Mémoire « oubliée » et identité monastique : la chronique de Simon de Gand confrontée aux manuscrits enluminés de Saint-Bertin

Blanche Lagrange
Candidate au doctorat en histoire à l’Université de Poitiers et au CESM (Centre d’études supérieures de civilisation médiévale)

Biographie: Je suis actuellement en deuxième année de doctorat à l’Université de Poitiers et au CESCM (CNRS-UMR 7302, Centre d’études supérieures de civilisation médiévale). Ma thèse, menée sous la direction de Cécile Voyer (CESCM), s’intitule « Traditio et renovatio : études des manuscrits liturgiques des abbayes de Flandre au Xe siècle ». Parallèlement à ma thèse, je suis ingénieure d’études en analyses des sources historiques et culturelles au CESCM.

Résumé: La chronique de Simon de Gand (1095-1116) relate l’histoire de l’abbaye flamande Saint-Bertin : selon lui, les années 962 à 1021 n’ont « rien de mémorable. » Dès le XIXe siècle, les historiens ont interprété cette période comme celle d’un déclin monastique. Pourtant, Saint-Bertin a produit à cette époque des manuscrits richement enluminés, entre tradition carolingienne et « modernité » anglo-saxonne. Ces sources prouvent que loin d’être en plein déclin, Saint-Bertin était alors une institution puissante. Simon, dans sa chronique, a effacé ces souvenirs de la mémoire collective, souhaitant façonner une nouvelle identité réformiste au début du XIIe siècle. Cet aspect de la mémoire impose aux chercheurs une approches pluridisciplinaire, avec la prise en compte de sources diverses, notamment culturelles.

Mots-clés : abbayes flamandes, chronique, manuscrits, enluminures, mémoire, identité monastique, réformes, tradition, transferts culturels.

 

Table des matières
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    À la fin du Xe siècle et au début du XIe siècle, l’abbaye flamande Saint-Bertin de Saint-Omer connaît une période de réformes monastiques et de renouveau intellectuel et artistique, sous l’abbatiat d’Odbert (986-1007). Cela se manifeste par la production de manuscrits richement enluminés, dont presque une vingtaine sont parvenus jusqu’à nous. Citons par exemple les manuscrits 11, 20, 34, 56, 68, 102, 107, 188 de la bibliothèque municipale de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais, France), les manuscrits 97, 168, 342 bis et 765 de la Bibliothèque d’Agglomération de Saint-Omer (Pas-de-Calais, France), les manuscrits MS M. 333 et MS M. 827 conservés à la Morgan Library à New York, le manuscrit BPL 190 de l’Universiteitsbibliotheek de Leyde aux Pays-Bas et enfin le manuscrit 88 de la Bürgerbibliothek de Berne en Suisse, qui ont été identifiés avec certitude comme les productions du scriptorium bertinien sous la direction d’Odbert. Il s’agit pour la plupart d’ouvrages patristiques et scientifiques pour l’étude, de vies de saints ou de manuscrits destinés à un usage liturgique. Ils sont décorés de riches enluminures présentant des motifs variés, des compositions inventives et des aplats en or et en argent, le tout réalisé dans un dessin au trait fin et maîtrisé (Fig. 1).

     

    Figure 1. Boulogne-sur-Mer, Bibliothèque municipale, ms. 20, folio 58v, 999.

     

    L’étude des manuscrits et de leur iconographie est indissociable de l’étude de l’histoire de l’abbaye à cette époque, afin de mieux comprendre leur contexte de production. Malheureusement, il ne subsiste que peu de sources de cette période, qui n’est pas décrite précisément par les chroniques plus ou moins contemporaines que sont les chroniques de Folcuin (961-962) et de Simon de Gand (1095-1116). Se basant sur ces dernières, la plupart des études historiques menées depuis le XIXe siècle n’examinent pas beaucoup cette période, la considérant comme une phase de déclin monastique. L’abbaye Saint-Bertin a en effet traversé des périodes troubles entre le IXe et le XIIe siècle et a connu plusieurs réformes : au milieu du Xe siècle, au premier quart du XIe puis au tout début du XIIe siècle. Pourtant, les manuscrits produits par le scriptorium bertinien à la fin du Xe siècle et au début du XIe siècle montrent que loin d’être en plein déclin comme certaines chroniques le prétendent, le monastère de Saint-Bertin était un centre culturel important et une institution puissante, aux hauts standards intellectuels.

     

    La période de production des manuscrits d’Odbert est méconnue, ayant été peu abordée par les travaux d’historiens. Comme nous le verrons, l’histoire des abbayes flamandes et les réformes qu’elles ont subies entre le Xe et le XIIe siècle ont attiré l’attention des historiens dès le XIXe siècle, mais ils se sont principalement basés sur de grandes sources, notamment des chroniques présentant les événements sous une forme narrative cohérente et chronologique. Les chroniques plus ou moins contemporaines de l’abbatiat d’Odbert (986-1007) sont celles de Folcuin et de Simon de Gand, tous deux moines à Saint-Bertin. Elles constituent les sources principales de l’abondante bibliographie concernant l’histoire monastique de la Flandre du Xe au XIIe siècle. La première, celle de Folcuin, narre l’histoire de Saint-Bertin de la fondation de l’abbaye au VIIe siècle jusqu’à sa rédaction en 961-962[1]. Il y décrit les réformes monastiques mises en œuvre à Saint-Bertin par le comte de Flandre Arnoul Ier au milieu du Xe siècle, ce qui nous permet de comprendre le contexte précédant l’abbatiat d’Odbert et la production des manuscrits. La chronique suivante, rédigée par Simon de Gand[2] au début du XIIe siècle, ne reprend pas là où Folcuin s’est arrêté dans les années 960, mais à partir de la nomination de Roderic comme abbé en 1021. Il manque donc la description des événements d’une soixantaine d’années, de 960 à 1021. L’abbatiat d’Odbert (986-1007), et par conséquent la période de production des manuscrits de l’abbé n’est donc pas concernée par ces chroniques. Simon affirmait en effet qu’un manque de documentation empêchait d’en retracer l’histoire. Pourtant, Jean d’Ypres, abbé de 1365 à 1383, est revenu sur cette période grâce à des sources du Xe et XIe siècle[3]. Aussi, les manuscrits enluminés d’Odbert constituent également une documentation précieuse, qui donne des informations sur le contexte culturel et intellectuel de l’abbaye à cette époque.

     

    Comment les manuscrits enluminés peuvent-ils nous renseigner sur cette période, notamment sur l’abbatiat d’Odbert (986-1007) ? Que peuvent-ils nous apprendre, et comment leur étude permet de remettre en question les informations de la chronique de Simon de Gand ? Cette approche culturelle de l’histoire a pu mettre en lumière une période où l’abbaye connaissait une période florissante, contrairement à ce que la chronique de Simon affirme. Cette dernière, longtemps considérée comme principale source historique, avait pour but de façonner la mémoire collective et l’identité monastique des moines au début du XIIe siècle : la chronique a été rédigée à des fins spécifiques, dans un contexte monastique particulier et différent de celui dans lequel les manuscrits ont été produits, un siècle plus tôt.

     

    L’histoire de Saint-Bertin : le récit des chroniques de Folcuin et de Simon de Gand

    Les manuscrits de Saint-Bertin ont été réalisés sous l’abbatiat d’Odbert (986-1007), abbé, enlumineur et chef du scriptorium bertinien. Il dirigea le monastère après une époque de troubles, de changements institutionnels et de réformes monastiques qui ont sûrement entraîné des conséquences sur la production des manuscrits, et les textes et images qu’ils renferment.

    La chronique de Folcuin, relatant les actes des abbés ainsi que les transactions de propriétés, décrit l’histoire de l’abbaye de sa fondation jusqu’au tout début de l’abbatiat d’Hildebrand, vers 961-962. Cette chronique, ainsi que d’autres documents, permettent de retracer l’histoire de Saint-Bertin. L’abbaye a été fondée au VIIe siècle par des disciples de saint Omer, les moines Bertin, Mommelin et Ebertramm, qui l’aidaient à christianiser la Flandre. Par la suite, l’abbaye Saint-Bertin du diocèse de Thérouanne se présentait comme l’une des abbayes les plus importantes au nord de Paris, avec Saint-Vaast d’Arras et Saint-Amand, et comme l’une des plus influentes et renommées du nord de l’Europe, notamment à l’époque carolingienne. Les monastères flamands bénéficiaient en effet d’un certain prestige sous l’Empire carolingien : les empereurs plaçaient leurs proches comme abbés à Saint-Bertin. Elle était à cette époque une école monastique florissante, qui produisait pour l’élite des manuscrits luxueux, comme le Psautier de Louis le Germanique[4], et qui s’était constitué une bibliothèque bien fournie. A la fin du IXe siècle, les attaques normandes et l’instabilité politique dans la région avait perturbé la vie de nombreuses institutions religieuses ; malgré cela, Saint-Bertin avait accumulé au cours des siècles un tel capital économique et culturel qu’elle était encore en mesure d’attirer la convoitise des comtes de Flandre. Ainsi, le comte Baudoin II (879-918) conquit la Thérouanne et obtint l’abbatiat laïc de Saint-Bertin en 900. Cet abbatiat laïc restait propriété royale, et avait d’ailleurs été confisqué aux comtes au IXe et au début du Xe siècle.

     

    Au milieu du Xe siècle, le comte de Flandre Arnoul Ier (918-958) lança une entreprise de réforme monastique dans plusieurs monastères flamands dont il était l’abbé laïc, en faisant appel au réformateur Gérard de Brogne (†959). Il existe une bibliographie abondante sur les réformes de Gérard du milieu du Xe siècle[5], mais Steven Vanderputten a récemment mis en valeur ce que la réforme imposait réellement au niveau institutionnel et comment celle-ci contribuait aux ambitions comtales[6].  Mener une réforme au sein d’un monastère suppose un retour au respect strict des préceptes de la Règle de saint Benoît : chasteté, clôture, vie communautaire et obéissance à l’abbé. Arnoul décida d’abolir l’abbatiat laïc et de mettre en place un abbatiat régulier, avec élection d’un religieux ; il mit donc lui-même fin à son contrôle sur Saint-Bertin. Cependant, en abolissant l’abbatiat laïc, il soustrayait ces institutions aux dirigeants carolingiens. De plus, Arnoul gardait le droit d’approuver ou non l’élection du nouvel abbé, et plaça deux fois son propre neveu Hildebrand comme abbé (950-954 et 962-971). Ainsi, malgré cette réforme monastique, le comte Arnoul n’a sûrement jamais eu l’intention de laisser le gouvernement de ses institutions monastiques aux abbés réguliers. D’ailleurs, il est désigné comme abbé dans un privilège délivré en 962 par le roi Lothaire[7], indiquant qu’il avait conservé son ancien titre d’abbé laïc dans des transactions importantes.

     

    Certains historiens et historiennes, comme Steven Vanderputten ou Karine Ugé[8], ont récemment interprété ces réformes non pas comme des tentatives de restaurer l’observance monastique (cet aspect de la réforme n’est d’ailleurs pas détaillé dans la chronique de Folcuin) mais comme une stratégie pour soustraire ces abbayes aux mains des dirigeants carolingiens, tout en gardant un contrôle sur les monastères de la région et consolider l’autorité d’Arnoul en tant que chef de la Flandre. Cette réforme était vraisemblablement une entreprise laïque au service d’objectifs laïcs : en effet, c’est Arnoul plutôt que le réformateur Gérard de Brogne qui a initié ce mouvement de réformes. Gérard fut mis à la tête de la communauté de Saint-Bertin mais Arnoul continua à dominer l’institution, restant activement impliqué dans le gouvernement de l’abbaye. La chronique de Folcuin s’arrête au tout début du second abbatiat d’Hildebrand en 961/962, peu de temps avant la mort du comte en 965, qui mit fin à son hégémonie sur l’abbaye.

     

    Près d’un siècle et demi plus tard, une nouvelle chronique fut rédigée, relatant les événements postérieurs aux travaux de Folcuin et pouvant donc nous éclairer sur le contexte de production des manuscrits d’Odbert. Il s’agit de la chronique de Simon de Gand, rédigée à la demande de l’abbé Lambert (1095-1125) à la fin du XIe siècle et achevée avant 1116. Simon a présenté son récit comme faisant suite à celui de Folcuin ; pourtant, il n’a pas repris le déroulement des événements là où Folcuin s’est arrêté. Le premier abbatiat qu’il détaille dans sa chronique est celui de Roderic, nommé abbé de Saint-Bertin en 1021 : Simon omet ainsi dans son récit six décennies, et six abbatiats, affirmant qu’ils n’ont « rien de mémorable. » Dans son prologue, Simon a souhaité justifier ce vide historiographique auprès de son audience :

     

    « Je suivrai l’exemple d’un certain moine de ce lieu nommé Folcuin, qui, sur les ordres de son abbé, a exposé succinctement les actes et chartes de presque tous les chefs de cette abbaye qui se sont succédés l’un l’autre depuis le temps de notre très saint père Bertin jusqu’au temps du seigneur Adalolf ; évitant ainsi l’inactivité des écrivains qui m’ont précédé et qui ont négligé de produire un récit écrit de six abbés qui se sont succédé à des moments différents depuis le précité Adalolf jusqu’à l’athlète du Christ Roderic. Bien que nous n’ayons rien trouvé de mémorable qui soit écrit sur ces abbés, il ne fait aucun doute qu’ils se sont donné beaucoup de mal pour prendre soin du gouvernement qu’ils avaient pris sur eux.[9] »

     

    Le prologue de Simon fait donc part d’un manque de documentation pour la période allant de 962 à 1021, ce qui l’aurait empêché de rapporter convenablement les faits survenus lors de ces six abbatiats. Sa chronique débute ensuite avec la nomination de Roderic comme abbé en 1021 et ses efforts pour réformer l’abbaye en rétablissant l’observance monastique. Selon Simon, cette réforme aurait été nécessaire à la suite de troubles causés par les moines, ce qui laisse envisager un déclin de la règle monastique et de l’autorité abbatiale. Roderic (1021-1043) ancien moine de Saint-Vaast nominé par le comte flamand Baudoin IV afin d’appliquer au monastère une réforme bénédictine, est présenté comme le premier d’une longue série d’abbés rétablissant l’ordre et l’observance de la Règle au monastère tout au long du XIe siècle. Ainsi, il semble, selon le récit de Simon, que la réforme du Xe siècle narrée par Folcuin n’avait pas réussi à garantir un une forme de gouvernement stable ni une discipline monastique pérenne.

     

    La chronique de Folcuin décrit les difficultés causées par le gouvernement du comte Arnoul, tandis que la chronique de Simon insiste sur le désordre institutionnel ayant mené à la réforme de Roderic en 1021. En prenant en compte les chroniques de Folcuin et de Simon de Gand, les premiers historiens qui étudiaient cette période, tels Ernst Sackur par exemple, concluaient que l’échec de la réforme d’Arnoul avait entraîné un déclin monastique entre 960 et 1021. Ils ne confrontaient alors pas ces informations à d’autres sources, notamment culturelles, qui démentent ce déclin : les manuscrits d’Odbert, richement enluminés, témoignent en effet d’une période d’intense création.

     

    L’historiographie depuis le XIXe siècle et sa remise en question 

    À la fin du XIXe siècle, Ernst Sackur étudiait l’introduction de coutumes clunisiennes dans les monastères flamand au début du XIe siècle. Sa thèse se concentrait sur la mise en place d’un ordre monastique centré autour de l’abbaye de Cluny (Francie occidentale) et de celle de Gorze (Empire), dès le début du Xe siècle[10]. Il s’appuyait, entre autres, sur la chronique de Simon de Gand qui justifiait la réforme clunisienne du début du XIIe siècle en la plaçant dans une longue politique réformiste menée depuis un siècle. Ses idées furent reprises, bien que nuancées, par Étienne Sabbe, Hubert Dauphin et Kassius Hallinger[11], qui ont continué à étudier les réformes du Xe siècle à la lumière de celles menées du XIe au XIIe siècle. Ils ont ainsi conclu que les premières réformes avaient échoué ou négligé d’imposer aux monastères flamand un gouvernement suffisamment stable pour garantir la discipline monastique, ce qui avait entraîné une nouvelle vague de réformes aux XIe et XIIe siècle. Les périodes entre les réformes étaient peu étudiées car les historiens, jusque récemment, se concentraient uniquement sur la mise en place de la réforme et non sur sa longévité institutionnelle ; le manque d’informations concrètes sur ce qu’il se passait réellement entre chaque réforme dans les monastères n’était pas abordé. L’idée était donc répandue que la période entre 960 et 1020 était celle d’un déclin institutionnel, auquel a mis fin une nouvelle vague de réforme plus efficace et organisée au début du XIe siècle, par exemple avec la réforme de Roderic à Saint-Bertin.

     

    Depuis environ deux décennies, des recherches récentes se concentrent sur des aspects plus spécifiques de la vie monastique lors des réformes, comme la gestion économique, la production de manuscrits et la gestion des bibliothèques[12]. Ces recherches ont permis de remettre en question les hypothèses de Ernst Sackur, Hubert Dauphin et Kassius Hallinger qui n’avaient pas pris la juste mesure des sources primaires « de second ordre » comme les chartes, les cartulaires, les lettres, les textes hagiographiques, les manuscrits liturgiques, l’iconographie.

     

    L’histoire culturelle de Saint-Bertin : les manuscrits enluminés d’Odbert

    La chronique de Folcuin relate les événements jusqu’à 962, peu de temps avant la mort du comte Arnoul Ier, en 965. Or, il est aujourd’hui envisagé que c’est après la mort du comte que les abbés élus étaient de véritables réguliers. Saint-Bertin sortit alors réellement de l’emprise des comtes de Flandre et retrouva son autonomie et sa prospérité. Malheureusement, cette période étant située dans le vide historiographique laissé entre la chronique de Folcuin et celle de Simon de Gand, son histoire reste floue. Comme Steven Vanderputten l’a souligné, il existe néanmoins suffisamment de preuves contemporaines de cette période pour construire un récit cohérent de ces décennies.[13] Après la réforme et malgré son renoncement à l’abbatiat laïc, Arnoul garda encore le contrôle sur l’abbaye : Karine Ugé identifie les abbés Baudouin II (971-972) et Arnoul II (972-973) comme des membres de l’élite laïque supérieure qui s’était revendiqués abbés laïcs, mais qui partageaient probablement le gouvernement de Saint-Bertin avec un abbé régulier[14]. Walter fut certainement le premier abbé régulier à devenir le seul chef de l’abbaye, en 964 et est resté dans les mémoires comme celui qui a mis fin à l’abbatiat laïc de Saint-Bertin et comme le restaurateur de la discipline monastique. L’abbatiat de Walter et celui de son successeur, Trudgand (984-986) ont certainement amorcé une période de résurgence pour l’abbaye : la vie spirituelle et intellectuelle était favorisée.

     

    Odbert aurait été le 34e abbé de Saint-Bertin, de 986 à 1007 environ. De son abbatiat, il subsiste quelques chartes[15] qui le montrent développant les richesses matérielles de l’abbaye. Des lettres de l’abbé, échangées avec les archevêques de Canterbury, Aethelgar et Sigeric, témoignent de contacts politiques et financiers avec cette puissante abbaye du sud de l’Angleterre[16]. Les sources les plus significatives sont un corpus de manuscrits richement enluminés, réalisés sous sa supervision et parfois enluminés par l’abbé lui-même. Sous la direction d’Odbert, le scriptorium de Saint-Bertin connut une période de production intense : au moins seize manuscrits aujourd’hui connus témoignent des hauts standards intellectuels de l’abbaye à cette époque. Ils présentent tous des enluminures allant des initiales complexes dessinées au trait coloré et attestant d’une grande maîtrise pour ce type de travaux minutieux, jusqu’à de riches peintures pleines pages aux aplats d’or et d’argent. Cette forte production de manuscrits témoigne de la richesse matérielle de l’abbaye à cette époque : les matériaux, tels que le parchemin, les pigments et surtout l’or et l’argent, coûtaient cher. Au vu du nombre de manuscrits enluminés, de leur format et de la richesse avec laquelle ils sont décorés, il est difficile d’imaginer que le monastère traversait alors une période de déclin institutionnel. De plus, ces manuscrits, pour la plupart destinés à l’usage de Saint-Bertin, contiennent des textes liturgiques, scientifiques, patristiques, ce qui prouve que les moines avaient besoin de ces ouvrages pour l’étude et le culte divin. Témoignant d’une véritable frénésie intellectuelle et religieuse, ils ont pour la plus grande majorité été conservés dans la bibliothèque de l’abbaye durant plusieurs siècles. Cela n’est pas vraiment compatible avec le manque de documentation mentionné par Simon dans sa chronique, ni avec le déclin monastique qu’il sous-entend lors de la mise en place de la réforme par Roderic.

     

    Au-delà du simple aspect financier et intellectuel, les motifs et les compositions des enluminures sont travaillées et témoignent d’intenses réflexions. Nous pouvons observer des motifs issus de l’enluminure carolingienne : des cadres ornés de vanneries et d’entrelacs, des initiales faites de têtes d’animaux, sur fond de parchemin ou sur fond pourpre (Fig. 2). Ces éléments rappellent les motifs franco-saxons des manuscrits réalisés dans les abbayes flamandes au IXe siècle (Fig. 3), alors que Saint-Bertin était un important centre de production. Il se peut que les moines s’inspirent des motifs des manuscrits disponibles dans leur bibliothèque monastique. Comme nous l’avons vu précédemment, diverses abbayes flamandes ont été retirées de la souveraineté des rois carolingiens pour être dirigées par le comte de Flandre, qui gardait un certain contrôle sur les abbayes. Les monastères ne se sont affranchis de l’autorité comtale qu’après la mort du comte en 965. Le choix d’éléments visuels carolingiens dans les manuscrits de la fin du Xe siècle peut être aussi être dû au fait que les moines choisissaient de rappeler, peut-être même de revendiquer leur identité carolingienne à travers ces images. On peut imaginer qu’après les réformes du comte, les moines bertiniens ont tenté de renouer avec leurs racines carolingiennes et revendiquaient leur identité dans les manuscrits qu’ils produisent.

     

    Figure 2. Saint-Omer, Bibliothèque d’Agglomération de Saint-Omer, ms.342 bis, folio 64r, 986-1007, ©IRHT/BASO Saint-Omer.

    Figure 3. Arras, Bibliothèque municipale, ms. 233 (1045) IXe siècle, abbaye Saint-Vaast d’Arras, ©IRHT/BM Arras.

     

    Parallèlement, on peut observer dans ces manuscrits des éléments de nature anglo-saxonne. Par exemple, des initiales soignées et complexes, faites d’entrelacs de végétaux et de têtes d’animaux (Fig. 4) que l’on retrouve dans les manuscrits anglo-saxons de la seconde moitié du Xe siècle, ou encore des vêtements dessinés avec un fin trait de couleurs rouge et verte. L’enluminure anglo-saxonne se démarque des autres car elle utilise souvent la couleur pour dessiner les contours, alors qu’elle est normalement utilisée pour remplir et recouvrir les surfaces. Peuvent être également observés, dans les manuscrits flamands, des silhouettes élancées et des drapés bouillonnants (Fig. 5). La légèreté du vêtement, l’abondance des plis et la régularité des ondulations sur les bords sont caractéristiques de l’enluminure anglo-saxonne : le drapé semble en mouvement constant (Fig. 6). L’utilisation de cadres entourant les images, constitués de deux listels dorés remplis de couleurs et de végétaux, caractérisant l’école de Winchester, se rencontre également dans les manuscrits bertiniens (Fig. 7 et 8). Les abbayes anglaises avaient également subi des réformes durant la deuxième moitié du Xe siècle, grâce à l’aide de moines flamands : la vie monastique et intellectuelle avait été réellement restaurée. La transmission de motifs visible dans les manuscrits flamands témoigne d’échanges soutenus entre Saint-Bertin et les monastères anglais, notamment Winchester et Canterbury. Il s’agit peut-être, pour les moines, de rappeler ces relations privilégiées et ces idéaux monastiques en accord avec les puissantes institutions anglaises, alors qu’en Flandre, les réformes du comte avait mis à mal la vie spirituelle.

     

    Figure 4. Boulogne-sur-Mer, Bibliothèque municipale, ms. 20, folio 96v, 999.

    Figure 5. Boulogne-sur-Mer, Bibliothèque municipale, ms. 20, folio 124v, 999, ©IRHT/BM Boulogne-sur-Mer.

    Figure 6. Rouen, Bibliothèque municipale, ms. 274 (Y. 006), folio 164v, Angleterre, 1020, ©IRHT/BM Rouen.

    Figure 7. Rouen, Bibliothèque municipale, ms. 274 (Y. 006), folio 159r, Angleterre, 1020, ©IRHT/BM Rouen.

    Figure 8. Boulogne-sur-Mer, Bibliothèque municipale, ms. 107, folio 33r, 986-1007,  ©IRHT/BM Boulogne-sur-Mer.

     

    Les manuscrits flamands témoignent donc d’un bouillonnement intellectuel et d’une période d’intense création à l’abbaye de Saint-Bertin aux alentours de l’An Mil. L’étude des choix visuels des moines permet également de mieux comprendre comment se forge l’identité de l’abbaye bertinienne après les réformes du comte : les moines revendiquaient une identité carolingienne vécue, mais aussi leurs échanges avec les institutions anglaises, dont ils se sont réapproprié la culture visuelle. Ils continuaient à perpétuer la tradition carolingienne du message divin, étant sûrement conscient du haut standard intellectuel de l’abbaye au IXe siècle, tout en l’actualisant par des motifs contemporains issus d’institutions aux mêmes ambitions monastiques. Certaines études des scriptoria flamands, tels Saint-Bertin et Saint-Vaast, ont démontré que les abbés réformateurs ont façonnés des identités collectives réformées grâce à la production de manuscrits, en formant des collections de livres « réformistes » dans leurs bibliothèques[17]. L’étude de ces sources culturelles nous donne à voir une abbaye qui, malgré son histoire mouvementée jusqu’aux années 960-970, s’est imposée comme une institution puissante, gouvernée par des abbés réguliers impliqués dans la gestion et la préservation du domaine monastique et soucieux de maintenir des normes intellectuelles et artistique élevées. Les manuscrits et les lettres de l’abbé Odbert témoignent également de la participation des moines à des réseaux interrégionaux et indiquent la position privilégiée dont bénéficiait Saint-Bertin au début du XIe siècle.

     

    Ces sources permettent de remettre en question les récits des chroniqueurs. Steven Vanderputten a par exemple montré que Simon de Gand avait tendance à intervenir de façon très radicale dans la mémoire du début du XIe siècle[18] : en effet, le moine a fondé son récit sur un nombre très restreint de sources, principalement écrites, et la manière dont il a interprété les événements passés est tributaire des réformes clunisiennes alors à l’œuvre à Saint-Bertin. La chronique de Simon suggère un certain déclin de la discipline intérieure à la fin du Xe siècle et au début du XIe siècle, mais cela doit être nuancé et relativisé, admettent Brigitte Meijns et Steven Vanderputten, si l’on prend en compte les manuscrits exceptionnels alors produits au sein du scriptorium bertinien[19].

     

    Ainsi, des recherches récentes, comme celles de Karine Ugé et Steven Vanderputten[20], ont jeté un nouveau regard sur la chronique de Simon et sur la période qu’il décrit, en comparant son récit avec d’autres sources, notamment artistiques et culturelles. Les manuscrits enluminés de Saint-Bertin offrent un terrain d’observation privilégié pour étudier la situation du monastère au tournant de l’An Mil et la formation d’une identité monastique spécifique à cette période. L’intérêt de ces sources culturelles réside dans les explications concrètes qu’ils fournissent ; leur prise en compte a permis de multiplier les angles d’analyses et d’étudier les années 960 à 1020 à travers de nouvelles perspectives, dans une nouvelle approche interdisciplinaire. Leur étude a donc remis en question le récit de la chronique de Simon et de considérer cette source historique avec un nouveau regard critique.

     

    Une source historique peu objective

    En effet, il est difficile de comprendre pourquoi Simon a laissé entendre que la période précédant l’abbatiat de Roderic avait été une période de déclin monastique : les documents précédemment étudiés prouvent que Saint-Bertin était à cette époque une puissante institution. Les historiens de l’art, dès le début du XXe siècle, soulignaient bien la richesse de ces manuscrits en se concentrant sur leur aspect « artistique », sans vraiment les mettre en relation avec leur contexte et des sources « historiques » telles que les chartes ou les chroniques[21]. Les recherches récentes prennent mieux en compte ces sources et cet aspect interdisciplinaire, et certaines ont même permis de remettre en question les propos de Simon.

     

    Comme Steven Vanderputten l’a démontré[22], il est probable que Simon ait eu accès à toutes ces sources précédemment citées ; Jean d’Ypres, bien que ne relatant que peu de choses sur l’abbatiat d’Odbert, mentionne un recueil de miracles non pris en compte par Simon[23]. Il ne fait aucun doute que ce dernier a pris la décision consciente de ne pas parler de ces sources et de couper la période antérieure à 1021 du passé de l’abbaye. Pour comprendre pourquoi Simon a « oublié » ce passage de la mémoire bertinienne, il faut se pencher sur le contexte de rédaction de sa chronique.

     

    En effet, Simon a rédigé la chronique à la demande de l’abbé Lambert (1095-1124), alors que Saint-Bertin traversait une crise institutionnelle. Lambert souhaitait réformer le monastère avec l’aide de l’abbé de Cluny, ce à quoi les moines de Saint-Bertin s’étaient vivement opposés. Lambert demanda donc à Simon, un de ses partisans, de rédiger une chronique. Dans son œuvre, Simon commença par insister sur la réforme de Roderic en 1021, qui mettait fin à des troubles causés par des moines, puis décrivit les efforts de l’abbé pour tenter de rétablir l’ordre malgré les protestations des moines. Les moines auraient fini par accepter la réforme de Roderic, dans un esprit de pénitence. S’ensuivent les abbatiats successifs, dans la même logique réformatrice, jusqu’à celui de Lambert. Ainsi, Simon ne présentait pas son abbé comme un réformateur révolutionnant l’ordre de l’institution ; c’est plutôt la réforme de Roderic qui est présentée comme ayant marqué un tournant dans l’histoire de l’abbaye. Cela visait sûrement à légitimer la réforme de Lambert en la plaçant dans une longue tradition réformiste en œuvre depuis presque un siècle. Simon a écrit sa chronique pour « réconcilier » les moines avec leur abbé, en façonnant une nouvelle mémoire et une identité monastique dans ce contexte de réformes.

     

    Les années 962 à 1021 ne présentaient pas d’entreprises réformistes d’une grande ampleur, comme ça a été le cas avec les réformes du comte Arnoul ou de Roderic ; pour appuyer son propos, il était plus cohérent pour Simon de les présenter comme des années de déclin avant le rétablissement de l’ordre par Roderic. De plus, il se peut que ces souvenirs des années 962 à 1021 et l’identité monastique qu’ils véhiculaient ne fussent pas conformes avec la manière dont Simon souhaitait façonner le passé collectif : il les a donc effacés de la mémoire du monastère. Son rejet de six décennies du passé communautaire a été déterminé par son implication personnelle et sa volonté de défendre les réformes clunisiennes alors en cours et d’en souligner la légitimité comme prolongement logique des réformes du début du XIe siècle. La préoccupation de Simon n’était pas d’explorer objectivement le passé de l’abbaye, mais la construction d’une identité historique collective pour les moines centrée autour des réformes clunisienne. Il n’a donc pas mentionné les documents, tels les manuscrits enluminés d’Odbert, qui véhiculaient une identité monastique différente un siècle plus tôt.

     

    Conclusion

    En conclusion, l’étude des sources culturelles et dans le cas de l’abbaye Saint-Bertin, des manuscrits enluminés, permet de nuancer les sources écrites comme la chronique de Simon de Gand. Les textes, les matériaux précieux et le soin avec lesquels ils ont été réalisés, mais également les motifs qu’ils présentent témoignent en effet de la puissance institutionnelle et de l’excellence intellectuelle de l’abbaye, véritable carrefour culturel à l’aube du XIe siècle. Ces documents ont permis d’aborder cette période méconnue sous une nouvelle perspective. Les informations qu’ils transmettent ne concordent pas avec les propos de la chronique de Simon, qui a donc été étudiée à nouveau. Ainsi, comme Steven Vanderputten l’a démontré, la chronique de Simon de Gand n’explore pas objectivement le passé de l’abbaye et est le résultat d’un processus de mémoire soigneusement dirigé, où les souvenirs ont été sélectionnés et organisés pour orienter la compréhension du lecteur.

     

    Malheureusement, la chronique de Simon de Gand fausse la réalité des faits pour les historiens et historiennes. Il y a encore un siècle, il n’était pas envisagé que Simon puisse intervenir de façon si radicale dans la mémoire des événements dans le but de façonner une nouvelle identité monastique. Cet aspect de la mémoire impose aux chercheurs et aux chercheuses une approche critique et interdisciplinaire. La chronique de Simon de Gand a été créée en raison d’un contexte monastique particulier et dans un but précis ; il ne s’agit pas d’un document historique objectif, dépeignant la réalité. Cette source donne une vision du passé trompeuse, il est donc indispensable d’utiliser divers documents pour étudier la période qu’ils décrivent sous d’autres angles d’analyse. Dans le cas de Saint-Bertin, certaines sources historiques du Xe et du XIe siècle présentent Saint-Bertin comme une institution qui voyait la restauration de la vie monastique et dont les abbés défendaient ses possessions et nouaient des liens avec les élites locales et ecclésiastiques. De plus amples recherches permettront de déterminer les identités collectives façonnées dans les manuscrits d’Odbert ; pour l’instant, l’étude du contexte culturel du monastère permet de faire ressortir des aspects inédits du passé : ce sont bien les enluminures des manuscrits qui montrent que, bien loin d’être en plein déclin comme la chronique de Simon l’affirme, Saint-Bertin était un centre culturel prestigieux au tournant de l’An Mil.

    Références

    [1] Folcuin, Gesta abbatum Sithiensium. Cette chronique a été éditée en premier lieu par Benjamin Guérard, Cartulaire de l’abbaye de Saint-Bertin, Paris, 1841, avec des additions et des corrections par François Morand, Appendice au cartulaire de l’abbaye de Saint-Bertin, Paris, 1867. Elle a ensuite été édité par Oswald Holder-Egger, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores (SS), t. 13, Hanovre, 1881, p. 607-635.

    [2] Simon de Gand, Gesta abbatum Sithiensium, également éditée par Benjamin Guérard, Cartulaire, op.cit., selon une copie du XVIe siècle (Saint-Omer, BASO, ms.750). François Morand, Appendice, op. cit., et Oswald Holder-Egger, Monumenta, op. cit., p.635-663, se basent sur une copie du milieu du XIIe siècle (Boulogne-sur-Mer, Bibliothèque municipale, ms. 146A).

    [3] La chronique de Jean d’Ypres est éditée par Edmond Martène et Ursin Durand, Thesaurus novus anecdotorum, 5 vols, Paris, 1717, III, pp. 561–571.

    [4] Berlin, Bibliothèque d’État de Berlin, Theol. lat. fol. 58, réalisé à Saint-Bertin au troisième quart du IXe siècle.

    [5] Par exemple Ernst Sackur, Die Cluniacenser, op. cit. ; Gérard de Brogne et son œuvre réformatrice: études publiées à l’occasion du millénaire de sa mort (959-1959), Maredsous, 1960, Revue bénédictine, 70, no 1 ; Daniel Misonne, «Gérard de Brogne. Moine et réformateur (†959) », Maredsous, 2001, Revue bénédictine, 111, nos 1-2, pp. 25-49.

    [6] Steven Vanderputten, Monastic Reform as Process: Realities and Representations in Medieval Flanders, 900–1100, Cornell University Press, 2013.

    [7] Louis Halphen et Ferdinand Lot, Recueil des actes de Lothaire et de Louis V rois de France (954–987), Paris, 1908, pp. 32–5, n. 15

    [8] Karine Ugé, Creating the Monastic Past in Medieval Flanders, Woodbridge, 2005, et Steven Vanderputten, ibid.

    [9] « Vestro itaque iuxta congruam mei nominis interpretationem imperio cupiens esse obediens, quamquam impotens, tamen ut possum, in hoc favens conquinisco; imitans quendam loci huius coenobitam Folquinum nomine, qui iussu sui abbatis pene omnium huius coenobii rectorum a tempore sanctissimi patris nostri Bertini invicem sibi succedentium usque ad tempus domni Adalolfi, qui in cathalogo ponitur, compendiose gesta cartasque digessit; simulque devitans antecessorum meorum scriptorum torporem, qui sex abbatum a semel dicto pastore Adalolfo usque ad Christi athletam Rodericum diversis temporibus sibi succedentium facta inscripta reliquerunt. Ex quibus, licet nobis nihil sit compertum scriptu memorabile, haut tamen dubium, eos in suscepti regiminis cura multo labore desudasse » Monumenta Germaniae Historica, Scriptores (SS), op. cit. p.635.

    [10] Ernst Sackur, Die Cluniacenser in ihrer kirchlichen und allgemeingeschichtlichen Wirksamkeit bis zur Mitte des elften Jahrhundert, 2 vol., Halle, 1892–1894

    [11] Étienne Sabbe, « La réforme clunisienne dans le comté de Flandre au début du XIIsiècle », Revue belge de Philologie et d’Histoire, t. 9, 1930, p. 121–138 ; Hubert Dauphin, Le Bienheureux Richard, abbé de Saint-Vanne de Verdun † 1046, Louvain–Paris, 1946 ; Kassius HALLINGER, Gorze–Kluny. Studien zu den monastischen Lebensformen und Gegensätzen im Hochmittelalter, t. 1, Graz, 1971 (1950–1951), p. 282–316

    [12] Par exemple Diane Reilly, The Art of Reform in Eleventh-Century Flanders : Gerard of Cambrai, Richard of Saint-Vanne and the Saint-Vaast Bible, Leyde–Boston, 2006

    [13] Steven Vanderputten, « Individual Experience » op. cit. p. 77

    [14] Karine Ugé, op. cit. p. 33

    [15] Les chartes ont été éditées par Daniel Haigneré, Les chartes de Saint-Bertin d’après le Grand Cartulaire de Dom Charles-Joseph Dewitte, 4 vols, Saint-Omer, 1886–99, I, pp. 20-22, nr. 64-66.

    [16] Ces lettres ont été copiées dans deux manuscrits : British Library, Cotton Tiberius A. xv, folios 145v-146v et 161v–162v et Cotton Vespasian A. xiv, folios 159v-160r.

    [17] Diane Reilly, The Art of Reform, op.cit., et Steven Vanderputten Monastic Reform as Process, op. cit.

    [18] Steven Vanderputten, « Individual Experience, Collective Remembrance and the Politics of Monastic Reform in High Medieval Flanders » Early medieval Europe, Vol.20 (1), 2012, p.70-89

    [19] Brigitte Meijns, Steven Vanderputten, « Gérard de Brogne en Flandre. État de la question sur les réformes monastiques du Xe siècle », Revue du Nord, 2010/2 (n° 385), p. 271-295

    [20] Karine Ugé, op. cit., et Steven Vanderputten, op. cit.

    [21] Par exemple Dom André Wilmart, Les livres de l’abbé Odbert, Saint-Omer, L’Indépendant du Pas-de-Calais, 1924 et divers travaux d’André Boutémy.

    [22] Steven Vanderputten, « Individual Experience », op. cit.

    [23] Edmond Martène et Ursin Durand, Thesaurus novus anecdotorum, op.cit.