre Guillaume, La compagnie des mines de la Loire, Paris, PUF, 1966.

    [25] L-E. Grüner, « But et travaux de la société », p. 1-12.

    [26] Ibid.

    [27] Ibid.

    [28] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Rapport du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (5 juin 1855).

    [29] A-F. Garçon, Entre l’État et l’usine…, p. 263.

    [30] Archives municipales St-Etienne, 18 S 471, Société de l’industrie minérale : règlement administratif, article 4 (1876).

    [31] Archives municipales St-Etienne, 18 S 471, Procès-verbal de l’assemblée générale de la société de l’industrie minérale (5 décembre 1875).

    [32] Archives municipales St-Etienne, 18S 475, Note sur la situation de la Société de l’industrie minérale (annexée au procès-verbal du 25 novembre 1931).

    [33] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Procès-verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (4 juillet 1859).

    [34] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Procès-verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (9 décembre 1864).

    [35] Archives municipales St-Etienne, 18 S 472, Procès-verbaux des conseils d’administration de la société de l’industrie minérale (18 novembre 1890, 28 février 1895, 20 novembre 1900).

    [36] Archives municipales St-Etienne, 18 S 472, Procès-verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (19 décembre 1905).

    [37] Archives municipales St-Etienne, 18 S 472, Procès verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (6 février 1900).

    [38] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Procès-verbal de l’assemblée générale de la société de l’industrie minérale (7 décembre 1856).

    [39] Archives municipales St-Etienne, Procès-verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (26 juin 1855).

    [40] Archives municipales St-Etienne, Procès-verbal de l’assemblée générale de la société de l’industrie minérale (23 mai 1875).

    [41] Archives municipales St-Etienne, 18 S 471, Société de l’industrie minérale : règlement administratif, article 5 (1876).

    [42] Archives municipales St-Etienne, Procès-verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (5 mai 1855).

    [43] Archives municipales St-Etienne, Procès-verbal du conseil d’administration de la société de l’industrie minérale (2 février 1857).

    [44] Archives municipales St-Etienne, 18 S 3, Procès-verbal de l’assemblée générale de la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne (31 mai 1868).

    [45] Archives municipales St-Etienne, 18 S 3, Procès-verbal de l’assemblée générale de la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne (29 mai 1870).

    [46] Archives municipales St-Etienne, 18 S 3, Procès-verbal de l’assemblée générale de la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne (23 mai 1875).

    [47] G. Ribeill, « Les associations d’anciens élèves… », p. 337.

    [48] Archives municipales St-Etienne, 18 S 8, Procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de la Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne (26 avril 1888).

    [49] Gillot et Guillermin, L’École nationale supérieure des Mines de Saint-Étienne, Saint-Étienne, Imprimerie Théolier, 1930 [1921], p. 45-50.

    [50] Ibid., p. 43-44.

    [51] Arch. Départementales Loire, 1 ETP 5857, Société amicale des anciens élèves de l’École des Mineurs de Saint-Étienne, constitution d’une caisse de retraite.

    [52] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/2, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne, circulaire N°63 (31 janvier 1911).

    [53] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/1, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne (1898-1909).

    [54] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/1, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne circulaire N°4 (janvier-février 1898).

    [55] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/1, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne circulaire N°28 (31 mars 1904).

    [56] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/3, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne circulaire N°121 (30 novembre 1918).

    [57] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/3, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne circulaire N°125 (30 avril 1919).

    [58] Gillot et Guillermin, L’École nationale supérieure…, p. 44.

    [59] Mémorial de la Loire, 27 mai 1919.

    [60] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/2, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne circulaire N°63 (31 janvier 1910).

    [61] Archives municipales St-Etienne, 12 C 142/2, Circulaire de la société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne circulaire N°70 (31 mars 1911).

    [62] Société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne, Mémoire sur l’hôtel de la société amicale de l’École des Mines de Saint-Étienne, Saint-Étienne, Imprimerie Théolier, 1897, p. 4-5.

    [63] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Rapport du conseil d’administration de la Société de l’industrie minérale (3 décembre 1855).

    [64] Société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne, Mémoire sur l’hôtel.., p. 10.

    [65] Archives municipales St-Etienne, 18 S 470, Rapport du conseil d’administration de la Société de l’industrie minérale (4 décembre 1875 et 20 janvier 1880).

    [66] Gillot et Guillermin, L’École nationale supérieure…, p. 44.

    [67] Ibid., p. 48.

    [68] Société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne, Mémoire sur l’hôtel…, p. 4.

    [69] Ibid., p. 7-8.

    [70] Ibid., p. 9.

    [71] G. Ribeill, « Les associations d’anciens élèves… », p. 328.

    [72] Gillot et Guillermin, L’École nationale supérieure…, p. 44-45.

    [73] Ibid., p. 47.

    [74] Société amicale des anciens élèves de l’École des Mines de Saint-Étienne, Mémoire sur l’hôtel…, p. 5.

    [75] Gillot et Guillermin, L’École nationale supérieure…, p. 50.

    [76] G. Ribeill, « Les associations d’anciens élèves… », p. 325-331.

    [77] Ibid., p. 326.

    [78] B. Jacomy, « A la recherche de sa mission…», p. 211.