Dialogue interculturel sino-québécois : le cas des institutions muséales au Québec

Clément Broche

Doctorant en histoire à l’Université du Québec à Montréal et chargé de cours à l’Université de Sherbrooke (UTA)

Min Sun

Maître de langue et professeure de chinois à l’Université du Québec à Montréal

Résumé

La culture, en tant qu’objet de rencontre et de compréhension, offre un espace privilégié pour dépasser les frontières et favoriser le dialogue entre les sociétés. Relevant de l’expérience partagée, les expositions muséales, en particulier, jouent un rôle essentiel dans cette dynamique en permettant au public de découvrir et d’appréhender des cultures différentes, tout en nourrissant une réflexion sur l’altérité et le rapport à l’autre.  

Cet article examine l’évolution du dialogue interculturel sino-québécois au sein des institutions muséales de la province canadienne depuis les années 1980. Il démontre comment la mise en valeur, aussi bien du patrimoine historique que de l’art contemporain chinois, dans les divers musées et autres galeries de la province ces quarante dernières années a contribué à une meilleure compréhension mutuelle, et ainsi participé à l’avancement d’un rapprochement culturel entre la Chine et le Québec.  

La première partie de l’article explore la présence de la Chine impériale dans les expositions au Québec. Elle met en lumière comment de grands événements ont introduit le public de la province à cette histoire en présentant certains éléments essentiels du patrimoine chinois. Ces expositions contribuent à l’avancement d’un dialogue interculturel en sensibilisant le public québécois à la richesse et à la diversité de l’histoire impériale chinoise. 

Dans un second temps, l’article se penche sur l’art contemporain chinois. Il analyse son entrée dans les institutions de la province au tournant des années 2000 et la place toujours plus importante qui lui est consacrée à mesure que certains de ces représentants gagnent en notoriété sur la scène internationale. Traitant des questions de la dissidence et de la dimension politique de certaines de ces œuvres, l’article aborde également les critiques concernant l’exotisation de l’art chinois, ou comment de grandes expositions peuvent refléter certains stéréotypes occidentaux et ainsi mettre en lumière la difficulté d’établir un véritable dialogue interculturel dans un contexte globalisé et mondialisé. 

Malgré ces difficultés, l’analyse démontre que les institutions muséales québécoises occupent une place essentielle dans la construction et l’avancement des relations culturelles que la province entretient avec la Chine. Finalement, l’article s’interroge quant à l’impact du contexte international difficile actuel sur ces relations et appelle à réfléchir à de nouvelles formes de collaboration, ainsi qu’à l’adaptation des stratégies muséales et culturelles pour l’avenir. 

Mots-clés

Chine – Québec – musée – patrimoine – exposition – échange culturel – dialogue interculturel   

 

Introduction

Dans les années 1980, le Canada semble découvrir la diversité des communautés qui compose sa population. En effet, durant cette décennie, le gouvernement fédéral alloue des financements significatifs à de nombreuses recherches consacrées aux minorités ethniques du pays, allant même jusqu’à initier directement certaines de ces études. Faisant partie des différents groupes étudiés, c’est dans ce contexte que sont publiés les ouvrages de référence portant sur la diaspora chinoise[1]. Parallèlement à la multiplication de ces travaux et dans un même effort de souligner l’apport de ces communautés à la société canadienne, les autorités les mettent en valeur, notamment à travers la promotion de leurs cultures respectives dans les institutions muséales du pays. On observe un phénomène similaire à l’échelle régionale à la même période. Au Québec, si les minorités ethniques sont à l’honneur, la province multiplie également les échanges transnationaux axés sur la culture. Parmi les exemples qu’il est possible de mentionner, il y a le cas de la ville de Shanghai qui, après avoir offert 350 penjings en 1980 au Jardin botanique de Montréal[2], établit un jumelage avec la métropole québécoise en 1985[3]. Cette idée d’ouverture sur l’autre et sur le monde qui prévaut à cette époque amène à la création de trois grandes institutions au Québec intégrant toutes le terme de « civilisation » dans leur nom. En 1986 et 1988 ouvrent respectivement le Palais de la civilisation à Montréal (PCM) et le Musée de la civilisation à Québec (MCQ). L’année suivante, en 1989, c’est au tour du Musée canadien des civilisations (MCC) de voir le jour à Gatineau. Alors que les deux premières institutions ont un mandat provincial, le musée de Gatineau relève, lui, du fédéral et est porteur d’objectifs nationaux.

Cette mise en valeur du patrimoine, de l’histoire ou de l’art chinois dans les galeries et musées du Québec est un élément fort des relations sino-québécoises. Le présent article se veut donc une recension de la présence culturelle chinoise dans les institutions de la province depuis les années 1980. À travers deux axes d’étude, consacrés respectivement au patrimoine et à l’art contemporain, et en nous appuyant sur les catalogues des différentes expositions présentées, nous entendons comprendre la place qu’occupe cette présence dans les échanges culturels qu’entretiennent la Chine et le Québec, ainsi que mettre en lumière l’importance de celle-ci dans le cadre plus large des relations sino-québécoises.

L’impératrice Cixi et les Jésuites

En 1888 arrive à Québec un navire chargé de diverses marchandises, dont un lit en provenance de Chine. Abandonné sur les quais, ce dernier finit parmi les objets non réclamés stockés par le port avant d’être vendu à un certain M. Larochelle, alors député du Comté de Dorchester, pour la somme de 300 $. L’histoire nous dit que ce lit aurait appartenu à l’impératrice douairière de Chine, Cixi. Il aurait été emporté par un soldat après le Sac du Palais d’Été, les 7 et 8 octobre 1860, épisode qui met fin à la seconde guerre de l’opium et durant lequel les troupes françaises et britanniques pillent la résidence de villégiature des empereurs chinois. Passant de main en main, ce lit est finalement acquis par les jésuites dans les années 1920 qui, dans le but de faire la promotion de leur mission chinoise de Xuzhou, l’exposent au public québécois dans leur Musée d’Art chinois qu’ils inaugurent en 1931 à Québec[4]. En 1933, le journal Le Devoir explique : « Il ne faudrait pas juger la Chine par ce qu’on en voit en demeurant chez soi […] mais il faut l’aller voir chez elle – et elle est chez elle au Musée Chinois… »[5]. Riches de quelque 3 000 objets et photographies[6], la collection chinoise des jésuites est éparpillée après la fermeture du musée en 1947, avant d’être finalement rassemblée pour être offerte par la congrégation au Musée de la civilisation de Québec (MCQ) en 1990[7].

Exposé d’octobre 1988 à avril 1999, puis de mai 2007 à avril 2008, le lit de Cixi est une parfaite illustration des liens qui peuvent unir histoire chinoise et québécoise. Bien qu’acquis au cours d’un épisode resté tristement célèbre, le parcours singulier de ce dernier – des quais du port de Québec aux collections du MCQ – démontre l’intérêt des Québécois pour la Chine et sa culture. Par ailleurs, en exposant une pièce d’un tel raffinement, les jésuites ont, dès 1931, comme volonté de véhiculer une représentation positive et d’aller à l’encontre de certains clichés et stéréotypes pouvant être présents chez le grand public à l’époque : menace démographique (le « péril jaune »), voleurs de travail associés au vice et à l’immoralité (via un imaginaire autour de l’opium et de la prostitution)[8]… La culture apparait ainsi comme moteur de la rencontre, moyen d’appréhender l’autre par un prisme différent. Tout comme le lit de Cixi et la collection chinoise des jésuites, la multiplication des expositions consacrées à la Chine ces quarante dernières années au Québec sont autant d’occasions pour le public de la province d’aller à la rencontre d’une culture parfois encore trop méconnue.

Une volonté fédérale : le Musée canadien des civilisations à Gatineau

Dans le contexte de mise en valeur des minorités durant les années 1980, se tient pour la première fois au Québec une grande exposition consacrée non pas à la Chine, mais aux communautés chinoises du Canada. C’est à l’initiative du conservateur des collections et études asiatiques du Musée canadien des civilisations à Gatineau (MCC), Ban Seng Hoe, que l’on doit cette dernière[9]. Son intérêt pour la culture des Sino-canadiens, qui se traduit notamment par la publication en 1985 d’un article consacré à la communauté de Québec[10], aboutit à la présentation d’Au-delà de la montagne d’or : la culture traditionnelle des sino-canadiens, au MCC. Comme l’explique Hoe dans l’ouvrage qui accompagne l’exposition, Au-delà de la montagne d’or a pour vocation de présenter les traditions culturelles des immigrants chinois importées au Canada :

Les Chinois appelaient l’Amérique du Nord la Montagne d’or […] Au-delà de la montagne d’or dépasse la vision qui avait d’abord attiré les Chinois au Canada et expose la réalité que les nouveaux venus y ont trouvé et qu’ils ont, finalement, modelée. […] les Chinois du Canada se transmettent un précieux héritage conjuguant de nombreux aspects de la vie canadienne à leurs traditions ancestrales. Au-delà de la montagne d’or fait connaitre certaines de ces traditions culturelles qui, nées en Chine, ont connu un nouvel essor au Canada[11].

Il y a là une volonté affichée d’amener le grand public à la rencontre de la culture des sino-canadiens. L’exposition qui se tient de juin 1989 à avril 1991[12], soit pendant près de deux ans, est une réussite et connait un grand succès. Une dizaine d’années après Au-delà de la montagne d’or, en 2000, l’histoire des communautés canadiennes chinoises fait son entrée de façon permanente au MCC avec l’inauguration d’un espace reproduisant une blanchisserie chinoise, et qui rend hommage au parcours difficile des premiers migrants chinois au Canada[13].

Après s’être intéressé à la minorité sino-canadienne, le MCC propose en 2007, du 11 mai au 28 octobre, une exposition consacrée cette fois-ci à la grande histoire impériale chinoise intitulée, Splendeurs du temps : Trésors du Musée national de Chine. Pour l’occasion, le Musée national de Chine à Pékin prête 120 de ses plus belles pièces, retraçant 4 000 mille ans d’histoire chinoise, au MCC. Si c’est toujours Ban Seng Hoe qui dirige l’exposition[14], cette dernière est le résultat de volontés politiques, fruit de négociations entre gouvernement canadien et chinois :

Ce livre, et l’exposition qui l’accompagne, sont le fruit d’un partenariat forgé entre nos deux musées nationaux […] basé sur notre intérêt commun pour l’histoire de l’humanité, notre engagement envers l’exploration culturelle et notre croyance commune en l’importance du dialogue entre tous les peuples. […] Trésors de la Chine a été élaboré exclusivement pour le MCC. […] L’entente qui a permis cet échange culturel a été signée dans la Grande salle du peuple, à Beijing, en présence du Vice-premier ministre du Canada [Stephen Harper] et du Premier ministre de la République populaire de Chine [Huang Ju]. Les deux gouvernements considéraient cet échange comme un geste d’amitié entre leurs deux pays et un moyen de favoriser une entente mutuelle[15].

L’organisation de Splendeurs du temps illustre parfaitement, au-delà du seul aspect culturel, la dimension politique d’échanges entre institutions muséales chinoises et canadiennes. Volonté de dialogue et de rapprochement, l’exemple de cette exposition met en évidence l’importance et la place des échanges culturels dans les relations sino-canadiennes.

Si le cas du MCC, avec Au-delà de la montagne d’or et Splendeurs du temps, est significatif, il convient néanmoins de souligner le fait que, bien qu’il se trouve au Québec puisqu’à Gatineau, le musée n’en reste pas moins une institution fédérale au mandat national. Situé juste en face la colline du Parlement, de l’autre côté de la rivière des Outaouais, les différentes expositions qu’il propose, comme le démontre l’exemple de Splendeurs du temps, relèvent des volontés d’Ottawa et, à ce titre, mettent l’emphase sur la dimension nationale du musée[16].

Histoire et patrimoine : une Chine millénaire

En février 1986, après une reconversion, l’ancien pavillon de la France et du Québec de l’Exposition universelle de Montréal de 1967 accueille désormais le Palais de la civilisation (PCM)[17]. Après quatre mois de présentation, l’exposition inaugurale consacrée à l’Égypte antique cède sa place en mai à, Chine : Trésors et Splendeurs. Comme pour Splendeurs du temps au MCC, cet événement est le fruit d’une collaboration, non pas cette fois-ci entre Ottawa et la République populaire de Chine, mais entre les autorités chinoises et la ville de Montréal, quelques mois après que la métropole québécoise ait établi un jumelage avec la municipalité de Shanghai. Dans l’ouvrage collectif abondamment documenté qui parait en parallèle de l’exposition, Jean Drapeau, alors maire de Montréal, remercie les institutions et musées chinois, à l’instar de la Société chinoise des Expositions culturelles à l’étranger, d’avoir répondus favorablement aux sollicitations de la Société du PCM[18]. Avec Chine : Trésors et Splendeurs, l’accent est à nouveau mis sur le dialogue interculturel et la rencontre avec l’autre, comme le souligne l’ambassadeur chinois au Canada de l’époque, Yu Zhan : « Je souhaite vivement que cette exposition puisse contribuer à la compréhension mutuelle et à l’amitié des peuples chinois et canadien, et au développement continu des relations entre les deux pays. »[19]. Là encore, les échanges culturels apparaissent comme une composante essentielle des relations sino-canadiennes, avec l’idée développée par le Président de la Société du PCM que l’art n’a pas de frontières : « La générosité de nos amis de la Chine […] nous rappelle avec force que l’art n’a pas de frontières. Cette évidence restera peut-être le plus beau souvenir de cet échange entre la Chine et le Canada. »[20]. Shi Shuqing, directeur de la Société chinoise des Expositions culturelles à l’étranger, semble répondre directement à ces mots dans son avant-propos :

La culture, en effet, n’a pas de frontières. […] En envoyant ces objets d’art et de culture au Canada, nous sommes sûrs que le public fera un accueil particulièrement chaleureux à l’exposition « Chine : Trésors et Splendeurs » et que celle-ci permettra un nouvel accroissement de l’amitié entre les deux peuples[21].

Si toutes ces déclarations vont dans le même sens, celui de l’amitié et du dialogue interculturel, elles sont faites dans un cadre malgré tout plutôt formel de relations internationales et apparaissent finalement relativement convenues. On note par ailleurs que dans ces échanges, l’accent est mis sur la dimension sino-canadienne de ces relations et non sino-québécoise.

Avec Chine : Trésors et Splendeurs, ce sont 130 pièces, toutes inédites au Canada et dont la moitié n’a jamais quitté la Chine, qui sont proposées au public québécois, couvrant une période de 6 000 ans allant du néolithique à la dynastie Qing (1644 – 1912). Parmi les objets exposés, il convient de souligner la présence de cinq guerriers de l’armée en terre cuite extraits du mausolée du premier empereur de Chine, Qin Shi Huangdi (259 – 210 av. J.-C.), ainsi que deux chevaux provenant de l’attelage d’un char[22]. Découverte archéologique majeure du XXe siècle[23], la présentation de ces statues illustre l’importance de cet événement, faisant de Chine : Trésors et Splendeurs, première exposition de son genre au Québec, l’un des temps forts des échanges culturels sino-québécois de la décennie 1980.

Pour voir à nouveau une grande exposition consacrée à la Chine impériale, le public québécois devra attendre plus de quinze ans. Si nous avons déjà évoqué les collections chinoises des jésuites du Canada français que le MCQ acquiert en 1990, l’institution présente, du 5 décembre 2001 au 2 septembre 2002, Xi’an, capitale éternelle. Sous la supervision de Robin Yates, sinologue et professeur d’histoire chinoise à l’Université McGill, et en collaboration avec le Bureau des reliques culturelles de Xi’an et le Musée des guerriers et chevaux en terre cuite des Qin, cette exposition propose de parcourir 2 500 ans d’histoire chinoise, allant de la dynastie des Shang (1570 – 1045 av. J.-C.) à celle des Tang (618 – 907) à travers différentes thématiques : « la vie rituelle (Zhou), l’unification de l’Empire (Qin), l’édification de l’Empire (Han), le bouddhisme (des Han aux Tang) et le cosmopolitisme qui témoigne de l’ouverture du pays à des influences multiples »[24]. Comme pour Montréal en 1986, la tenue de cette exposition fait suite à l’établissement d’un jumelage entre les villes de Québec et de Xi’an quelques mois auparavant, en avril 2001[25]. Ainsi, les 130 objets présentés au public proviennent tous de l’ancienne capitale impériale et de sa périphérie. Une fois de plus, la concrétisation de volontés de rapprochement et d’ouverture par le biais de tels échanges culturels témoigne de leur importance dans le cadre des relations sino-québécoises. Robin Yates explique que cinq voyages en Chine ont été nécessaires à son équipe pour réaliser la sélection des artéfacts et négocier les modalités de prêt avec leurs homologues chinois[26]. Lors de l’inauguration de l’exposition, pas moins de 70 représentants de la ville de Xi’an font le déplacement à Québec[27].

Pour mettre encore plus en avant l’événement qu’est la tenue de Xi’an, capitale éternelle, le MCQ organise en parallèle deux autres expositions. La première, Xi’an contemporaine, propose des clichés du photographe québécois Michel Boulianne « présentant des scènes de la vie contemporaine de la ville de Xi’an et de ses environs »[28]. La seconde, Jade, trésor suprême de la Chine ancienne, qui ne débute que le 8 mai 2002, présente 120 objets en jade, jamais exposés hors de Chine, allant des débuts du néolithique chinois (7 000 av. J.-C.) à la fin de la dynastie Qing au XXe siècle[29].

Tout comme Chine : Trésors et Splendeurs quinze ans auparavant, Xi’an, capitale éternelle est un succès puisqu’elle attire 300 000 visiteurs durant les neuf mois où elle est présentée[30], et comme pour l’événement de Montréal : « Les vedettes de l’exposition, ce sont les soldats en terre cuite de la dynastie de Qin. »[31]. En 2011, du 11 février au 26 juin, c’est donc au tour de ces fameux soldats d’être à l’honneur au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) avec une exposition qui leur est entièrement consacrée, L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite. Alors que cinq statues avaient été présentées en 1986 et 2001, ce sont cette fois-ci huit personnages que le public a la possibilité d’admirer. Ces derniers ne sont d’ailleurs pas tous des soldats puisqu’on compte parmi eux un fonctionnaire, ainsi qu’un acrobate. Deux des 520 chevaux qui composent l’armée sont également exposés. 250 objets provenant de 15 institutions de la province du Shaanxi – lieu où se trouve le site de la nécropole de Qin Shi Huangdi – complètent l’exposition et entourent ces dix statues pour les mettre en contexte[32]. Autour de trois axes, traitant respectivement de la montée en puissance du royaume de Qin durant la période des Zhou orientaux (771 – 256 av. J.-C.), du règne de la dynastie Qin (221 – 207 av. J.-C.), et enfin, de celle qui lui succède, la dynastie Han (206 av. J.-C. – 220 apr. J.-C.), le visiteur se familiarise avec cette époque fondatrice à bien des égards pour la civilisation chinoise.

Exposition d’envergure, L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite est organisée à l’échelle nationale, dans le cadre d’une tournée canadienne. Débutée à Toronto en 2010, c’est à Montréal que cette dernière poursuit donc sa route en 2011, avant de passer par Calgary et Vancouver en 2012. C’est le Musée royal de l’Ontario qui a la charge de superviser la tournée. L’exposition de Montréal est donc le résultat d’une collaboration entre cette institution et le MBAM. Dans ses mots de bienvenue qui ouvrent le catalogue de l’exposition, la directrice du musée québécois, Nathalie Bondil, met l’accent à plusieurs reprises sur le caractère exceptionnel de cette dernière :

L’exposition L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite offre une occasion extraordinaire de connaître la Chine et sa culture. […] Cette découverte archéologique, l’une des plus importantes dont l’humanité a été témoin, n’a d’égale que la mise au jour de la tombe de Toutankhamon en Égypte. […] Cette exposition représente pour le public montréalais une occasion unique de prendre toute la mesure du rêve grandiose du Premier Empereur de Chine[33].

Une nouvelle fois, avec L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite, l’histoire chinoise vient à la rencontre du public québécois, participant ainsi une fois de plus à un rapprochement avec l’autre et à une meilleure compréhension culturelle.

Par ailleurs, outre cette exposition majeure, le MBAM possède également une importante collection d’art chinois, puisque composée d’environ 1 000 objets allant de l’époque néolithique à la période contemporaine. C’est à un certain Cleveland Morgan, conservateur bénévole de la collection d’arts décoratifs du Musée de 1916 à 1962, que l’institution doit l’acquisition d’une grande partie de cette collection, constituée à son initiative, durant les années de son mandat[34]. Depuis 2019, le MBAM a repensé sa façon de présenter ses collections, dites de cultures du monde. Depuis cette date, le quatrième étage du pavillon Jean-Noël Desmarais est désormais consacré à un espace nommé Arts du Tout-Monde. C’est ici, parmi les 1 500 objets exposés, que le public peut admirer 179 artefacts issus de la collection chinoise du musée dans une salle qui lui est dédiée[35]. Enfin, dans un cabinet de curiosité reconstitué, les visiteurs du MBAM ont également la possibilité de voir quelques superbes pièces de porcelaine Ming. Cet espace renvoie à une époque où « l’Orient » faisait rêver l’Europe, et où cette curiosité pour des objets en provenance du bout du monde et jugés « exotiques » donna ce terme inusité, très vague et généraliste, de « chinoiserie », pour qualifier toute la production artistique et artisanale venue d’Extrême-Orient[36].

Après L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite en 2011, c’est en 2016 et 2017 que le public québécois a pu pour la dernière fois visiter une exposition mettant l’histoire impériale chinoise à l’honneur. En revanche, comme le laisse à penser son nom, Terre d’Asie, qui s’est tenue du 17 novembre 2016 au 19 mars 2017 à la Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal, Pointe-à-Callière, n’avait pas pour seul objet la Chine, bien qu’une grande partie de l’exposition lui soit consacrée.

Sam et Myrna Myers, couple d’Américains ayant passé leur vie à Paris, ont constitué pendant plus de cinquante ans une incroyable collection privée riche de quelque 5 000 pièces dédiées à l’Asie de l’Est. Avec Terre d’Asie, ce sont 400 objets issus de cette collection qui sont présentés au public québécois. Quatre thèmes sont traités par l’exposition : « magie du jade, mille ans de bouddhisme, un océan de porcelaine, costumes et coutumes. »[37]. Les sections sur le jade et la porcelaine sont entièrement consacrés à la Chine, alors que les deux autres proposent également des artefacts du Vietnam, de la Corée et du Japon. Si Terre d’Asie n’aborde donc pas uniquement la Chine et qu’elle n’est pas le résultat d’une collaboration entre institutions chinoises et québécoises, sa fonction reste cependant la même que celle des différentes expositions présentées précédemment. Elle a en effet pour but d’emmener à la rencontre de l’autre, à travers son histoire et sa culture. Cette dimension de la découverte est soulignée par la directrice de Pointe-à-Callière, Francine Lelièvre, en ces termes :

Terre d’Asie nous convie à la découverte d’un monde lointain, empreint d’insolite et de merveilleux. […] Au passage, nous croisons des personnages qui dévoilent quelques secrets de leur savoir-faire, de leurs croyances et de leur art de vivre. […] La rareté, la qualité et la variété des œuvres de cet ensemble […] constituent une proposition inédite pour appréhender l’histoire de l’Asie de l’Est[38].

Ainsi, avec Terre d’Asie, le public québécois peut une fois de plus aller à la rencontre de cette culture chinoise millénaire, permettant de mieux la comprendre et l’appréhender, et participant, par extension, de l’avancement des relations sino-québécoises.

Depuis plus d’une trentaine d’années maintenant, l’histoire et le patrimoine chinois ont su se faire une place de choix dans les musées québécois. De façon en revanche peut-être un peu plus surprenante, il est intéressant de constater que ces mêmes institutions n’en ont pas pour autant délaissé un autre aspect culturel majeur qu’est l’art contemporain et le travail des artistes chinois de notre temps.

Art contemporain : transgression et subversion

Si la première grande exposition au Québec consacrée à l’histoire chinoise se tient en 1986 au PCM, il faut attendre la décennie suivante pour voir arriver l’art contemporain chinois dans les institutions de la province. En 1996, c’est l’artiste Chen Zhen qui le premier a les honneurs du Centre international d’art contemporain de Montréal (CIAC). Pendant deux mois, du 5 octobre au 24 novembre, l’institution propose au public une installation gigantesque du sculpteur et plasticien intitulée Daily Incantations : « Daily Incantations en impose. Elle domine l’espace. […] N’y pénètre pas qui veut. »[39]. Non sans volonté d’interpeller le visiteur, comme le veut souvent l’art contemporain, cette dernière se compose notamment d’un assemblage de 101 pots de chambre chinois.

Dans le livre publié pour accompagner l’installation, la direction du CIAC explique vouloir « donner la parole et le geste à des artistes qui, par leurs œuvres, relèvent la mixité du monde actuel et la complexité de ses références culturelles. »[40]. Il y a là, derrière le fait de présenter un artiste chinois, une volonté affichée d’instaurer un dialogue interculturel, démarche qui apparait comme une évidence au milieu des années 1990, dans une période où la mondialisation s’impose à l’ensemble de la planète. Pour autant, un tel exercice n’est pas sans soulever questions et difficultés. Sur ce point, discutant du concept de transexpérience théorisé par Chen Zhen, Claude Gosselin, le directeur du CIAC, explique :

Le concept de transexpérience soulève la question de la compréhension et de l’harmonisation culturelles. En fait, cette question est critique pour la mondialisation. […] Chen Zhen reconnaît que l’incompréhension culturelle est inéluctable. Elle est inhérente à la coexistence des cultures. Le défi réside dans la manière de la négocier et dans ce que nous inventerons pour arriver à une coexistence plus harmonieuse[41].

Ici, Claude Gosselin relève une problématique intrinsèquement liée à la question des échanges culturels. Ainsi, plus encore peut-être que pour des expositions consacrées à l’histoire de la Chine, le choix d’institutions québécoises, à l’instar du CIAC, de présenter des artistes chinois apparait comme un véritable parti pris engagé, celui du dialogue interculturel à l’heure de la globalisation.

Après Daily Incantations, il faut attendre une longue période de quinze ans pour voir le retour de l’art contemporain chinois au Québec. En revanche, cette fois-ci il ne s’agit non plus de présenter une œuvre unique, mais bien de consacrer une exposition complète à des artistes chinois désormais émergeant sur la scène internationale. Du 3 mars au 19 juin 2011, le MBAM propose à ses visiteurs : Drapeau rouge, art contemporain chinois dans les collections montréalaises. Comme son nom l’indique, l’exposition regroupe pour la première fois dans un même lieu, un ensemble d’œuvres qui ont toutes pour point commun de provenir de collections montréalaises, qu’elles soient publiques ou privées. Parmi les artistes à l’honneur, certains – tels les frères Gao, Chen Jiagang ou encore Zhang Huan – font partie des plus en vue de la scène internationale. Dans son communiqué de presse, l’institution met l’accent sur la dimension inédite de l’événement et justifie de la nécessité d’une telle exposition :

Il s’agira de la première exposition consacrée par un musée québécois à l’art contemporain chinois dont l’expansion récente constitue l’un des phénomènes les plus remarquables de la scène mondiale de l’art des dix dernières années […] En 2001, un seul Chinois figurait dans la liste des cent artistes les plus « cotés » du monde, en 2009, ils étaient vingt-cinq[42].

Cet extrait éclaire une partie des enjeux autour de Drapeau rouge. Outre la volonté du MBAM de mettre en lumière le travail d’artistes chinois, l’explosion de ces derniers sur la scène internationale est un phénomène tel que l’institution ne semble pouvoir l’ignorer. Alors que l’on ne peut que saluer une fois de plus une telle initiative participant du dialogue interculturel sino-québécois, certains s’interrogent néanmoins quant au contexte de globalisation qui entoure ces échanges, à l’instar de Julie Alary Lavallée, conservatrice des collections du Musée d’art de Joliette :

Dans l’ensemble, l’exposition met l’accent sur la prise de position politique et le rôle dénonciateur que joue l’art contemporain chinois. […] elle véhicule néanmoins un point de vue accroché aux clichés du regard occidental qui « exotise » les pays « en émergence ». Cette perspective […] recentralise les discours périphériques dans un cosmopolitisme esthétique qui prétend représenter « démocratiquement » toutes les cultures dans les grands musées du monde. Ce nouvel internationalisme, favorisé par le système de l’art au sein duquel s’inscrivent les collectionneurs privés autant que les institutions culturelles québécoises, finit par uniformiser l’art, ici sous l’étiquette d’une origine culturelle commune, sans présenter les nuances propres à chaque œuvre[43].

Julie Alary Lavallée poursuit ici, sans pour autant remettre en cause les intentions des organisateurs de tels événements, des réflexions amorcées déjà quinze auparavant par Chen Zhen à travers son concept de transexpérience.

Enfin, concernant Drapeau Rouge, la temporalité de l’événement est essentielle à considérer. En effet, l’exposition se tient au MBAM de mars à juin 2011, alors que l’institution présente en parallèle L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite. Loin d’être fortuite, cette concomitance est une volonté du conservateur de l’art contemporain au MBAM, Stéphane Aquin, qui, profitant de l’engouement autour de l’exposition consacrée aux soldats en terre cuite, souhaite mettre en valeur le travail des artistes contemporains chinois auprès du grand public, souvent encore profane en la matière. Ainsi, avec Drapeau rouge, art contemporain chinois dans les collections montréalaises et L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite, la culture chinoise, dans ses formes diverses, est à l’honneur au MBAM durant la première moitié de l’année 2011. Avec cette double exposition, l’institution marque ici sa volonté de participer activement à l’avancement du dialogue interculturel et des relations sino-québécoises.

À Drapeau rouge succède deux ans plus tard, Coup de foudre chinois. Présentée à l’Arsenal de Montréal du 31 janvier au 15 juin 2013, cette exposition propose une cinquantaine d’œuvres d’« artistes reconnus […], véritables stars du marché de l’art et de talents en devenir. »[44]. Ainsi, aux côtés des frères Gao ou de Zhang Huan déjà présents lors de Drapeau Rouge, on trouve d’autres grands noms tels He Yunchang ou Qiu Jie, mais aussi de jeunes artistes comme Wu Junyong ou Han Bing[45].

Centre d’art contemporain privé qui ouvre ses portes en 2011, l’Arsenal occupe les locaux des anciens chantiers navals du canal Lachine, dans le quartier de Griffintown. Après d’importants travaux qui lui permettent de doubler sa superficie, le centre inaugure au début de l’année 2013 un nouvel espace ayant pour vocation d’accueillir des expositions d’envergure internationale[46]. C’est Coup de foudre chinois qui la première a les honneurs de celui-ci, permettant par là même à l’Arsenal d’acquérir une véritable dimension muséale : « L’Arsenal ouvre ce jeudi un autre chapitre de sa jeune histoire. Celui des espaces encore plus vastes et des expositions de classe muséale. Ça débute par une plongée dans l’art contemporain chinois, comme jamais vu au Québec. »[47]. Comme le titre l’article du Devoir d’où est tirée cette citation, avec Coup de foudre chinois, l’accent est mis sur la dissidence et la dimension subversive des artistes présentés. C’est même ce qui semble constituer le fil conducteur, le dénominateur commun à l’ensemble des œuvres proposées dans le cadre de l’exposition, comme le souligne Florence-Agathe Dubé-Moreau :

La charge politique et historiciste de l’échantillonnage pluridisciplinaire s’impose rapidement au regard du visiteur […] Comme un fil rouge, elle traverse les œuvres […] et dévoile les multiples facettes de la problématique sociale et culturelle chinoise. Même si les œuvres ne paraissent pas de qualité d’exécution égale, la gravité et l’urgence de leur message éclairent le public québécois sur la pertinence de cette exposition[48].

Ainsi, on ne peut que relever la dimension politique d’œuvre telle que celle des frères Gao. Intitulé Miss Mao No. 3, leur immense buste de deux mètres et demi de haut entièrement chromé propose « un Mao démonisé par des incisives vampiriques, féminisé par la généreuse poitrine d’une jeune femme et ridiculisé par un nez de Pinocchio qui révèle l’ampleur du leurre communiste. »[49]. Par ailleurs, comme avec les deux expositions auxquelles le public québécois a déjà pu assister en 1996 et 2011, la mondialisation est à nouveau interrogée dans Coup de foudre ; tantôt de façon critique, comme avec les toiles de Qui Jie qui « rendent explicite la confusion iconographique et identitaire qu’une mondialisation excessive impose à la population nationale[50] » ; tantôt de façon positive, comme lorsque que Gu Wenda propose un drapeau américain réalisé à l’aide de cheveux de personnes originaires des quatre coins de la planète qui se veut une réflexion « sur la mondialisation et le souhait d’une société globale. »[51]. Ainsi, avec Coup de foudre, l’art contemporain chinois apparait dans toute sa singularité, mais aussi son ambiguïté vis-à-vis du pouvoir politique et des autorités. Objet de subversion et de contestation souvent porteur d’un discours critique à l’endroit du régime, il est également l’une des composantes fortes de son soft power, participant du rayonnement culturel chinois sur la scène internationale. À nouveau, cette ambivalence est soulignée par Florence-Agathe Dubé-Moreau :

[…] projet ambitieux réunissant plusieurs artistes qui jouissent d’une célébrité internationale proportionnelle au degré de controverse qu’ils suscitent dans leur pays. […] Coup de foudre chinois ne constitue que la deuxième entreprise d’envergure au Québec visant à offrir une vitrine enviable à ces artistes dont le travail se trouve, aux yeux du gouvernement chinois, dans une zone nébuleuse entre outils stratégiques de promotion culturelle et armes de perversion ou de potentielle souveraineté individuelle[52].

Lorsqu’il est question de dissidence et d’art contemporain en Chine, un nom vient immédiatement à l’esprit, celui d’Ai Weiwei. Artiste chinois probablement le plus connu du grand public, il a depuis une quinzaine d’années maintenant acquis un statut de véritable superstar à l’échelle internationale. Tout à la fois sculpteur, photographe ou encore architecte (il collabore, au titre de conseiller artistique, avec le cabinet suisse Herzog & de Meuron à l’élaboration des plans du « Nid d’Oiseau », le stade olympique de Pékin inauguré en 2008), il se fait connaitre aussi bien par son art, que par ses prises de position engagées et critiques à l’endroit du régime communiste chinois et des autorités[53].

C’est en 1994, alors que l’artiste est loin de bénéficier de la notoriété dont il jouit aujourd’hui, qu’Ai Weiwei rentre pour la première fois dans une institution muséale québécoise. Le MBAM acquiert en effet cette année-là une œuvre intitulée Seven Frames, série de sept clichés fragmentant en autant de morceaux un portrait plein-pied d’un jeune soldat chinois montant la garde place Tian’anmen[54]. Intégrant les collections permanentes du musée, c’est donc très tôt que le public québécois à la possibilité d’entrer en contact avec ce qui peut être encore à l’époque considéré comme une avant-garde artistique chinoise. Seven Frames fait d’ailleurs partie des œuvres que le MBAM expose en 2011 à l’occasion de Drapeau rouge, art contemporain chinois dans les collections montréalaises[55].

L’année suivante, du 24 mai au 3 septembre 2012, le Musée d’art contemporain de Montréal (MACM) propose une exposition sur le thème de l’animal et l’animalité, intitulée Zoo. Parmi les 20 artistes présentés, québécois et internationaux, Ai Weiwei joue le rôle de tête d’affiche, l’institution le mettant largement en avant dans ses communications, comme l’atteste la page d’accueil en ligne de l’événement : « […] en grande première au Canada, The Circle of Animals/Zodiac Heads : Gold de l’artiste et dissident chinois Ai Weiwei. »[56].

Composée de douze têtes patinées d’or représentant les animaux du zodiaque chinois, cette installation se veut une « réinterprétation d’une œuvre décorative célèbre dessinée au XVIIIe siècle par le jésuite italien Giuseppe Castiglione, sur la demande de l’empereur Qianlong »[57]. Sculptée par la suite et intégrée à une immense horloge à eau exposée dans les jardins du Palais d’Été, l’œuvre originale sera pillée au cours du sac de 1860. L’installation d’Ai Weiwei fait donc ici écho à l’épisode du lit de Cixi, point de départ de notre réflexion lui aussi dérobée lors de ce même événement. À travers elle, il « repositionne les liens historiques de la culture chinoise avec l’Occident[58] », tout comme la présentation du lit de l’impératrice douairière par les jésuites dans leur Musée chinois afin de faire la promotion de leur mission de Xuzhou, puis par le MCQ, permet de le faire à l’échelle des relations sino-québécoises.

Présent au MBAM en 2011, Ai Weiwei est en revanche absent à l’Arsenal en 2013 lors de Coup de foudre chinois. S’il n’a en effet aucune de ses œuvres exposées, il semble en revanche dans toutes les conversations, notamment du fait de la sortie quelques semaines auparavant de son « petit livre noir en riposte au rouge de Mao[59] », Weiwei-isms :

Vedette dissidente chinoise s’il en est une, Ai Weiwei est étonnamment présent uniquement par allusion entre les murs de l’Arsenal. La parution de son dernier livre, Weiwei-isms (2012), a effectivement été soulignée sans l’artiste à l’occasion du vernissage de l’exposition, et on retrouve son visage reproduit par impression sur des bikinis de papier habillant sommairement une centaine de jeunes femmes dans l’œuvre photographique Ai Wei Wei Swimsuit Print (2011) de He Yunchang[60].

Après Zoo, il faut attendre dix ans pour que l’artiste, désormais exilé depuis 2015, fasse son retour au Québec. En effet, à l’été 2022, à l’occasion de la 9e édition de l’exposition d’art public Passages insolites, Ai Weiwei revient cette fois-ci non pas dans une institution muséale montréalaise, mais directement à la rencontre du public québécois, dans les rues de la capitale provinciale. Pour l’occasion, il reprend une partie de son installation Life Jackets présentée pour la première fois en 2016 à Berlin.

Fin 2015, Ai Weiwei se rend sur l’île grecque de Lesbos alors aux prises avec un afflux de migrants fuyant la Syrie en guerre. Là, il ramasse sur les plages de l’île quelque 14 000 gilets de sauvetage abandonnés derrière eux par les réfugiés et les fait assembler le long des colonnes du Konzerthaus, célèbre édifice berlinois néoclassique, pour alerter sur la crise migratoire et la condition de ces populations[61]. Du 25 juin au 10 octobre 2022, ce sont donc 2 000 des gilets qui composent l’œuvre originale qui sont installés sur les remparts de la Batterie royale, située dans le quartier du Petit Champlain.

Sans doute peut-on voir là l’aboutissement d’un long processus. Avec Life Jackets, après près de quarante ans de présence dans les différents musées et autres galeries de la province, l’art et la culture chinois sortent finalement des institutions pour investir l’espace public et venir directement à la rencontre des Québécois. Amorcé en 1986 avec l’exposition Chine : Trésors et Splendeurs au PCM, le dialogue interculturel entre la Chine et le Québec n’a cessé depuis de se développer grâce aux nombreuses expositions consacrées tantôt au patrimoine et à l’histoire, tantôt à l’art contemporain chinois. La multiplication de tels échanges amenant toujours davantage à la rencontre de l’autre, ils permettent que celui-ci nous soit finalement de moins en moins étranger. Cette capacité à rapprocher se trouve quasi systématiquement mise en avant dans les diverses sources dont nous disposons (catalogues, communiqués de presse, critiques d’expositions…), faisant ainsi apparaitre les échanges culturels entre la Chine et le Québec dans les institutions muséales de la province comme l’un des éléments forts des relations sino-québécoises.

Conclusion : Quel avenir pour la Chine dans les musées québécois ?

L’augmentation des tensions dans les relations sino-canadiennes ces dernières années, dues notamment à des épisodes, en autres, comme celui de l’affaire Huawei[62], amène à s’interroger quant au devenir des échanges culturels entre la Chine et le Québec. Si l’on constate qu’un artiste comme Ai Weiwei présentait encore il y a trois ans dans les rues de la capitale provinciale l’une de ses œuvres, il convient de considérer que ce dernier est un dissident, désormais en exil, opposé au régime chinois actuel. Une exposition d’envergure internationale comme a pu l’être en 2011 L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite, nécessitant une coopération avec des institutions muséales chinoises, serait-elle encore envisageable aujourd’hui, dans le contexte des relations sino-canadiennes qui prévaut actuellement ? Peut-on imaginer (ou espérer) que la culture puisse échapper à des considérations d’ordre politiques ? S’il semble difficile de répondre par l’affirmative, peut-être faut-il envisager une présence culturelle chinoise différente de ces grandes expositions qu’ont pu être L’empereur guerrier de Chine et son armée de terre cuite, mais aussi, Splendeurs du temps : Trésors du Musée national de Chine, Chine : Trésors et Splendeurs ou encore Xi’an, capitale éternelle. L’exposition Terre d’Asie par exemple illustre parfaitement la façon dont des collections privées peuvent venir pallier des carences dans les relations internationales. L’art contemporain est lui aussi sans doute une alternative à envisager, puisque souvent le fait d’artistes dissidents. Enfin, la question de la diaspora et des populations sino-canadiennes est également à considérer. À cet égard, le cas de l’artiste sino-montréalaise Karen Tam est un parfait exemple. Exposé dans toute l’Amérique du Nord, ainsi qu’en Chine et en Europe, son travail cherche « à influencer les perceptions occidentales des Chinois ou de l’Autre[63] » en mettant à l’honneur l’héritage culturel des Canadiens chinois. Sa démarche s’inscrit ainsi parfaitement dans le cadre d’un dialogue interculturel, dialogue qu’elle contribue à porter non pas seulement dans les grands centres urbains du Québec, mais dans l’ensemble de la province, en présentant son travail dans de nombreuses villes comme Rimouski, Sherbrooke, Trois-Rivières, Longueuil, Saint-Hyacinthe ou encore Saint-Jérôme[64]. Dans un article qu’il consacre à l’exposition Avaler les montagnes, toujours présentée au Musée McCord Stewart de Montréal au moment où nous écrivons ces lignes, le journaliste Éric Clément explique :

En ces temps de tensions entre le Canada et la Chine, une exposition qui aborde les conditions de vie des Québécois d’origine chinoise est une bonne occasion de réfléchir à notre histoire […] C’est sans doute la réussite de cette expo, mais aussi du travail artistique inlassable de Karen Tam depuis 20 ans : nous permettre de faire une distinction entre la politique internationale et la richesse de notre diversité[65].

Références

[1] Chan Kwok Bun, Smoke and Fire: The Chinese in Montreal, Hong Kong, The Chinese University Press, 1991, 330 p. ; Harry Con, De la Chine au Canada : histoire des communautés chinoises au Canada, Ottawa, Secrétariat d’État du Canada, Division multiculturalisme, 1984, 375 p. ; Denise Helly, Les Chinois à Montréal, 1877-1951, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1987, 315 p. ; David Chenyuan Lai, Chinatowns: Towns Within Cities in Canada, Vancouver, University of British Columbia Press, 1988, 347 p. ; Peter Li, The Chinese in Canada, Toronto, Oxford University Press, 1988, 164 p. ; Jin Tan et Patricia E. Roy, Les Chinois au Canada, Ottawa, Société historique du Canada, 1985, 24 p.

[2] Jacques Besner, « Point de vue montréalais sur une relation privilégiée : Montréal et Shanghai », Bulletin d’histoire politique, vol. 22, no 1, 2013, p. 194. Peu connus en Occident, les penjings sont l’équivalent chinois des bonzaïs japonais. En 1984, le Jardin botanique de Montréal ouvre un espace nommé « Jardin céleste » pour exposer les 350 penjings de Shanghai.

[3] Ibid., p. 196. Le jumelage est signé par les maires Jean Drapeau et Wang Daohan le 14 mai 1985.

[4] Serge Granger, Le lys et le lotus : Les relations du Québec avec la Chine de 1650 à 1950, Montréal, VLB éditeur, 2005, p. 21.

[5] Flavie Luce, « Les travaux féminins, Chine », Le Devoir, 3 novembre 1933, p. 5, cité dans : Shenwen Li et Samuel C. Fleury, « La revue missionnaire Le Brigand et les jésuites canadiens-français en Chine pendant la première moitié du XXe siècle », dans Guy Poirier (dir.), Textes missionnaires dans l’espace francophone – Tome 2, L’envers du décor, Québec, Presses de l’Université Laval, 2018, p. 141.

[6] Vincent Giguère, « Les collections chinoises des jésuites du Canada français – Souvenirs de missions dans l’Empire du Milieu », Musée de la civilisation, en ligne, https://collections.mcq.org/carnets/les-collections-chinoises-des-jsuites-du-canada-franais (8 septembre 2022).

Au-delà d’un racisme populaire présent au sein des populations canadienne et québécoise, ce dernier revêt un caractère systémique avec l’adoption par le gouvernement fédéral en 1885 de la « Loi sur l’immigration chinoise », puis en 1923 de la « Loi sur l’exclusion des Chinois ».

[7] S. Granger, op. cit., p. 21.

[8] Samuel C. Fleury, Le financement canadien-français de la mission chinoise des Jésuites au Xuzhou de 1931 à 1949, mémoire de M.A. (histoire), Université Laval, Québec, 2014, p. 65.

[9] Ban Seng Hoe, Au-delà de la montagne d’or : la culture traditionnelle des sino-canadiens, Gatineau, Musée canadien des civilisations, 1989, p. 47. En 2012, le Musée canadien des civilisations est renommé Musée canadien de l’histoire.

[10] Ban Seng Hoe, « Chinese Community and Cultural Traditions in Quebec City », Ethnologies, vol. 7, no 1/2, 1985, p. 95-110.

[11] B. S. Hoe, op. cit., p. 7.

[12] Auparavant situé à Ottawa, le MCC emménage dans ses locaux actuels à Gatineau en 1989. Au-delà de la montagne d’or est donc exposé dès la réouverture du musée après son déménagement en juin 1989.

[13] Sur cet espace que l’on doit là encore à Ban Seng Hoe, voir : Ban Seng Hoe, Enduring Hardship : The Chinese Laundry in Canada, Gatineau, Musée canadien des civilisations, 2003, 86 p. Sur la question spécifique des blanchisseries chinoises à Montréal à la fin du XIXe siècle, voir : Denise Helly, « Les buandiers chinois de Montréal au tournant du siècle », Recherches sociographiques, vol. 25, no 3, 1984, p. 343-365. Dans un article publié en 2005, Thierry Ruddel critique la mise en valeur des minorités ethniques par les institutions muséales canadiennes en utilisant précisément l’exemple de la blanchisserie chinoise du MCC. S’il reconnait les intentions louables des conservateurs, il fait le constat que ce type de représentation entretient malgré tout certains stéréotypes : Thierry Rudel, « Musées « civilisants » du Québec et du Canada : les enjeux politiques et publics », Culture & Musées, no 6, p. 158-159.

[14] Toujours en poste en 2007, Ban Seng Hoe intègre les équipes du MCC dès 1974 pour y fonder le Programme sur l’Asie et le Moyen-Orient.

[15] Lu Zhangshen (directeur du Musée national de Chine) et Victor Rabinovitch (directeur du Musée canadien des civilisations) dans : Ban Seng Hoe, Splendeurs du temps : Trésors du Musée national de Chine, Gatineau, Musée canadien des civilisations, 2007, p. 5.

[16] Dans son article déjà cité précédemment, Thierry Rudel discute de la question des mandats et des publics respectivement visés – et qui différent – des deux musées dédiés aux civilisation(s) à Gatineau et à Québec : T. Rudel, loc. cit., p. 156-165.

[17] Le Palais de la civilisation cesse son activité en 1993 et cède l’ancien pavillon de la France et du Québec au Casino de Montréal qui s’y trouve toujours actuellement.

[18] Yang Yang et al., Chine : Trésors et Splendeurs, Paris, Arthaud, 1986, p. 11. Sur l’exposition, voir également la rétrospective proposée par Peter Swann, directeur du Musée Seagram à Waterloo et historien et critique d’art dans la revue Vie des arts : Peter Swann, « 5 000 ans d’art chinois / 5 000 years of Chinese Art », Vie des arts, vol. 31, no 123, p. 30-36.

[19] Yu Zhan, dans : Y. Yang et al., loc. cit., p. 9

[20] Jean-Paul Gourdeau, dans : Ibid., p. 10

[21] Shi Shuqing, dans : Ibid., p. 13.

[22] Ibid., p. 62-68.

[23] Découverte accidentellement en 1974, la nécropole de Qin Shi Huangdi est un site démesuré s’étalant sur environ 100 km2. Les fouilles de ce dernier ont révélé différentes fosses contenant une véritable armée de soldats en terre cuite composée de statues à échelle réelle. On estime aujourd’hui la composition totale de l’armée (pour des questions de conservation, seule une partie du site a été exhumé) à : 8000 soldats, 130 chars, 520 chevaux et 150 chevaux montés par des cavaliers.

Sur l’armée en terre cuite, voir : Tianchou Fu, L’armée en terre cuite de l’empereur Qin Shi Huang, Beijing, Éditions du nouveau monde, 1988, 112 p.

[24] Lise Montas, « 130 Trésors de Chine à Québec », Le Médecin du Québec, vol. 37, no 7, 2002, p. 108.

[25] Le jumelage est signé le 16 avril 2001 par les maires Jean-Paul L’Allier et Feng Xuchu. Par ailleurs, toujours dans le cadre de ce jumelage, mais aussi pour rendre hommage à l’ancien quartier chinois qui s’y trouvait, la ville de Québec renomme en 2006 une rue du quartier St-Roch en rue de Xi’an.

[26] Jules Nadeau, « Xi’an, capitale éternelle : un coup de maître du Musée de la civilisation », La presse, 7 janvier 2002, p. 6. Dans cet article, Robin Yates explique également que les délais serrés dont ils disposaient pour mettre en place l’exposition n’ont pas permis, à son grand regret, la production d’un catalogue.

[27] Ibid.

[28] Musée de la civilisation, Rapport annuel 2002-2003, p. 10.

[29] Comme pour Xi’an, capitale éternelle, cette collection d’objets en jade est prêtée par une institution chinoise, le Centre de coordination chargé des vestiges de Chine de l’Administration du patrimoine culturel.

[30] Julie Rémy, « Prix André-Laurendeau – « C’est l’ignorance qui amène à l’intolérance », Le Devoir, 22 octobre 2008, en ligne, https://www.ledevoir.com/societe/science/211885/prix-andre-laurendeau-c-est-l-ignorance-qui-amene-l-intolerance (10 septembre 2022).

[31] Nathalie Côté, « Xi’an, capitale éternelle : maîtres anciens », Voir, 10 janvier 2002, en ligne, https://voir.ca/arts-visuels/2002/01/10/xian-capitale-eternelle-maitres-anciens (10 septembre 2002).

[32] Chen Shen, L’empereur guerrier de Chine et son armée en terre cuite, Toronto, Musée royal de l’Ontario, 2010, p. 14.

[33] Nathalie Bondil dans : C. Shen, op. cit., p. 11.

[34] Laura Vigo, « L’art chinois à Montréal : la collection du MBAM », L’Asie en 1000 mots, 14 avril 2014, en ligne, https://asie1000mots-cetase.org/L-art-chinois-a-Montreal-la (21 avril 2022).

[35] Musée des beaux-arts de Montréal, « Arts du Tout-Monde », en ligne, https://www.mbam.qc.ca/fr/collections/arts-du-tout-monde/?q=chine (21 avril 2022).

[36] Sur la question des chinoiseries, voir : Stacey Sloboda, Chinoiserie: Commerce and Critical Ornament in Eighteenth-Century Britain, Manchester, Manchester University Press, 2014, 272 p.

[37] Jean-Paul Desroches, commissaire de l’exposition, dans : Pointe-à-Callière, Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal, Terre d’Asie : la collection de Sam et Myrna Myers, Montréal, Pointe-à-Callière, Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal, 2016, p. 6. Outre son rôle de commissaire de l’exposition, Jean-Paul Desroches, sinologue et ancien conservateur général du Patrimoine au Musée national des arts asiatiques de Paris (Guimet), a consacré un ouvrage portant sur l’ensemble de la collection des Myers : Jean-Paul Desroches (dir.), Two Americans in Paris, Paris, Lienart, 2016, 278 p.

[38] Francine Lelièvre, directrice générale du musée Pointe-à-Callière, dans : Pointe-à-Callière, Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal, op. cit., p. 4.

[39] Claude Gosselin, directeur du Centre international d’art contemporain de Montréal, dans : Claude Gosselin et Hanru Hou, Chen Zhen : Daily Incantation, Montréal, Centre international d’art contemporain de Montréal, 1996, p. 6.

[40] Ibid., p. 5.

[41] Ibid., p. 17.

[42] Musée des beaux-arts de Montréal, « Drapeau rouge, art contemporain chinois dans les collections montréalaises », communiqué de presse, 1er mars 2011, en ligne, https://www.v2com-newswire.com/en/newsroom/categories/ evenement-exposition/press-kits/696-03/drapeau-rouge-art-contemporain-chinoisdans-les-collections-montrealaises (3 mai 2022).

[43] Julie Alary Lavallée, « Drapeau rouge, art contemporain chinois dans les collections montréalaises », Esse arts + opinions, no 73, 2011, p. 63.

[44] Louis Soulard, « Coup de foudre chinois : Exposition d’art contemporain à l’Arsenal », Le Délit, 3 avril 2013, en ligne, https://www.delitfrancais.com/2013/04/03/coup-de-foudre-chinois (3 mai 2022).

[45] Constance Naubert-Riser, «  »Coup de foudre chinois » Stoïque et provocateur », Vie des arts, vol. 57, no 231, 2013, p. 50‑53.

[46] Arsenal art contemporain, « À propos », en ligne, https://www.arsenalcontemporary.com/mtl/fr/about (3 mai 2022). En 2013 et 2017, l’Arsenal ouvre deux autres centres à Toronto, puis à New York. Alors que Coup de foudre chinois est le premier événement accueilli par les nouveaux locaux montréalais en janvier 2013, l’exposition fait quelques mois plus tard, en septembre, l’inauguration du centre de Toronto.

[47] Jérôme Delgado, « La dissidence à l’Arsenal », Le Devoir, 31 janvier 2013, en ligne, https://www.ledevoir.com /culture/arts-visuels/369687/la-dissidence-a-l-arsenal (3 mai 2022).

[48] Florence-Agathe Dubé-Moreau, « Marquer le coup : Coup de foudre chinois / Like Thunder Out of China », Esse arts + opinions, no 79, 2013, p. 69.

[49] Ibid.

[50] Ibid., p. 68.

[51] Ibid., p. 69.

[52] Ibid., p. 68. Sur la question des relations entre l’art contemporain et le pouvoir politique en Chine, voir le chapitre 2, « Artistes et nouvelles géopolitiques de l’art contemporain », de l’ouvrage d’Emmanuel Lincot, Chine une nouvelle puissance culturelle : Emmanuel Lincot, Chine une nouvelle puissance culturelle ? Soft power & Sharp power, Paris, MKF, 2019, p. 68-91.

[53] Sur la vie d’Ai Weiwei, voir son autobiographie : Ai Weiwei, 1 000 ans de joies et de peines, Paris, Buchet-Chastel, 2022, 537 p.

[54] Musée des beaux-arts de Montréal, « Ai Weiwei : Seven Frames », en ligne, https://www.mbam.qc.ca/fr/oeuvres/ 44152 (28 avril 2022).

[55] J. Alary Lavallée, loc. cit., p. 62.

[56] Musée d’art contemporain de Montréal, « Zoo », en ligne, https://macm.org/expositions/zoo (28 avril 2022).

[57] Marie Fraser (dir.), Zoo, Montréal, Musée d’art contemporain de Montréal, 2012, p. 66.

[58] Marie Fraser dans : Ibid., p. 8.

[59] J. Delgado, loc. cit. Pour le « petit livre noir » dont il est question, voir : Ai Weiwei, Weiwei-isms, Princeton, Princeton University Press, 2013, 152 p.

[60] F. A. Dubé-Moreau, loc. cit., p. 68.

[61] Ai Weiwei, 1 000 ans de joies et de peines, op. cit., p. 522.

[62] L’arrestation de Meng Wanzhou, vice-présidente du groupe Huawei Technologies, par les autorités canadiennes en décembre 2018 sur fond de guerre commerciale sino-américaine entraine en réaction, quelques jours plus tard, l’arrestation de deux ressortissants canadiens en Chine. Il faut attendre septembre 2021 et la signature d’un accord entre le département de la Justice américain et Meng Wanzhou pour que l’affaire trouve une issue favorable. Néanmoins, celle-ci a laissé des traces dans les relations sino-canadiennes. Parmi les autres événements ayant contribués à l’augmentation des tensions entre la Chine et le Canada ces dernières années, il est possible de mentionner : les réprimandes publiques de Xi Jinping à Justin Trudeau en novembre 2022 lors du sommet du G20 à Bali en Indonésie, l’épisode des postes de police chinois clandestins sur le sol canadien, les cas présumés d’ingérence chinoise à plusieurs reprises dans les processus électoraux canadiens, ou encore le survol de l’espace aérien canadien par un ballon-sonde chinois en février 2023.

[63] Karen Tam, « À propos », en ligne, https://www.karentam.ca/fabout.html (20 avril 2023).

[64] Karen Tam, « CV », en ligne, https://www.karentam.ca/images/Tam_short_FCV_Feb_2023.pdf (20 avril 2023).

[65] Éric Clément, « Karen Tam au musée McCord Stewart : Hommage à la communauté chinoise de Montréal », La Presse, 18 février 2023, en ligne, https://www.lapresse.ca/arts/arts-visuels/2023-02-18/karen-tam-au-musee-mccord-stewart/hommage-a-la-communaute-chinoise-de-montreal.php (20 avril 2023). Sur l’exposition Avaler les montagnes présentée du 17 février au 13 août 2023, voir : Musée McCord Stewart, « Avaler les montagnes », en ligne, https://www.musee-mccord-stewart.ca/fr/expositions/avaler-les-montagnes-karen-tam/?gclid=CjwKCAjw__ihBhAD EiwAXEazJntkgsze8Qt7_JupoVDb8jGBax8pEPo0BlKvGM7boMiiAIEAkkTxBRoCwpIQAvD_BwE (20 avril 2023).