Introduction
En 1742, deux couvreurs de bardeaux, Jean-Baptiste Serre et Michel Ruparon dit Sanspoil, doivent comparaître devant la justice royale à Montréal. Ces deux jeunes hommes ainsi que le boucher Jean Serre sont accusés de voler des volailles chez plusieurs habitants de la ville de Montréal. Lorsque les autorités judiciaires visitent la demeure du boucher, ceux-ci concluent rapidement à l’élaboration d’un réseau de vol et de revente de volailles qui fait intervenir une multitude de lieux de vols sur le territoire du gouvernement de Montréal[1]. Le procès qui en découle fait partie d’une série de procès criminels menés par les administrateurs judiciaires de la Juridiction royale de Montréal, dont plusieurs précisent les lieux du crime. En d’autres termes, ce procès n’est pas le seul à détailler des espaces associés à la criminalité. À vrai dire, cela n’a rien de surprenant : la justice pénale moderne est fondamentalement spatiale puisqu’elle est à la fois un outil d’affirmation et d’appropriation territoriale par les États modernes[2].
Alors que l’historiographie sur le caractère spatial de la justice pénale moderne tarde à s’imposer, les historiens spécialistes de l’histoire de la police[3] ont permis un renouvellement des pratiques méthodologiques, utilisant les structures de cette institution et la nature de ses sources afin d’y intégrer une forme d’analyse spatiale. En Europe, quelques chercheurs, dont Catherine Denys[4] et Vincent Milliot[5] sont à la tête de cette affinité pour l’espace et la police. De l’autre côté de l’Atlantique, l’historiographie de la Nouvelle-France semble avoir négligé la spatialité de la justice pénale, et ce, bien que les travaux sur la justice pénale soient nombreux. Dans les années 1970 et 1980, sous l’initiative d’André Lachance[6] et de John A. Dickinson, particulièrement dans le domaine de la justice civile[7], la recherche sur la justice pénale en Nouvelle-France demeure, encore aujourd’hui, un sujet d’intérêt pour les historiens. Jean-Philippe Garneau[8], Josianne Paul[9] et Éric Wenzel[10] se sont tous intéressés aux diverses composantes de la justice pénale en Nouvelle-France en étudiant son fonctionnement et sa capacité à régler des conflits. Plusieurs spécialistes ont d’ailleurs traité de la Juridiction royale de Montréal, dont Jean-François Leclerc[11], Jan Grabowski[12], Nathalie Villeneuve[13], Dhyana Robert[14] et plus récemment Dominique Deslandres[15].
L’historiographie de l’histoire des espaces est tout aussi riche, notamment depuis l’introduction des systèmes d’informations géographiques (SIG) dans le domaine historique au début des années 2000. À travers les travaux du Centre canadien d’architecture[16] de Jean-Claude Robert[17] et de Sylvie Freney[18], Montréal s’est imposé comme un des principaux sites d’intérêt pour l’étude de l’histoire du spatial. Enfin, mentionnons également les importants apports des études sur le paysage de Colin Coates[19], celles de Serge Courville sur les villes et les villages et du travail de spatialisation des seigneuries en Nouvelle-France mené par Alain Laberge[20] qui pose les bases méthodologiques de l’analyse spatiale historique en Nouvelle-France. .
La difficulté n’est donc pas de traiter de justice pénale ni de spatialité, mais d’entremêler les deux champs au sein d’une même étude. Étudier la spatialité du recours à la justice criminelle peut sembler complexe à première vue. C’est à la fois un défi informatique, notamment en ce qui concerne l’utilisation des logiciels SIG, et un défi au niveau des sources qui sont, à vrai dire, plutôt vagues quant aux données spatiales documentées. Néanmoins, le travail supplémentaire en vaut la peine. Employer l’échelle spatiale comme échelle d’analyse offre l’occasion aux chercheurs d’approfondir leur compréhension de phénomènes historiques qui seraient autrement complexes à analyser, telles les dynamiques spatiales qui en découlent. Le travail de recherche entrepris par Dominic Martin, tout comme le travail de son directeur Léon Robichaud, illustre comment il est possible d’analyser la justice pénale moderne à Montréal sous l’angle de l’analyse spatiale[21]. Explorons donc comment l’échelle spatiale se transpose au sein de notre propre étude.
Le travail de recherche : objet, problématique, hypothèse et méthodologie
Notre recherche s’intéresse aux procédures pénales menées par la Juridiction royale de Montréal. Nous étudions donc la criminalité rapportée en justice. Principale institution judiciaire de la juridiction, le tribunal royal de Montréal est une cour de première instance qui traite d’une variété de crimes allant du vol à la falsification des ordonnances. Dans cet article, notre attention est portée sur l’administration d’une justice royale dans un contexte colonial bien particulier, notamment en ce qui a trait au territoire. En effet, la Juridiction royale de Montréal couvre un territoire immense qui s’étend du lac Saint-Pierre, à l’est, à la limite connue des territoires de l’ouest, ce qui comprend les régions qui se nomment les Pays-d’en-Haut[22], la vallée de l’Outaouais, la vallée de l’Ohio et bassin du lac Champlain. Cet énorme territoire est peu habité et a une densité de population très faible. Administrer la justice sur cet espace pose donc un sérieux problème, d’autant que le personnel qualifié, d’un point de vue judiciaire, est rare[23]. En prenant en compte ces difficultés, comment la justice est-elle administrée sur le territoire de la Juridiction royale de Montréal? Face à cette problématique, nous estimons que les administrateurs judiciaires sont conscients des difficultés auxquels ils font face ce qui les incite à développer une stratégie de centralisation de leurs effectifs au sein de certains lieux clés, notamment au sein des lieux de justice situés à l’intérieur des fortifications de la ville de Montréal[24]. Cela a un impact sur les justiciables, mais aussi sur l’administration de la justice en général, concentrant les activités judiciaires pénales à proximité des lieux de justices, c’est-à-dire en proximité de Montréal.
Dans le cadre de notre recherche, nous nous sommes limités aux procédures pénales menées entre 1740 et 1755 et comprises dans le fonds de la Juridiction royale de Montréal[25]. Au total, cela inclut 94 procès criminels analysés[26]. Chaque procès est composé d’une variété de documents, mais seulement une partie de ceux-ci s’avère utile pour notre analyse. Puisque nous tentons de comprendre la façon dont se spatialise la justice criminelle sur le territoire, uniquement quelques écrits de procédures doivent être étudiés. En effet, les documents servant à l’instruction définitive, tout comme les pièces écrites liées au jugement, détaillent peu la composante spatiale d’un crime. Il faut plutôt se fier à la plainte, l’information, les interrogatoires des accusés ainsi que les procès-verbaux d’huissiers ou de chirurgiens. Ces documents sont à la fois les plus riches au niveau spatial, mais également les plus précis quant à la localisation des lieux de crimes rapportés.
À partir des informations spatiales tirées de ces documents, nous sommes en mesure de créer une grille d’analyse qui détaille l’ensemble des données spatiales recueillies. Celles-ci peuvent ensuite être appuyées par les données du projet ADHÉMAR du Goupe de recherche de Montréal (GRM)[27] qui facilite la géolocalisation des lieux situés dans la ville de Montréal. À partir de travaux antérieurs comme ceux de Dominic Martin[28], nous pouvons par la suite cartographier la criminalité rapportée en justice et donc procéder à l’analyse géospatiale.
1. Où la criminalité rapportée en justice a-t-elle lieu ? La localisation des lieux de criminalité
Géolocalisé précisément un lieu du crime est une tâche complexe lorsque nous travaillons sur le XVIIIe siècle. Les documents manquent de précision surtout en ce qui a trait aux lieux éloignés de la juridiction[29]. La terminologie est vague et ne s’adresse évidemment pas à un auditoire moderne. Heureusement, quelques historiens et géographes ont entamé une première analyse géospatiale des lots de propriété sur l’archipel de Montréal[30]. À partir de ces travaux et des données retrouvés dans les procès criminels, nous sommes en mesure de produire une cartographie des lieux de criminalité. Voilà donc comment s’illustre la répartition spatiale de la criminalité rapportée en justice royale.
Figure 1: Localisation des lieux de criminalité rapportés en justice entre 1740 et 1755
Figure 2: Localisation des lieux de criminalité rapportés en justice entre 1740 et 1755 (vue sur l’archipel de Montréal)
Figure 3 : Localisation des lieux de criminalité rapportés en justice entre 1740 et 1755 (vue sur la ville de Montréal)
Ces cartes illustrent une variété d’éléments quant à la répartition spatiale des lieux de criminalité, mais un en particulier attire notre attention : la concentration des lieux au sein d’espaces relativement restreints. Sur les trois cartes présentées, les points, représentant les lieux criminalisés, se retrouvent majoritairement en proximité de la ville de Montréal. En effet, les lieux de criminalité se retrouvent souvent dans l’espace urbain, ou du moins à une courte distance de la ville. Sur l’ensemble des points cartographiés dans la figure 2, les quelques points agglomérés autour de Montréal représentent à eux seuls 50 % des crimes rapportés en justice royale lors de la période étudiée. Le recours à la justice criminelle est donc un phénomène urbain.
Cela n’est pas étranger à l’historiographie qui s’est déjà intéressée à la question. André Lachance[31], tout comme John A. Dickinson, ont tous les deux reconnus le caractère urbain de la justice royale en Nouvelle-France. Dickinson explique que le recours à la justice prend une forme urbaine puisque la justice, civile ou criminelle, nécessite un déplacement au tribunal[32]. Or, un déplacement à l’époque peut s’avérer complexe. Il requiert des ressources pour combler le départ de l’habitant qui se déplace. Déjà qu’un procès en justice royale est relativement couteux monétairement[33], l’individu qui s’absente doit avoir les moyens nécessaires pour assurer le maintien de son entreprise, qu’elle soit marchande, artisanale ou agricole. De ce fait, plus un habitant vit loin des institutions judiciaires, plus celui-ci doit être prêt à débourser son argent, mais également son temps pour produire une plainte en justice. Cela a comme effet de favoriser l’émergence d’une criminalité rapportée en proximité des bâtiments judiciaires, c’est-à-dire de la ville de Montréal.
La concentration de la criminalité rapportée en justice en proximité des bâtiments judiciaires est encore plus frappante lorsque nous analysons les espaces éloignés de la ville de Montréal. Si nous nous penchons sur la distribution spatiale des paroisses concernées par le recours à la justice criminelle, seulement 55 % de l’ensemble des paroisses sont mentionnés comme lieu du crime dans les documents judiciaires de la juridiction de Montréal. Sur les 15 années étudiées dans notre corpus, seulement 23 paroisses sont le lieu d’un crime rapporté en justice sur un total de 42 paroisses[34] comptabilisées dans la juridiction de Montréal. D’ailleurs, deux de ces paroisses ne concernent qu’une seule procédure pénale : Saint-Denis-sur-Richelieu et Mascouche.
Figure 4 : Localisation des paroisses concernées et des paroisses non concernées par la criminalité rapportée en justice entre 1740 et 1755 dans la juridiction de Montréal
Ainsi, près de la moitié des paroisses ne sont pas touchées par le recours à la justice criminelle. L’ensemble des paroisses de l’ouest de la juridiction (Sainte-Geneviève, Saint-Anne-du-Bout-de-l’île, Les Cèdres et la mission des Deux-Montagnes), celles du nord-est (Yamaska et Saint-François), celles du Richelieu et plusieurs paroisses dans la région de Contrecœur n’apparaissent pas dans les procès criminels. Elles se distinguent toutes par leur isolement par rapport aux institutions judiciaires situées à Montréal. À travers l’observation de notre cartographie, une tendance se dessine : plus les paroisses sont éloignées des institutions judiciaires, moins celles-ci sont rapportées en justice royale.
Loin de la ville de Montréal, ces paroisses éloignées ont moins d’interactions économiques et politiques avec la zone urbaine que celles situées à proximité. En Nouvelle-France, les interactions et les communications entre communautés rurales et urbaines se font surtout à partir des axes fluviaux, dont le fleuve Saint-Laurent, et de quelques chemins[35]. Ces interactions entre ville et campagne s’illustrent, avant tout, sous un angle économique, notamment à travers l’exemple du marché du blé, une des principales denrées d’échanges dans la région. Dans le cadre de ce marché, les commerçants de Montréal échangent essentiellement avec les communautés voisines de la ville, c’est-à-dire les paroisses avoisinantes de Longue-Pointe, Saint-Laurent ou Lachine, mais également ceux de la rive sud, dont Longueuil, La Prairie ou Boucherville. Ces paroisses vivent des interactions courantes avec Montréal puisqu’elles fournissent une partie considérable des besoins en blé de la ville. Toutefois cela n’est pas le cas des paroisses éloignées de la ville. Louise Dechêne déclare qu’au-delà de 15 à 20 kilomètres de distance à parcourir, le transport de blé n’est pas rentable pour les paysans, et ce, peu importe la saison[36]. Selon cette prémisse, nombreuses paroisses éloignées sont mises à l’écart du marché du blé montréalais. Elles ont donc peu d’interactions régulières avec la ville de Montréal. Cela exclut, par exemple, l’ensemble des paroisses à l’est de Chambly, à l’ouest de Pointe-Claire et de Châteauguay et au nord de Lachenaie et de Varennes.
L’exemple du transport du blé n’est pas unique puisque ces paroisses sont également isolées politiquement par rapport à Montréal. Dans la colonie, le rapport des habitants ruraux au politique se fait généralement à travers le capitaine de milice. Responsable de la publication et l’exécution des ordonnances, le capitaine de milice comble un vide institutionnel et joue un rôle administratif essentiel dans son espace paroissial ou seigneurial[37]. La présence du capitaine de milice, tout comme celle du curé[38], dans l’ensemble des paroisses de la juridiction facilite, en quelques sortes, les interactions des habitants avec les institutions politiques. Ces deux hommes servent d’intermédiaires entre le pouvoir et les paroissiens. De ce fait, lorsque les paroissiens doivent se rapporter au pouvoir pour diverses raisons, ceux-ci communiquent d’abord avec les intermédiaires qu’ils connaissent davantage. Cela n’empêche en rien les interactions politiques entre les habitants des paroisses et les autorités de Montréal, mais la présence d’intermédiaires a comme effet d’en réduire leurs fréquences.
Ainsi, les paroissiens éloignés de Montréal ont peu de raisons d’interagir avec la ville puisque leurs échanges réguliers se limitent aux paroisses environnantes. Isolés des institutions montréalaises, les habitants des paroisses éloignées sont moins familiers avec la justice royale que leurs confrères urbains. Lorsqu’un crime surgit en espace rural éloigné, le paroissien semble favoriser, avant toute chose, des instances judiciaires qu’il connait mieux, dont la justice seigneuriale, la médiation par un notaire local ou toute forme de justice alternative qui lui est facilement accessible[39].
2. Concentration des espaces de criminalité : le cas du vol et du recel
La concentration des espaces de criminalité n’est pas seulement à l’échelle de la juridiction. Elle a aussi une forme communautaire, voire paroissiale. En effet, les actes criminels rapportés en justice ont tendance à se concentrer dans l’espace restreint de la paroisse, tout comme les lieux de résidences des justiciables. Pour illustrer cette tendance, reprenons l’exemple du procès de vol de volailles.
Dans ce procès qui oppose Anne Benoît, veuve de Lobinois, au boucher Jean Serre, son fils Jean-Baptiste et Michel Ruparon dit Sanspoil, la quantité de lieux associés au crime est considérable. Ce procès implique trois différents types de lieux. D’abord, nous avons retrouvé deux lieux de résidences des accusés, c’est-à-dire la propriété de Jean Serre où il vit avec son fils et la propriété de Saint-Michel dit Sanspoil où vit son fils Michel Ruparon dit Sanspoil[40]. Ensuite, nous avons rassemblé un total de six lieux de vols soit, la propriété d’Anne Benoît, la propriété de Pierre Lestage, la propriété de Charly dit Saint-Anne, la propriété de Pierre Compain dit Lesperence, celle d’un certain De Noyelle et la propriété d’un cabaretier du nom de [Borlet][41]. Enfin, un lieu de revente de volailles a été localisé dans la paroisse de Yamaska. Ainsi, c’est un total de dix lieux qui sont reliés entre eux dans le réseau de vol de volailles et qui peuvent être illustrés ainsi :
Figure 5 : Localisation des lieux importants pour le procès de vol de volailles de 1742 (vue sur la ville de Montréal)
Figure 6 : Représentation schématique des lieux impliqués dans le réseau de vols de volailles
Ce que nous pouvons observer dans cette carte et ce schéma, c’est d’abord la concentration du réseau au sein d’un espace autour de la boucherie de Jean Serre. Les volailles devant être travaillées par le boucher, les deux jeunes hommes doivent rapporter tous les animaux volés à la boucherie. Les vols sont donc commis à proximité de la boucherie. Les propriétés d’Anne Benoît et de Pierre Compain sont situées à quelques pas de la boucherie et les trois autres propriétés, à quelques centaines de mètres seulement. C’est lors de la revente des volailles que les déplacements se font sur de longues distances. En vue de cacher son crime, le boucher n’hésite pas à revendre dans des paroisses éloignées comme celle de Yamaska.
Ce procès de vol de volailles n’est pas le seul procès de vol et de recel à impliquer plusieurs lieux de criminalité dans notre corpus. L’année suivant le procès de vol de volailles, Jean-Baptiste Serre et Michel Ruparon dit Sanspoil sont repris par les autorités judiciaires en train de découper un cochon volé au faubourg Saint-Laurent. Puisque ces derniers n’ont pas respecté leur bannissement attribué par la justice l’année précédente, les deux jeunes hommes sont envoyés servir dans les galères du roi[42]. En 1753, un autre procès de vols d’animaux est subit par la domestique Marie-Louise Baudin et les soldats Jean-Baptiste Thibault et Jean-Baptiste Barra. Ceux-ci sont accusés de vols de dindes et de cochons chez un habitant du faubourg Saint-Joseph du nom de Prud’homme et à l’Hôpital général des pauvres situé près de Pointe-à-Callière[43]. Ces deux procès impliquent ici une série de vols dans des espaces rapprochés, c’est-à-dire dans le faubourg Saint-Laurent et le faubourg Saint-Joseph.
3. Et en campagne? La concentration des espaces criminalisés dans les paroisses rurales
La concentration des espaces criminalisés s’étend également aux paroisses rurales. Un cas qui implique plusieurs lieux met en exemple cette situation, c’est-à-dire un procès de calomnie dans la paroisse de Pointe-Claire en 1755. Dans ce court procès, un habitant du nom de Louis Morant accuse Jacques Perrier d’avoir émis des propos calomnieux à son égard[44]. Dans la plainte, Louis Morant nous indique que Challe, le capitaine de milice, lui a annoncé que des rumeurs selon lequel Morant fréquenterait la femme de Perrier circulent sur la place publique. Morant, qui dénie ces rumeurs, considère cela comme une atteinte à son honneur et s’en plaint en accusant Perrier d’avoir propagé ces propos sur la place publique[45].
Dans ce procès, nous avons retrouvé quatre lieux importants que nous avons dressés dans un schéma, c’est-à-dire, deux lieux de résidences, soit la résidence de Jacques Perrier à Pointe-Claire et la résidence de Louis Morant à la côte Saint-Charles, au nord de la paroisse. Alors que nous savons que Jacques Perrier possède, à l’époque, une propriété à quelques centaines de mètres à l’ouest de l’église paroissiale[46], nous ne connaissons pas la localisation exacte de la demeure de Louis Morant[47]. Toutefois, ce dernier vit sans doute dans un rayon de moins de cinq kilomètres de l’église, la côte Saint-Charles étant à proximité du village de Pointe-Claire. Quant au crime, dans ce cas-ci la propagation d’une rumeur ou d’une calomnie, il a été commis par devant l’église paroissiale sur la place publique du village. Ce lieu est également l’endroit où Morant a appris la rumeur. Cela est en quelque sorte typique des paroisses rurales de la juridiction. Les lieux de rencontres principaux que sont l’église et la place publique sont également des lieux de socialisation pour les habitants de la paroisse qui se rencontrent pour la messe paroissiale[48]. C’est pourquoi les lieux impliqués dans ce procès sont tous compris dans l’espace paroissial de Pointe-Claire.
Figure 7 : Représentation schématique des lieux, des déplacements et des personnes impliquées dans le procès de calomnies
C’est de même pour l’île Jésus, et ce, même lorsque nous nous intéressons à des types de crimes bien différents. Le procès qui oppose les Aunis aux Cléroux, deux familles de la paroisse Saint-Vincent-de-Paul-de-l’île-Jésus, illustre bien cette idée. Dans ce procès, Félix Aunis et son épouse, Marie-Geneviève Prévost, accusent de voies de fait les frères Jean et René Cléroux. Le tout est lié à une dispute de longue date entre les deux familles qui prend son origine dans un procès pour insulte dans lequel la famille Cléroux a été condamnée à payer 72 livres à la famille Aunis. Dans un esprit certainement tendu, Félix Aunis, Marie-Geneviève Prévost, Guillaume Cléroux et son épouse, Jeanne Boisseau, vont se rencontrer à la demeure des Aunis pour le paiement de la dette[49]. Les deux familles vont ensuite se rendre chez Charle Chartrand, où vit le négociant Lepailleur, pour la quittance. C’est lors du chemin de retour que les Aunis vont croiser Jean et René Cléroux sur le Chemin du Roy, près de la propriété de Pierre Bourgeois, où le couple sera attaqué de plusieurs coups par les deux frères[50].
Ce cas, qui implique ici quatre lieux différents, se concentre également dans un espace restreint. Tous les lieux mentionnés, que ce soient les résidences ou les lieux de rencontres, sont situés à proximité les uns des autres. Certes, nous ne savons pas exactement la localisation de la demeure des Aunis ni celle des Cléroux, mais le procès nous apprend que ceux-ci habitent la paroisse de Saint-Vincent-de-Paul[51]. Dans ce procès tout comme dans ceux de Pointe-Claire et des faubourgs, les lieux impliqués dans la criminalité rapportée en justice sont limités à l’espace paroissial. La criminalité, qu’elle soit commise en ville ou en campagne, sort très rarement des espaces communautaires.
Figure 8 : Représentation schématique des lieux impliqués dans le procès de voies de fait de Saint-Vincent-de-Paul
Ce constat s’applique également aux lieux de résidences des justiciables qui vivent généralement à proximité des lieux où a été commis le crime rapporté. Cette caractéristique est typique de la criminalité rapportée en justice à Montréal. Dans le procès de vol de volailles, notre cartographie illustre très bien ce faible rapport de distance entre les résidences des accusés et les lieux de vols. Pour l’ensemble des vols, il s’agit de crimes commis dans un rayon de moins d’un kilomètre des deux demeures identifiées. Ce constat s’applique également aux crimes commis en espaces ruraux. Bien évidemment, le rapport de proximité entre les lieux de résidences et les lieux de criminalité n’est pas aussi significatif qu’en ville, notamment pour des questions de densités de population, mais les deux types de lieux sont toujours à une distance de marche. À Pointe-Claire et sur l’île Jésus, les accusés et les plaideurs vivent dans un rayon paroissial qui s’étend, au plus, à cinq kilomètres de l’église paroissiale[52].
Conclusion : le recours à la justice criminelle, une activité concentrée
Nous sommes en mesure de tirer plusieurs conclusions de cette analyse, mais une chose apparait évidente : la criminalité rapportée en justice royale à Montréal se limite à des espaces concentrés. Cette criminalité est avant tout conglomérée au sein de l’espace urbain et des institutions judiciaires de la juridiction. Sous une vision d’ensemble, la criminalité rapportée est une activité surtout urbaine liée à des questions de propriétés privées. Lorsque nous nous intéressons au cas par cas, la disposition spatiale des lieux associés au crime est également très concentrée. Que ce soit en ville ou en campagne, les justiciables ne vivent que très rarement loin du lieu de crime dans lequel ils sont impliqués.
La concentration des lieux de criminalité démontre également l’impact de la centralisation des institutions judiciaires dans la Juridiction royale de Montréal. Cette justice dessert mal les paroisses éloignées de la ville de Montréal ce qui favorise l’émergence d’une justice alternative à la justice royale, plus accessibles à ces communautés rurales. En effet, les habitants des paroisses éloignées qui subissent des préjudices préfèrent sans doute faire appel à des formes de justices auxquels ils sont plus familiers telles la justice seigneuriale, la médiation ou parfois même des formes de vengeances comme il a été observé dans le procès opposant les Cléroux aux Aunis. Ce qu’il faut en conclure, c’est que la justice criminelle royale dessert avant tout les paroisses environnantes à la ville de Montréal.
L’analyse sous une échelle spatiale nous permet donc d’enrichir les connaissances dans le domaine historiographique de la justice pénale moderne et d’en tirer des conclusions qui seraient autrement difficiles à atteindre. En effet, ces tendances observées dans cette analyse ne sont visibles que lorsque différentes couches spatiales sont superposées une par-dessus de l’autre. Faire intervenir l’échelle spatiale permet aux chercheurs d’élargir leur compréhension de la criminalité rapportée en justice et d’offrir des explications plus complètes à des phénomènes, notamment la concentration de la criminalité rapportée au sein des espaces urbains.
Références
[1] Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Archives nationales à Montréal (ci- après ANQM), Fonds Juridiction royale de Montréal, TL4,S1,D4837, 17 mars 1742 – 28 avril 1742, Procès entre Anne Benoît et Baptiste Serre, Michel Ruparon dit Sanspoil et Jean Serre.
[2] Falk Bretschneider, « Spatial turn et histoire de la justice pénale moderne », Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies, vol. 21, n° 2, 2017, p. 306-310.
[3] Le terme « police », lorsqu’il est employé au XVIIe et XVIIIe siècle, désigne la gestion du territoire urbain et non l’institution contemporaine que nous connaissons aujourd’hui.
[4] Catherine Denys, Police et sécurité au XVIIIe siècle dans les villes de la frontière franco-belge, Paris, L’Harmattan, 2002, 432 p ; Catherine Denys, « Logiques territoriales. La territorialisation policière dans les villes au XVIIIe siècle », Revue d’histoire moderne & contemporaine, vol. 1, n° 50, 2003, p. 13-26.
[5] Vincent Milliot, « La “rupture” sans discontinuité ? L’activité des inspecteurs de police, la formation du département de la Sûreté et l’espace policier parisien au XVIIIe siècle », dans Livio Antonielli et Stefano Levati, dir., Tra polizie e controllo del territorio, alla ricerca delle discontinuità : Convegno internazionale di studi, Abbiategrasso, 11-13 septembre 2013, Soveria Mannelli : Rubbettino, 2017 (Stato, esercito e controllo del territorio, 28), p. 167‑195 ; Vincent, Milliot, « Saisir l’espace urbain : mobilité des commissaires et contrôle des quartiers de police à Paris au 18e siècle », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 50, n° 1, 2003, p. 54-80.
[6] André Lachance a surtout mené des études quantitatives sur la justice criminelle. Sa contribution demeure cruciale au développement du domaine d’étude. Voici quelques exemples de ses plus importants travaux : André Lachance, Justice criminelle du roi au Canada au XVIIIe siècle, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 1978, 187 p ; André Lachance, Crimes et criminels en Nouvelle-France, Montréal, Boréal, 1984, 184 p ; André Lachance, Les marginaux, les exclus et l’autre au Canada aux XVIIe et XVIIIe siècles, Montréal, Fides, 1996, 320 p.
[7] John A. Dickinson s’est surtout intéressé à la justice civile. Il a tout de même publié quelques travaux sur la justice pénale : John Alexander Dickinson, « La justice seigneuriale en Nouvelle-France : le cas de Notre-Dame des Anges », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 28, n° 3, décembre 1974, p. 323-346 ; John Alexander Dickinson, Justice et justiciables : la procédure civile à la prévôté de Québec, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 1982, 289 p ; John Alexander Dickinson, « C’est l’eau de vie qui a commis ce meurtre. Alcool et criminalité amérindienne à Montréal sous le régime français », Études canadiennes / Canadian Studies, vol. 35, 1993, p. 83–94.
[8] Jean-Philippe Garneau, « Rendre justice en Nouvelle-France : les voies et les limites de l’obéissance », Bulletin d’histoire politique, vol. 18, n° 1, automne 2009, p. 87-102 ; Jean-Philippe Garneau, « Droit, famille et pratique successorale. Les usages du droit d’une communauté rurale au XVIIIe siècle canadien », thèse de doctorat (histoire), Université du Québec à Montréal, 2003, 404 p ; Jean-Philippe Garneau, « Justice et règlements de conflits dans le gouvernement de Montréal à la fin du régime français », mémoire de maîtrise (histoire), Université du Québec à Montréal, 1995, 243 p.
[9] Josianne Paul, Sans différends, point d’harmonie. Repenser la criminalité en Nouvelle-France, Québec, Septentrion, 2012, 356 p ; Josianne Paul, Exilés au nom du roi : les fils de famille et les faux-sauniers en Nouvelle-France, Québec, Septentrion, 2008, 211 p.
[10] Éric Wenzel, Justice et société coloniales en Nouvelle-France : le procès de l’esclave amérindienne Marie en 1759, Paris, L’Harmattan, 2021, 110 p ; Éric Wenzel, « Les magistrats de Nouvelle-France et le rapt de séduction : juger en droit ou juger en conscience ? », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 73, n° 3, 2020, p. 55-77 ; Éric Wenzel, La justice criminelle en Nouvelle-France (1670-1760) : Le Grand Arrangement, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2012, 168 p.
[11] Jean François Leclerc, « Justice et infra-justice en Nouvelle-France les voies de fait à Montréal entre 1700 et 1760 », Criminologie, vol. 18, n° 1, 1985, p. 25-39.
[12] Jan Grabowski, « The Common Ground: Settled Natives and French in Montréal », thèse de doctorat (histoire), Université de Montréal, 1993, 445 p.
[13] Nathalie Villeneuve, « « La mauvaise herbe »: familles turbulentes à Montréal au XVIIIe siècle », mémoire de maîtrise (histoire), Université de Montréal, 2004, 96 p.
[14] Dhyana Robert, « La contrebande à Montréal, 1729-1752: passages, pratiques et protagonistes », mémoire de maîtrise (histoire), Université de Sherbrooke, 2016, 126 p.
[15] Dominique Deslandres, « L’intimité française avec la » sauvagerie » à Montréal aux 17e-18e siècles », Dix-huitième siècle, n° 52, 2020, p. 101‑118 ; Dominique Deslandres, « Femmes devant le tribunal du roi : la culture judiciaire des appelantes dans les archives de la juridiction royale de Montréal (1693-1760) », Les Cahiers des Dix, n° 71, 2017, p. 35‑63.
[16] Phyllis Lambert et al., Montréal, ville fortifiée au XVIIIe siècle, Montréal, Centre canadien d’architecture = Canadian Centre for Architecture, 1992, 93 p.
[17] Jean-Claude Robert, « Les Sulpiciens et l’espace montréalais », dans Dominique Deslandres, John A. Dickinson et Ollivier Huvert, dir., Les Sulpiciens de Montréal: une histoire de pouvoir et de discrétion, 1657-2007, Montréal, Fides, 2007, p. 155‑178 ; Jean-Claude Robert, Atlas historique de Montréal, Montréal, Libre expression, 1994, 167 p.
[18] Sylvie Freney, « L’émergence des faubourgs de Montréal au XVIIIe siècle », Études canadiennes / Canadian Studies, n° 55, 2003, p. 113‑129.
[19] Colin M. Coates, « The Colonial Landscapes of the Early Town », dans Stéphane Castonguay et Michèle Dagenais, Metropolitan Natures: Environmental Histories of Montreal, Pittsburgh, University of Pittsburgh Press, 2011, p. 19‑36; Colin M. Coates, The metamorphoses of landscape and community in early Quebec, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2000, 248 p.
[20] Alain Laberge et al., Portraits de campagnes. La formation du monde rural laurentien au XVIIIe siècle, Québec, Presses de l’Université Laval, 2010, 155 p.
[21] Dominic Martin, « Un double meurtre à la côte Saint-Joseph : espace et société en milieu périurbain à Montréal au XVIIe-XVIIIe siècle », mémoire de maîtrise (histoire), 2023, 346 p ; Léon Robichaud, « Les lieux de justice à Montréal sous le régime français », dans Raoul Barbe, dir., Le patrimoine bâti judiciaire de Montréal, Montréal, Yvon Blais, 2018, p. 7-22.
[22] Les Pays-d’en-Haut regroupent l’ensemble de la région actuelle des Grands Lacs.
[23] Wenzel, La justice criminelle en Nouvelle-France (1670-1760), p. 159.
[24] Sur la localisation des lieux de justice, voir Robichaud, « Les lieux de justice à Montréal », p. 17.
[25] Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BANQ), Fonds Juridiction royale de Montréal – Archives nationales à Montréal (TL4,S1).
[26] Au total, le fonds compte 136 procès. Quatre procès n’ont tout simplement pas le contenu approprié pour être analysé et manquent cruellement d’informations. Les 38 procès restants sont des procédures menées par des conseils de guerre. Ces procédures militaires sont très intéressantes pour l’analyse spatiale, mais dans le cadre de cet article, nous avons exclu ces procès.
[27] ADHÉMAR, Base de données du Groupe de recherche sur Montréal. Propriété, bâti et population à Montréal, 1642-1805, 15 août 2008, https://remparts.info/adhemar_php/index.html.
[28] Martin, « Un double meurtre », 346 p.
[29] Ce manque de précision peut s’expliquer de diverses façons. D’abord, les lieux détaillés dans les procès criminels sont mentionnés par des locaux qui connaissent généralement très bien le territoire décrit. Ces personnes n’utilisent pas de référents géographiques précis comme ce que feraient des capitaines de navires dans leurs journaux de bord par exemple. L’autre problème provient du fait qu’aucune numérotation des lots n’existe à l’époque. Sans numérotation, il peut être difficile d’identifier clairement la localisation d’une propriété ou d’une terre agricole.
[30] Jacques Mathieu, Alain Laberge, Lina Gouger et Michel Boisvert, L’archipel de Montréal au XVIIIe siècle, Québec, CIEQ, s.d ; Martin, « Un double meurtre », 346 p ; Groupe de recherche sur Montréal, « ADHÉMAR », 15 août 2008, https://remparts.info/adhemar_php/index.html.
[31] Lachance, Crimes et criminels, p. 78.
[32] Dickinson, Justice et justiciables, p. 142-146.
[33] Dickinson, Justice et justiciables, p. 97-98.
[34] Nous avons exclu la paroisse de Saint-Constant, fondée en 1752. Cette paroisse était desservie par la paroisse de La Prairie avant sa fondation.
[35] Louise Dechêne, Le partage des subsistances au Canada sous le Régime français, Montréal, Boréal, 1994, p. 57-58.
[36] Cela vaut surtout pour le transport en charrette ou en traineau. La barque permet de transporter des biens sur une plus longue distance, mais ce mode de transport n’est pas accessible à tous pour des raisons de prix sans oublier que le transport fluvial est inaccessible pour près de la moitié de l’année. Voir: Dechêne, Le partage des subsistances, p. 58.
[37] Le capitaine de milice s’occupe également de la levée des milices et de la réquisition du blé. Voir: Louise Dechêne, Le peuple, l’État et la guerre au Canada sous le Régime français, Montréal, Boréal, 2008, p. 234-235.
[38] Le curé est un informateur essentiel dans sa paroisse de fonction. Il informe les paroissiens des règlements qui sont imposés par le gouvernement tout en informant les autorités d’agitation populaires. À ce sujet voir: Jean-François Lozier, « Les officiers de milice canadiens sous le Régime français : étude institutionnelle et sociale », mémoire de maîtrise (histoire), Université d’Ottawa, 2004, p. 100-101 ; cité dans Marie-Ève Ouellet, Le métier d’intendant en France et en Nouvelle-France au XVIIIe siècle, Québec, Septentrion, 2018, p. 94-95.
[39] Bien que l’historiographie se soit encore peu interrogée sur l’infra-judiciaire dans les paroisses rurales de Montréal, nous savons que Montréal subit un « renforcement des mécanismes infra-judiciaires » au cours de la fin de la période française. Il en ressort une résurgence des ententes conciliatoires, notamment la médiation par notaire ou par homme du clergé. Leclerc, « Justice et infra-justice en Nouvelle-France », p. 38-39 ; Paul, Sans différends, point d’harmonie, p. 138-141.
[40] Nous ne connaissons pas précisément la localisation de la propriété de Saint-Michel dit Sanspoil, mais nous savons, à partir des informations fournies dans le procès, qu’elle est située au Faubourg Saint-Laurent.
[41] Malheureusement, nous n’avons pas été en mesure de géolocaliser la propriété de Borlet.
[42] ANQM, TL4,S1,D5005, 21 novembre 1743 – 8 janvier 1745, Procès contre Jean-Baptiste Serre, fils et Michel Ruparon dit Sanspoil.
[43] ANQM, TL4,S1,D5859, 21 décembre 1753, Procès contre Marie-Louise Baudin et Jean-Baptiste Barra dit Ladouceur.
[44] Ce type de cas illustre notamment ce qui a été mis de l’avant par Ollivier Hubert sur les hiérarchies d’honneur. Les conflits de type « honneur » ont lieu entre personnes de rang ou de classe sociale similaire comme dans cette dispute entre Morant et Perrier. Voir: Ollivier Hubert, « Injures verbales et langage de l’honneur en Nouvelle-France », dans Laurent Turcot et Thierry Nootens, dir., Une histoire de la politesse au Québec. Normes et déviances, XVIIe-XXe siècles, Québec, Septentrion, 2015, p. 50-51.
[45] ANQM, TL4,S1,D6000, 1 avril 1755 – 8 avril 1755, Procès entre [Louis Morant?] et Jacques Perrier.
[46] Mathieu, L’archipel de Montréal au XVIIIe siècle, [s.p.].
[47] Un certain Jean Morand possède une propriété à la côte Saint-Charles en 1731, mais nous ne pouvons pas déterminer si Louis Morant a hérité de la propriété.
[48] La paroisse est l’unité territoriale de base pour les administrateurs de la colonie, mais aussi pour les paroissiens. Bien que les cercles de socialisation puissent s’étendre au-delà de la paroisse, les paroissiens socialisent davantage avec les membres de leur propre paroisse puisqu’ils sont rassemblés lors des activités paroissiales communes, notamment la messe. Au sujet de l’organisation de la paroisse voir: Donald Fyson, « La paroisse et l’administration étatique sous le Régime britannique (1764-1840) », dans Serge Courville et Normand Séguin, dir., La paroisse, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2001, p. 25-27 ; Alain Laberge, « L’implantation de la paroisse dans la vallée du Saint-Laurent aux XVIIe et XVIIIe siècles », dans Courville et Séguin, dir., La paroisse, p. 14-25.
[49] Notre schéma illustre les lieux impliqués et les déplacements menés par les différentes parties décris dans le procès de voies de fait.
[50] ANQM, TL4,S1,D6001, 2 avril 1755 – 19 septembre 1755, Procès entre Félix Aunis, époux de Geneviève Prévost et Jean et René Cléroux. À noter que ce procès va être converti au civil en cours de procédure.
[51] ANQM, TL4,S1,D6001, 2 avril 1755 – 19 septembre 1755, Procès entre Félix Aunis, époux de Geneviève Prévost et Jean et René Cléroux.
[52] À noter qu’il existe quelques rares exceptions à cette tendance dans notre corpus. Bien que les requérants habitent presque systématiquement dans la même paroisse que celle où a été perpétré le crime, dans certains cas, les accusés proviennent de paroisses relativement éloignées. Nous avons retrouvé un exemple : ANQM, TL4,S1,D5537, 8 octobre 1750 – 12 octobre 1750, Procès entre Marie-Jeanne Maurice et Charles Lajeunesse, Jean-Baptiste Parisien, Pierre Poirier dit Desloges et Pierre Ranger.