Définitions et contexte général
Cet article, à la suite de notre présentation au colloque d’histoire 2017 de l’Université de Sherbrooke, traite de l’Antiquité tardive. Cette périodisation relativement nouvelle est de plus en plus acceptée sans toutefois faire l’unanimité. Nous allons présenter le concept et tenter de défendre sa pertinence en prenant l’exemple du royaume ostrogoth, qui selon nous illustre très bien comment cette nouvelle périodisation peut influencer positivement notre analyse. Puisqu’il s’agit d’un royaume qui se trouve chronologiquement soit vers la fin de l’Antiquité tardive, soit au tout début du haut Moyen Âge, la périodisation tient une place importante dans son étude.
Nous allons d’abord présenter un bref survol historiographique ainsi qu’une comparaison du concept d’Antiquité tardive vis-à-vis le concept de haut Moyen Âge. Ensuite, nous présenterons le contexte du royaume ostrogoth en mettant l’accent sur la guerre des Goths qui y mit fin. Une fois ces grandes lignes posées, nous analyserons pourquoi et comment le royaume ostrogoth peut être situé à la fin de l’Antiquité tardive plutôt que le début du haut Moyen Âge sous les aspects politiques, culturels et religieux.
Contexte historiographique : concept d’Antiquité tardive
La transition de l’Empire tardif au haut Moyen Âge a fait l’objet de plusieurs études durant les dernières décennies qui nous ont amenés à repenser cette période. On a longtemps considéré la chute de l’Empire romain d’Occident et la date de 476 comme une rupture, le début d’un âge sombre après la chute d’un empire et la perte de son savoir. L’idée était donc que le Moyen Âge commence dès la fin du Ve siècle avec une période qu’on appelle le haut Moyen Âge n’est par contre plus tout à fait d’actualité.
appelle le haut Moyen Âge n’est par contre plus tout à fait d’actualité. Depuis la seconde moitié du XXe siècle, on tend à voir cette période sur un ton plus positif et à considérer que l’Empire tardif se prolonge dans certains cas au-delà de la fin du Ve siècle. C’est le cas par exemple dès 1964 avec le The Later Roman Empire de A. H. M. Jones[496] qui couvre les années 284 à 602. C’est un peu après que le concept d’Antiquité tardive tel que nous le connaissons se développe vraiment. Dans le monde anglo-saxon, ce sont les travaux de Peter Brown en 1971 qui lancent vraiment la discussion sur cette périodisation avec une approche d’histoire culturelle et sociale. Le concept est introduit dans le monde académique francophone principalement à partir de 1977 avec la publication de Décadence romaine ou Antiquité tardive? d’Henri-Iréné Marrou. Après plus de deux décennies de publications scientifiques sur le sujet, Averil Cameron publie en 1993 The Mediterranean World in Late Antiquity dans le but de fournir un livre d’introduction général sur cette période. À la fin des années 90, avec notamment la parution du recueil Late Antiquity: A Guide to the Post-Classical World[498], le concept d’une longue Antiquité tardive comme période de transition semble presque faire consensus[499].
La discussion est par contre relancée dans la décennie suivante (et dure depuis) sur deux sujets principaux. Premièrement, la datation de la période pose encore problème. Si la plupart des historiens s’entendent sur le IIIe-IVe siècles pour le commencement, la fin semble constamment être repoussée, allant jusqu’à inclure l’expansion de l’Islam. À titre d’exemple, dans la seconde édition de son ouvrage d’introduction sur l’Antiquité tardive en 2012, Cameron[500] prolonge la période couverte d’un siècle, soit jusqu’en 700.
Deuxièmement, la notion de déclin et chute en opposition à celle de transition et transformation est un point problématique. L’idée d’un certain déclin ou de crises, qui était présente dans l’historiographie depuis Gibbon, a été grandement discréditée, principalement par Peter Brown dans les années 70, mais commence récemment à revenir dans le débat, avec des défenseurs comme Arnaldo Marcone[502].
Notre approche s’insère donc dans ce débat en tant que défense de l’Antiquité tardive comme période de transition dans le cas de l’Italie ostrogothe.
Contexte historique : le royaume ostrogoth
La création du royaume ostrogoth en Italie résulte de la fameuse prise du pouvoir d’Odoacre en 476 qui dépose l’empereur Romulus Augustulus et envoie les insignes impériaux à Constantinople, mettant fin selon la vision traditionnelle de l’histoire à l’Empire romain d’Occident.
Même si Odoacre s’est soumis à Constantinople, l’empereur d’Orient Zénon préfère installer en Italie un allié plus fiable, il envoie donc Théodoric à la tête des Ostrogoths pour reprendre le territoire en son nom. Théodoric écrase rapidement Odoacre et installe dès 493 un royaume ostrogoth en Italie. Un fait pertinent pour nous en parlant de la fin de l’Empire romain d’Occident: Théodoric va exiger comme reconnaissance de l’Empereur qu’il lui renvoie les insignes impériaux, ce qu’Anastase 1er va faire. Nous reviendrons plus loin sur ce point[503].
Au fil des décennies qui suivirent, Théodoric met en place un puissant réseau d’alliance avec les autres royaumes d’Occident et instaure à l’intérieur de son royaume une idéologie de coopération entre barbares et Romains. À sa mort en 526, sa fille Amalasonte prend le pouvoir en tant que régente pour son fils, le jeune Athalaric. Malgré qu’Amalasonte garde de bons rapports diplomatiques avec l’empereur du temps Justinien[504], ce dernier élabore un audacieux plan de reconquête de l’Occident romain. Trop occupé avec les Sassanides à l’est, il devra attendre en 533 pour débuter ses conquêtes, ce qu’il fera en envoyant son général Bélisaire se saisir du royaume vandale comme première étape.
Au même moment en Italie, Athalaric décède subitement alors qu’il n’a que dix-huit ans. Ce décès prématuré va forcer Amalasonte à consolider son pouvoir, qui reposait principalement sur son fils, en mariant son cousin Théodahat, le plus proche héritier des Amales. Tout juste arrivé au pouvoir, Théodahat trouve un prétexte pour faire emprisonner Amalasonte avant de la faire assassiner l’année suivante, en 535[505].
Justinien utilise ce prétexte, ainsi que celui d’une guerre contre l’arianisme des Goths que nous détaillerons plus tard, pour intervenir en Italie et poursuivre ses conquêtes. Il envoie pour ce faire Bélisaire envahir le royaume ostrogoth par la Sicile, débutant ainsi les Guerres des Goths qui va déchirer l’Italie pendant un quart de siècle.
Les sources
La source principale pour cette période est Cassiodore[506], un fonctionnaire romain du royaume ostrogoth ayant publié une partie de sa correspondance officielle, les Variae[507]. Il est au cœur de la diplomatie de l’époque et fera partie de la délégation envoyée par Théodahat à Constantinople pour négocier la paix à l’aube du conflit. Pour la papauté, nous utiliserons principalement le Liber Pontificalis, un recueil de biographies papales, ainsi que le Brevarium causae Nestorianorum et Eutychianorum écrit par Liberatus de Carthage qui traite du nestorianisme et du monophysisme. Finalement, du côté de l’Empire romain d’Orient, les rapports de Procope de Césarée, qui a servi en tant que soldat sous Bélisaire, sont la source la plus pertinente.
Analyse politique et culturelle
Le royaume ostrogoth faisant partie du haut Moyen Âge selon la périodisation plus traditionnelle, a souvent été considéré un point de vue de rupture avec l’Antiquité. Notre objectif sera de démontrer qu’au contraire, le royaume de Théodoric et ses successeurs en Italie représentent, sur plusieurs aspects, une continuité avec l’Empire romain.
Titulature et politiques de Théodoric
Voyons donc ce qui fait du royaume ostrogoth une réalité de l’Antiquité tardive. D’abord, nous constatons au niveau politique une importante continuation avec l’Antiquité romaine, notamment dans la titulature de Théodoric. En effet, ce dernier reçoit les insignes impériaux, et même des titres impériaux dans ses correspondances[508]. Il existera donc une continuité en principe, sinon en faits, entre le royaume ostrogoth et l’Empire romain. Lorsque la guerre approchera, les Ostrogoths feront appel au Sénat romain et en particulier à Cassiodore pour faire valoir auprès de l’Empereur que la paix qui règne encore est une bonne chose. Cassiodore va dans ses lettres[509] insister sur deux concepts majeurs qui sont au cœur de l’idéologie des Amales depuis Théodoric et qui sont des exemples d’une continuité politique et culturelle avec l’idéologie romaine, soit la Civilitas et la Romanitas.
Malgré qu’il soit étranger et arien, Théodoric a en effet prôné la cohabitation paisible de son peuple avec les Romains, une idée qu’il illustre par la civilitas, un concept développé et renforcé avec l’aide d’intellectuels romains dont Cassiodore faisait partie. La civilitas est la notion d’harmonie sociale et de bonne entente dans le royaume entre Romains et Ostrogoths, chacun ayant un rôle bien défini[510]. Alors que les Romains sont responsables de l’administration et des finances, les Ostrogoths s’occupent de défendre le royaume. Les Ostrogoths sont donc présentés comme le bras armé du royaume qui permet aux Romains de prospérer en paix, par opposition à des envahisseurs qui exploiteraient les citoyens romains. C’est en assurant la protection des Romains que les Ostrogoths participent à la Romanitas, soit le deuxième concept clé de l’idéologie des Amales[511].
Romanitas
La Romanitas est un terme qu’on peut définir comme le sentiment d’appartenance des Romains, la « romanitude/romanité »[512]. À Rome, ce sentiment se définit depuis la République beaucoup plus par la culture et la participation à la vie politique et religieuse que par la naissance ou la terre[513]. Donc l’élite gauloise au premier siècle peut faire preuve de Romanitas en adoptant la culture romaine et en participant à la vie politique. Servir dans l’armée romaine était aussi considéré comme participer au mode de vie politique romain, c’est pourquoi à la retraite les soldats non romains se voyaient accorder la citoyenneté. C’est beaucoup grâce à cette idéologie que la culture romaine va se propager autour de la Méditerranée et que l’Empire va se romaniser[514]. C’est ce même concept que Cassiodore va reprendre pour les Ostrogoths en soulignant qu’ils contribuent à la Romanitas par la bonne entente et l’harmonie sociale qui règne en Italie, la civilitas. Il va aussi insister sur des éléments comme l’éducation romaine de Théodoric et sa fille, la liberté de culte qu’il instaure, la prospérité et liberté des Romains sous son règne, et plusieurs autres éléments qui font en sorte que les Ostrogoths participent à la Romanitas.
L’un des exemples les plus pertinents est la description d’Amalasonte faite par Cassiodore dans les Variae :
Cassiodore souligne ici qu’Amalasonte, reine régente pour son fils, tous deux élevés au sein de Rome, avec une éducation romaine, représente une personnification de la civilitas, elle incarne le meilleur des deux cultures. Elle est Ostrogothe, mais connait bien la littérature classique et parle sans problème la langue des deux cultures, en plus du grec. C’est donc par cette civilitas que les Ostrogoths participent à la Romanitas, et qu’ainsi l’Italie reste romaine.
Cassiodore utilise la même logique en 534 dans une lettre où l’auteur personnifie la ville de Rome pour convaincre Justinien de ne pas attaquer :
Nous voyons clairement que l’Italie est présentée comme étant encore romaine, et qu’ainsi une guerre avec l’Empire d’Orient serait un conflit fratricide et une impiété. Cassiodore va d’ailleurs utiliser dans l’ensemble de son œuvre une terminologie très romaine (par exemple les termes de pars nostra, res publica, romana) et met une distinction claire entre les différents royaumes barbares et le royaume ostrogoth, présenté comme l’une des deux parties de l’Empire romain[517].
Cassiodore chercher à démontrer qu’il n’est pas nécessaire pour Justinien de déloger les Ostrogoths puisque l’harmonie règne déjà en Italie et que le Sénat et le peuple de Rome prospère bien sous leur gouvernement. La mémoire de l’Empire romain devient donc un argument pour la paix. Lors que Cassiodore demande la paix à Justinien, il le fait en exposant à quel point le royaume ostrogoth est culturellement romain. La date de 476 n’est d’ailleurs pas du tout significative pour nos sources en Italie au Ve et VIe siècle (principalement Ennode et Cassiodore). Aux yeux des contemporains, l’Empire romain persistait bel et bien, ils n’attendaient qu’un nouvel empereur. Cette idée de continuité est particulièrement importante pour la périodisation puisqu’elle définit l’Antiquité tardive et nous permet d’affirmer que le royaume ostrogoth n’appartient pas au Moyen Âge politiquement et culturellement.
Analyse du religieux
Arianisme
L’arianisme[519] est très rattaché à l’Antiquité tardive. D’abord, les dates correspondent à la plupart des périodisations acceptées pour l’Antiquité tardive, l’arianisme étant présent en Occident environ du concile de Nicée en 325 jusqu’au VIe ou VIIe siècle, dépendant des régions. Ensuite, il est grandement associé aux royaumes barbares puisqu’il s’est particulièrement bien propagé parmi les peuples fédérés dès les débuts. C’est le cas aussi avec les Ostrogoths qui forment un royaume arien en Italie. Sur ce point donc le royaume arien de Théodoric se rattache beaucoup plus à l’Antiquité tardive qu’au Moyen Âge occidental d’un christianisme romain. Justinien aussi utilise ce prétexte pour déclarer la guerre aux Ostrogoths[520]. La guerre qui en résulte va éventuellement mettre un terme à l’occupation des Ostrogoths et donc à la présence de l’arianisme en Italie, du moins jusqu’aux Lombards. Ensuite, en pleine guerre gothique, Justinien émet un décret condamnant trois textes justement au sujet de la nature du Christ, cette fois-ci concernant le nestorianisme et le monophysisme. Ce décret cause ultimement ce que nous appelons « la querelle des trois chapitres » et qui marque un changement de paradigme à Rome.
Querelle des trois chapitres
Le conflit commence en pleine guerre gothique vers 543 ou 544 avec un décret de Justinien qui condamne trois chapitres et leurs auteurs, soient:
- Les travaux de Theodore de Mosuestia;
- Les écrits de Theodoret contre Cyril d’Alexandrie ;
- La lettre d’Ibas d’Édesse à Mari
Les trois sont considérés pro-nestorianismes[521], un cas déjà réglé, pour l’Occident, depuis Chalcédoine. Le but semble avoir été pour l’empereur de concilier les monophysites avec de l’anti-nestorianisme. En Orient, la condamnation a été bien reçue. En Occident par contre, Vigilius et les Romains considèrent la chose comme une interférence avec le décret de Chalcédoine. Vigilius est alors appelé à Constantinople au milieu des années 540. Il s’en suit une suite de correspondances, de condamnations et de demandes de profession de foi entre les évêques, le pape et l’empereur[522].
Le pape Vigilius agit notamment au nom de la curie romaine, mais aussi parce qu’il existe à ses yeux des ambigüités. Ne lisant pas le grec lui-même, des doutes demeurent sur la traduction. Nous pourrions voir dans cette question linguistique un changement à Rome: les papes deviennent plus latinisants. Seulement ce n’est pas le cas: Léon 1er, un pape du Ve siècle très influent sur les formulations orthodoxes de Chalcédoine et très bien reçu en orient, ne maîtrisait déjà pas le grec. De plus, les papes suivants seront, pendant une certaine période, des papes « byzantins », c’est-à-dire sous l’influence directe de Constantinople dans leur élection[523]. Par contre, il est indéniable qu’avec la chute de l’Empire romain d’Occident et éventuellement la reprise de l’Italie par l’Orient, Rome entre dans un certain « Moyen Âge » par la destruction effective de ses bases administratives et matérielles. Ce ne sera pas le cas avec Constantinople, qui, du point de vue religieux, reste rattachée à l’Antiquité en conservant son support de l’empire.
Dans tous les cas, les décisions de Justinien sont mal reçues à Rome, ce qui le pousse à se rétracter en attendant un concile général qui aura lieu à Constantinople en 553. Vigilius lui-même et les trois chapitres sont condamnés, mais l’Orient maintient sa communion avec Rome[524]. L’épisode en général causera un tort irréparable entre l’Orient et l’Occident. Nous voyons ici que l’interférence des empereurs dans l’orthodoxie commence à peine à être problématique au VIe siècle: d’autres empereurs précédents comme Constantin ont beaucoup plus participé et n’ont pas eu le même effet; c’est ce qui nous laisse dire que la brisure avec l’Antiquité n’est pas encore consommée. Sur ce sujet, Meyendorff disait :
Au niveau des thèses christologiques, on voit du IVe au VIIe siècle (jusqu’à l’adoption de la doctrine de Saint Maxime le Confesseur)[526] une suite de querelle sur la nature du Christ. Ceci étant dit, cette période fonctionne encore sous l’autorité impériale (tantôt de Rome, tantôt de Constantinople) et poursuit une tangente « connue ». Nous n’avons pas affaire aux conciles contre l’iconoclasme quelques siècles plus tard où c’est un isolement oriental qui s’empare de principe théologique qui font référence à des problèmes spécifiquement (ou presque) de l’Empire oriental.
Car en fait, « l’équilibre entre la pentarchie du système impérial byzantin et l’apostolicité pétrinienne aurait pu être maintenu beaucoup plus longtemps si l’arrogance et l’insouciance des empereurs iconoclastes de Constantinople n’avait pas contraint la papauté à devenir une institution occidentale, liée à la monarchie carolingienne [527]». Déjà avec Grégoire Ier à la fin du VIe, nous voyons l’autorité papale s’affirmer dans l’Occident en signant un traité de paix séparée, sans l’autorité de l’exarque de Ravenne.
Nous pourrions dire que ce n’est vraiment qu’après la perte de Rome à la suite de la reconquête de Justinien et les problèmes avec les Lombards qu’une division se fait au niveau religieux entre l’Orient et l’Occident. Cette division sera ensuite accentuée avec la querelle iconoclaste, qui se poursuivra sous Charlemagne et sera consommée avec le schisme de 1054. La date de 1054 est, pour nous, du point de vue religieux, symbolique, mais non substantiel. Déjà, à la période qui nous intéresse, nous voyons dans l’acquisition au VIe siècle du titre de Patriarche Œcuménique en Orient une querelle de primauté entre l’Orient et l’Occident[528].
Pertinence historiographique du concept d’Antiquité tardive
Nous avons tenté de démontrer ici la pertinence du concept de l’Antiquité tardive à travers l’exemple du royaume ostrogoth. Ce dernier illustre en effet très bien la notion de continuité qui définit le concept d’Antiquité tardive, en particulier pour les aspects politiques, culturels et religieux. La question de savoir à quel point nous pouvons par la suite étendre l’Antiquité tardive est par contre beaucoup plus complexe. D’abord, l’occupation de l’Empire d’Orient en Italie permet un retour vers l’Orient où la périodisation n’est plus la même. Ensuite, l’invasion lombarde va poser les premiers développements féodaux ainsi qu’une certaine division du territoire qui va définir l’Italie pour le reste du Moyen Âge. D’un autre côté, les Lombards sont le dernier peuple arien, et certains argumentent que ce n’est qu’avec la renaissance carolingienne qu’on pourra vraiment parler de Moyen Âge. Il s’agit d’un sujet encore vivement débattu, et nous pensons que c’est pour le mieux : la périodisation doit constamment être remise en question si on veut faire évoluer notre compréhension des phénomènes historiques.
Références
[496]A. H. M. Jones, The Later Roman Empire, 284-602: A Social, Economic and Administrative Survey, Oxford, Blackwell, 1964.
[497]Henri-Iréné Marrou, Décadence romaine ou Antiquité tardive? IIIe-VIe siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1977.
[498]Glen W. Bowersock, Peter Brown, Oleg Grabar, éds., Late Antiquity: A Guide to the Post-Classical World, Cambridge, Harvard University Press, 1999.
[499] Arnaldo Marcone, « A Long Late Antiquity? Considerations on a Controversial Periodization », Journal of Late Antiquity, vol. 1 (2008), p. 5.
[500]Averil Cameron, The Mediterranean World in Late Antiquity AD 395-600, New York, Routledge, 1993.
[501] Peter Brown, The World of Late Antiquity, from Marcus Aurelius to Muhammad, London, Thames and Hudson, 1971.
[502]Marcone, « A Long Late Antiquity? », p. 6.
[503]H. Wolfram, History of the Goths, trad. par T.J. Dunlap, Berkeley, University of California Press, 1988, p. 278-284.
[504]Procope de Césarée, Guerre des Goths, 1, 3.
[505]Wolfram, History, p. 337-362.
[506]Nous utilisons Cassiodore car ce dernier représente bien le christianisme antique par sa participation à la vie administrative de l’Empire ainsi qu’intellectuelle et chrétienne. L’administrateur devenu moine ou le moine devenu administrateur sont deux thématiques très antiquisantes, notamment chez les papes et autres légats importants. Voir à ce sujet J. J. O’Donnell, Cassiodorus. Berkeley, University of California Press, 1979.
[507]Marc-Antoine Vigneau, « Cassiodore, Variae, Livre 11 : Traduction et commentaire historique », Thèse de maîtrise (histoire), Montréal, Université de Montréal, 2015.
[508]À ce sujet, voir Variae, XI, 13 (Vigneau, « Cassiodore, Variae, Livre 11 », p. 94-98). Théodoric est appelé, par exemple, triumphator, titre qui, dans l’Antiquité tardive, est très rattaché au pouvoir impérial.
[509]Notamment Variae, XI, 2 et XI, 13 (Vigneau, « Cassiodore, Variae, Livre 11 », p. 46 et 96-98.)
[510]Sur la notion de civilitas, voir notamment: M.S. Bjornlie, Politics and Traditions Between Rome, Ravenna and Constantinople, New York, Cambridge University Press, 2013, p. 251-253; Jonathan J. Arnold, Theoderic and the Roman Imperial Restoration, Cambridge, Cambridge University Press, 2014, p. 126-132; Peter Heather, The Goths, Oxford, Blackwell Publishers, 1996, p. 277.
[511]Arnold, Theoderic and the Roman, p. 133-137.
[512]À noter que nous ne faisons pas référence ici à un concept ethnoculturel, et nous évitons volontairement le terme de nationalité ou sentiment national parce que c’est une catégorie moderne qui obéit à des critères qui ne s’appliquent pas À noter que nous ne faisons pas référence ici à un concept ethnoculturel, et nous évitons volontairement le terme de nationalité ou sentiment national parce que c’est une catégorie moderne qui obéit à des critères qui ne s’appliquent pas du tout pour l’Antiquité, où le sentiment d’appartenance est beaucoup plus large et flexible. Nous devrions ici parler d’un « principe de romanité », ou comme en anglais, d’une « romanness ».
[513]J. C. Barret, « Romanization: A critical comment » dans D.J. Mattingly, éd., Dialogues in Roman Imperialism: power, discourse, and discrepant experience in the Roman Empire, Portsmouth, JRA, 1997, p. 51-66.
[514]Janet Huskinson, Experiencing Rome: Culture, Identity and Power in the Roman Empire, Routledge, Londres, 2000, p. 20-23.
[515]Cassiodore, Panégyrique à Amalasonte, Variae, XI, 1, 6-7:
[516] Cassiodore, Variae, XI, 13, 3 :
Ecce alumnos meos sub tua pace geminavi, ecce civibus ornata resplendui. si me laedi pateris, ubi iam nomen tuae pietatis ostendis? quid enim pro me nitaris amplius agere, cuius religio, quae tua est, cognoscitur sic florere? senatus meus honoribus crescit, facultatibus indesinenter augetur.
[517]Principalement dans Variae, XI, 13.
[518]Arnold, Theoderic and the Roman, p. 10.
[519]Les sources sur Arius sont principalement Athanasius et Epiphanius, ainsi que certains historiens de l’Église antique comme Rufinus, Socrates, Sozomen et Philostorgius. Sur la question de l’arianisme du point de vue théologique : R.P.C. Hanson, The Search for the Christian Doctrine of God : The Arian Controversy 318-381, Édimbourg, Baker Academic, 1988. Du point de vue politique à la période qui nous intéresse : Bjornlie, Politics and Traditions.
[520]Procope de Césarée, Guerre des Goths, 1, 5, 2.
[521]Sur le nestorianisme, voir principalement le cas du concile d’Éphèse (431) et de Chalcédoine (451) ainsi que les controverses autour de Cyril d’Alexandrie et Nestorius. Ceux-ci restèrent importants surtout dans l’Orient, comme le démontre la querelle des trois chapitres. Sur ce point: Michael Whitby, « The Church Historians and Chalcedon », dans Gabriele Marasco, éd., Greek and Roman Historiography in Late Antiquity. Fourth to Sixth Century A.D., Leyde, Brill, 2003, p. 449-495.
[522] Claire Sotinel, « Emperors and Popes in the Sixth Century » dans M. Maas, éd., The Cambridge Companion to the Age of Justinian, Cambridge, Cambridge University Press, 2005, p. 267-290.
[523]Ibid.
[524]Ibid.
[525]John Meyendorff, Imperial Unity and Christian Divisions. The Church 450-680 A.D., Crestwood, St Vladimir’s Seminary Press, 1989, « coll. Church History », vol. 2, p. 377.
[526]Ibid., p.373.
[527]Ibid., p. 322.
[528]Grégoire Ier prend, le premier des papes, le titre de servus servorum dei en signe de protestation contre le titre de « Patriarche universel » que s’octroie le patriarche de Constantinople.