Des périphéries au centre : un essai sur l’espace de la production drapière à Montpellier au Moyen Âge

Étienne Chevalier

Candidat à la maîtrise à l’Université de Sherbrooke

Résumé : 

Cet essai a pour objectif d’examiner la spatialité des opérations liées à la production de draps de laines à Montpellier au cours du Moyen Âge. Pour ce faire, nous avons comme objet d’étude les caractéristiques environnementales et la configuration des espaces dans lesquels se déroulait la production. Nous soumettons l’hypothèse que l’organisation de l’espace productif laisse entrevoir un modèle centre/périphéries, où les acteurs de la ville parviennent à administrer et superviser les activités effectuées en zone rurale grâce à une armature complexe. Afin de répondre à la problématique, l’analyse offrira une vue d’ensemble synthétique sur les étapes de la production, de la récolte des ressources à la finition du textile.

Mots-clés : draperie, draps, Montpellier, Moyen Âge, production, corporation de métiers, espace, environnement, ville, campagne, laine, moutons, forêts, garrigues, cours d’eau 

 

Table des matières
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    Introduction

    L’historiographie de la draperie montpelliéraine au Moyen Âge est en sourdine depuis l’étude publiée par Kathryn Reyerson en 1982[1]. Dans celle-ci, l’historienne s’intéresse plutôt aux enjeux commerciaux du trafic des draps, alors que les questions liées à l’espace de la production locale sont reléguées au second plan[2]. Les travaux plus récents de Mathieu Arnoux et Jacques Bottin ont pourtant relevé la pertinence de l’analyse spatiale pour examiner le déploiement et le fonctionnement du secteur textile à l’époque médiévale[3]. Ce type d’enquête a entre autres permis de mettre en lumière la structure des rapports socio-professionnels entre les acteurs urbains et ruraux. Ces évolutions historiographiques ont cependant surtout concerné l’étude des secteurs situés au nord de la France, tandis que l’histoire des draperies languedociennes est encore aujourd’hui « une histoire concurrentielle ou comparative des villes drapantes ou des aires « nationales »[4] ».

    Les études portant sur l’espace montpelliérain, notamment celles réalisées par le biais de l’histoire environnementale[5], permettent d’approfondir la question de la spatialité des activités drapières. Où se trouvaient les lieux de production? Quel fut l’impact de leurs spécificités écologiques sur les dynamiques proto-industrielles et anthropiques du secteur drapier? Comment les liens d’interdépendance entre les acteurs de la ville et de la campagne s’incarnaient-ils dans l’espace productif? L’hypothèse de base est que la configuration spatiale de la production drapière au Moyen Âge correspond à un modèle centre/périphéries[6] où la ville, espace de transformation, opérait ses activités grâce à l’approvisionnement en matières premières des zones rurales environnantes, lesquelles étaient administrées et exploitées par les acteurs urbains grâce à une armature complexe. À des fins de concision, le présent travail propose un examen synthétique sur l’ensemble de la production, de la collecte des ressources jusqu’à la finalisation du tissu[7]. Avant d’entrer dans le vif du sujet, tâchons de présenter les sources mobilisées pour cette étude.

    1. Description des sources

    Le livre des métiers de l’art et exercice de la drapperie de layne et de soye, rédigé à partir de 1493 et coté HH 102 dans les Archives municipales de la ville de Montpellier (AMM)[8], représente la source principale pour cette étude. En plus de contenir de précieux renseignements sur le statut des métiers travaillant le drap dans la ville, ce manuscrit dévoile de nombreuses instructions techniques qui nous permettent de séquencer en détail les différentes étapes de la production[9]. Des données provenant de l’inventaire de Louvet et du Grand Thalamus (fonds AA) ont été mobilisées sans méthode de dépouillement précise. Ces dernières révèlent des ordonnances administratives concernant des enjeux liés de près ou de loin à la production. Des cartes datant du XVIIIe siècle (annexe 1) ont également été utilisées pour localiser certains milieux clés de la production[10].

    2. La campagne, espace d’approvisionnement

    2.1. La route de la laine

    C’est à partir du mouton que s’amorce la production drapière. C’est sur son dos qu’on retrouve la laine, encore à l’état de toison. Il va sans dire que l’accessibilité à cette matière est un enjeu crucial pour le fonctionnement de la chaîne de production[11]. La draperie montpelliéraine est un cas intéressant puisque celle-ci bénéficie d’un élevage ovin intensif à proximité, implanté dans le croissant nord-méditerranéen depuis plusieurs millénaires[12]. En effet, le paysage montagneux et le climat sec font de cette région, qui s’étend du sud de la France au nord-est de l’Espagne, un espace propice à l’élevage des moutons[13]. La draperie montpelliéraine profite ainsi d’un large réseau d’approvisionnement lainier qui la relie à d’autres centres régionaux de production textile, tels que Perpignan ou Clermont[14].

    L’abondance de moutons en Languedoc n’a pourtant pas empêché les acteurs drapiers de convoiter des laines étrangères issues des marchés européens et levantins[15]. On remarque pourtant que l’élevage ovin dans le croissant nord-méditerranéen s’intensifie au courant des XIV-XVe siècles, marqué par un intérêt accru pour les laines languedociennes au sein du marché international[16]. L’approvisionnement en laine pour la production drapière, éclaté dans l’espace, est ainsi entretenu aussi bien par l’élevage local et régional que par l’importation de fibres étrangères.

    Cette chaîne de ravitaillement est en grande partie orchestrée par les drapiers et les marchands, lesquels agissent à titre d’investisseurs et de superviseurs de la production drapière[17]. L’acquisition de troupeaux de moutons se fait généralement via les baux à cheptel, un contrat où le drapier mobilise les capitaux pour acheter les animaux et les confie à un commis pendant une durée d’usuellement quatre ans. Celui-ci a le mandat de s’occuper des moutons ainsi que de les faire tondre pour ensuite acheminer les toisons aux propriétaires[18]. Ce type de contrat atteste l’influence des investisseurs drapiers sur les activités pastorales : « Tout est mis en œuvre pour lui fournir de la laine qu’il revend par la suite. La laine lui parvient, tout d’abord, par le contrat passé puisque la moitié de celle-ci lui est réservée ; ensuite lorsqu’il vend les bêtes, car le remboursement doit se faire en laine[19]. »

    Si on s’efforce à maintenir une emprise serrée sur la laine alors qu’elle encore rattachée à la peau du mouton, c’est bien parce que l’animal est sujet à plusieurs déplacements dans l’espace au cours de l’année et qu’il échappe donc périodiquement à la supervision des drapiers. Le concept de transhumance[20] désigne le cycle des déplacements des moutons : présents dans les basses plaines de l’hiver au printemps, ces derniers migrent vers les montagnes pour échapper à la chaleur de l’été pour ensuite redescendre en basses altitudes, où ils rejoignent les berges situées près de la ville pour y être tondus[21].

    L’enjeu principal de la transhumance est certainement le pâturage. Celui-ci pose un problème en partie à cause du mode d’exploitation de l’espace à l’époque médiévale : « [L]a possession de la terre et son exploitation s’organisaient autour de communautés d’habitants et de membres de corporations constituées inévitablement en grande partie de petits et moyens propriétaires. Dans ces cas-là, l’intérêt de la communauté, en tant que collectif, tendait à fixer l’utilisation et l’exploitation de son environnement à des niveaux qui devaient lui permettre de se perpétuer[22]. » À l’intérieur de cette organisation orientée sur la régénération cyclique des sols cultivables pour pérenniser le partage commun de ressources, la pâture des moutons embrouille les mécanismes écologiques du terroir montpelliérain[23]. L’une des solutions apportées pour résoudre le problème a été de désigner, à travers une série de réglementations, les lieux où la dépaissance est permise et ceux où elle est proscrite :

    Qu’on ne pourra point mener chèvre ni bouc au terroir et distroit de Monpellier, sinon le bestal de la boucherie estant à la Bocarie du dit Monpellier, lequel pourra dépaistre seulement par les chemins et fossés; 2. Le bestal des bouchers de Monpellier, acheté pour la boucherie, pourra aller et dépaistre, sans payer aucun ban, aux champs, restoubles et garatz, quand les bleds en seront tirés, et dans les autres endroitz du terroir de Monpellier où il ne se… [peut] faire de domage; 3. Le dit bestal des bouchers, acheté pour la boucherie, pourra entrer et dépaistre aux vignes des habitans de Monpellier, sans payer aucun ban, depuis la feste de Saint-Michel jusques au premier jour de mars, – sinon qu’il y eust des chous plantés ou du blé ou autre semence qui pourroit être endomagée; – adjoutant que si les dites vignes devant le dit mois de mars pulluloient, le dit temps pourroit estre abbrégé et restraint, à la réquisition des dits Consulz […][24].

    Ces règlements démontrent bien l’impératif d’interdire au bétail l’accès aux zones cultivables composant l’ager, la seule exception étant lorsque les cultures ont déjà été recueillies ou lorsque celles-ci ne sont pas en gestation. En ce qui concerne les zones littorales et forestières qui constituent le saltus, celles-ci passent progressivement sous la gouverne des autorités seigneuriales et ecclésiastiques à partir du XIIIe siècle[25]. Le pâturage, usité dans les terres communales[26], peut parfois se révéler problématique lorsqu’il s’agit des domaines seigneuriaux. Les nombreuses confiscations de moutons au Bois de Valène, situé au nord-ouest de la ville, témoignent des conflits juridiques que pouvait entraîner le pâturage des bêtes[27].  Afin d’éviter ces conflits, les troupeaux sont confiés à des bergers. Ces derniers, perçus comme les « ermites laïques » du Moyen Âge[28], sont chargés de superviser et guider le bétail vers les lieux où celui-ci est autorisé à paître. Une ordonnance émise en 1500 au sujet du pâturage à Montpellier en 1500 réserve un supplice physique aux bergers qui porteraient préjudice aux droits d’usages, les autres contrevenants ne recevant qu’une amende[29], signe tangible que les bergers sont reconnus et traités comme étant des experts de la transhumance des animaux.

    2.2. La récolte des ressources connexes : des forêts aux garrigues

    Outre la laine, la production d’un drap nécessite un approvisionnement en une variété de matières premières. D’emblée, le traitement de la laine exige d’importantes quantités de bois pour faire chauffer les cuves d’eau qui sont employées pour laver, dégraisser ou teindre les laines brutes ou les draps. Tout porte à croire que pour la communauté montpelliéraine, c’est le Bois de Valène qui représentait le principal lieu d’exploitation du bois[30]. La thèse de Lucie Galano nous informe que le consulat était l’un des principaux employeurs de main-d’œuvre pour aller couper le bois servant à alimenter les activités urbaines[31].

    Il faut bien sûr mentionner les matières tinctoriales qui font l’objet d’une exploitation considérable à Montpellier, qui était reconnue pour sa teinture écarlate dont elle détenait le monopole du XIIe jusqu’au XIVe siècle[32]. Cette pigmentation de teinture est produite à partir des corps séchés de la cochenille, un insecte femme qui se nourrit des chênes kermès présents dans les garrigues[33]. Au Moyen Âge, le grattage à l’ongle est la technique de cueillette la plus courante pour récupérer les cochenilles. Ce travail est réalisé par des femmes et des enfants qui, en contrepartie d’une faible rémunération, acheminent ces insectes vers leurs employeurs urbains[34]. Le succès de la teinture écarlate à Montpellier n’est pas une surprise si l’on observe l’abondance des garrigues dans l’espace environnant : les terres et le bois de Vauguières, situés aux bordures de l’étang de Mauguio, étaient couverts de vastes champs de garrigues[35]. On en trouvait d’autres parmi les vignes et des champs de Courtarelles[36] et elles constituent l’essentiel de certaines terres telles que le Mas neuf et de la Calipsse[37]. Le chemin liant Fortignan à Montpellier est également parsemé de garrigues[38]. Le Bois de Valène, enfin, était un secteur particulièrement prisé pour la garrigue qu’on y trouvait (annexe 1).

    Ainsi, que ce soit pour élever des moutons ou pour y récolter le bois et les matières tinctoriales, les zones rurales constituent l’espace d’approvisionnement pour la production drapière. On remarque que s’ils ne côtoient que très peu cet espace, les drapiers parviennent à y maintenir une autorité par l’entremise d’un mode de gestion et d’exploitation reposant sur un vaste réseau de travailleurs et travailleuses. Ainsi, les entrepreneurs citadins entretiendraient un rapport pragmatique avec l’arrière-pays, centré sur la gestion et l’exploitation des ressources naturelles que celui-ci prodigue[39].

    3. La ville, espace de transformation

    3.1. Le lavage des laines : l’eau comme ressource

    Une fois que les matières premières étaient récoltées, celles-ci étaient acheminées vers le centre urbain pour y être travaillées. Avant d’être transformée, la laine doit d’abord subir un lavage dégraissant. En effet, alors qu’elle était encore sur le dos de l’ovin, la laine a accumulé poussières, débris et transpirations. Le lavage permet ainsi de retirer les sédiments et les matières graisseuses présents dans la laine, ce qui est nécessaire si l’on souhaite produire un drap de qualité marchande. Cela est autant plus vrai si on désire faire teindre le drap étant donné que la présence de suint dans les laines altère la finition des couleurs sur le tissu[40].

    C’est principalement sur les rives du Lez que les laines étaient lavées[41]. À la fin du Moyen Âge, cette branche fluviale est perçue comme étant le cours d’eau le plus propice pour y exécuter le traitement des laines[42]. Pour laver celles-ci, on les place dans de grandes cuves de bois remplies d’eau chaude, dans lesquelles les laveurs ou laveuses secouent délicatement un bâton pour faciliter le décollage des saletés sur les laines. Une autre étape, le détrichage, consiste à retirer manuellement les résidus de saleté qui auraient pu rester emprisonnés dans les laines. Ces dernières sont par la suite placées dans les cours d’eau à l’aide de grands paniers afin d’y être rincées par l’eau courante[43].

    Tous deux situés sur le Lez, le pont Juvénal et le pont de Castelnau deviennent des pôles importants pour les activités de lavage à compter du XIII siècle (annexe 2)[44]. Convoité pour ses ressources hydrauliques, le Lez est un lieu où s’exerce le pouvoir des autorités urbaines sur la circulation des laines. À la fin du XVe siècle, ce pouvoir est matérialisé par l’aménagement d’une maison nommée la « place de la layne[45] », un édifice situé à proximité du pont Juvénal et qui constitue le lieu de passage obligé pour tous ceux désirant se procurer de la laine à Montpellier. La présence de cette maison, habitée à longueur d’année par un commis ayant pour mandat de surveiller et de faire peser les laines qui y sont achetées ou vendues[46], traduit l’impératif des consuls et des drapiers de la ville de maîtriser la circulation des matières premières à l’intérieur des murs.

    3.2. Le filage de la laine : un passage problématique vers les espaces périphériques?

    Une fois la laine nettoyée, celle-ci est maintenant prête à être transformée à l’état de fil. Cette étape, qui correspond au « premier stade irréversible du processus de production[47] », est principalement réalisée par des femmes : dans un livre des métiers rédigé à Montpellier à partir de 1493, seuls le terme « fillandière » et les pronoms féminins sont utilisés pour désigner les personnes œuvrant dans le filage[48]. Ces femmes, résidant aussi bien dans les campagnes que dans la ville, sont propriétaires de leurs outils de travail et possèdent un savoir-faire d’une grande valeur pour la production drapière. On pourrait alors s’attendre, dû au fait de cette expertise, à des travailleuses libres en position de force face aux drapiers. Dominique Cardon remarque que ces derniers parviennent toutefois à exercer une certaine influence sur les fileuses. De fait, en réglementant l’ouvrage des fileuses de sorte qu’elles ne puissent détenir trop de laine au même moment au risque de recevoir une amende, la corporation drapière de Montpellier s’assure de limiter les tentatives de vol ou de fraude[49]. Ces règlements semblent être motivés par le fait que les fileuses sont pour la plupart éloignées géographiquement du centre urbain et qu’elles sont donc difficilement atteignables, faisant en sorte que les investisseurs drapiers perdent momentanément contact avec leur précieuse laine. C’est donc en restreignant l’accès à la laine que les drapiers seraient parvenus à pallier l’enjeu de la distance les séparant des fileuses[50]. Les lacunes documentaires ne permettent toutefois pas de tirer de conclusions satisfaisantes sur l’impact réel de cette réglementation sur le travail des fileuses.

    3.3. Le tissage des draps : un processus scruté sous la loupe

    Une fois filée, la laine est acheminée vers les tisserands où elle est travaillée pour former le tissu. Il est difficile de spatialiser les boutiques de tisserands étant donné qu’ils semblent avoir été peu nombreux à Montpellier[51]. Il est probable que ces derniers demeuraient à proximité des drapiers, étant donné l’étroitesse des liens professionnels unissant les deux corps de métier[52].

    Le travail du tisserand est réalisé grâce à l’utilisation du métier à tisser, une machinerie complexe qui met en évidence le dynamisme technologique de la draperie médiévale[53]. Ce métier, reposant sur une solide charpente de bois, maintient les fils étirés grâce à des ensouples (rouleaux à bois) et fonctionne à l’aide de marches liées à des pédales levant et abaissant les fils pour créer une ouverture où passe le fil de chaîne afin de lier les fils lainiers ensemble (voir l’annexe)[54]. Il s’agissait de machines imposantes et les secousses occasionnées par leur mécanisme exigeaient qu’elles soient maniées à l’intérieur d’un édifice solide pour absorber les chocs.  Les ateliers de tisserands devaient de surcroît être vastes, d’autant plus qu’à Montpellier les tisserands étaient tenus d’avoir au moins deux métiers à tisser opératoires dans leurs boutiques[55].

    Mais l’espace du tisserand est d’abord et avant tout un espace surveillé et encadré. De fait, à la fin du XVe siècle, le travail des tisserands est rigoureusement inspecté par les représentants des consuls drapiers, nommés les « surposez[56] ». Ces derniers, en plus de visiter les ateliers de tisserands au moins quatre fois par année pour vérifier si les métiers à tisser sont conformes et ne dépassent pas les dimensions prescrites par les statuts et règlements, passent aux boutiques au moins une ou deux fois par semaine pour assurer que les tissus qui y sont présentés soient « bons et loyaulx[57] ». Ces déplacements annuels et hebdomadaires semblent indiquer qu’au Moyen Âge tardif, la surface de travail du tisserand est un espace qu’on souhaite uniformiser par le biais de règlements normatifs visant à concrétiser la subordination professionnelle des tisserands par rapport aux drapiers.

    3.4. Le foulage des draps : l’eau comme énergie

    Le travail du tisserand, indispensable pour la production drapière, ne conclut toutefois pas la production : « Quand les draps sortent du métier, ils sont raides, leur trame inégale et encombrée d’impuretés[58] ». C’est le foulage, une étape où le drap subit une série de torsions, de frottement et de battage, que celui-ci est renforci et acquiert par le fait même une texture plus dense et moelleuse[59].

    Le processus du foulage des draps connaît une mécanisation depuis l’introduction de moulins hydrauliques en Europe, une innovation qui atteindra Montpellier dès le XIIe siècle[60]. Le moulin à fouler eut des retombées considérables sur le rythme de la production drapière : Walter Endrei estime que l’avènement des moulins hydrauliques est le facteur principal qui explique le gain de productivité des activités de foulage au Moyen Âge[61], une interprétation qui continue de marquer l’historiographie malgré les nuances qui lui ont été accolées[62].

    L’introduction de moulins à fouler eut surtout un impact considérable sur l’organisation de l’espace fluvial de la production drapière. En effet, l’aménagement d’infrastructures capables de tirer profit du courant hydraulique des rivières engendra un nouveau rapport avec l’eau, dorénavant perçue et utilisée comme source d’énergie[63]. Cette nouvelle fonction n’allait pas de soi, particulièrement à Montpellier qui ne dispose d’aucune rivière à courant fort[64]. C’est grâce à l’aménagement de paissières, un type de barrage en bois et en pierre, que les courants du Lez et de ses affluents peuvent être dirigés vers les roues des moulins, permettant une force motrice plus rapide et une alimentation énergétique plus stable[65]. L’aménagement des cours d’eau entraîne toutefois une hausse de la vulnérabilité de la ville face aux inondations, lesquelles surviennent plus fréquemment vers la fin du Moyen Âge[66]. L’exemple du moulin à fouler démontre que la maîtrise d’un cours d’eau passe principalement par le contrôle des ressources hydrauliques, une entreprise qui se concrétise via le développement technologique et qui participe à l’anthropisation de l’écosystème fluvial[67].

    3.5. La teinture des draps : l’eau comme dépotoir

                Comme mentionné plus haut, Montpellier devait une partie de sa réputation commerciale aux activités de teinture, un procédé hautement lucratif dont le résultat peut parfois déterminer jusqu’à 60% du prix de vente des draps[68]. Pour être teint, le drap devait être placé dans une série de cuves remplies d’eau chaude : le premier bain servait à laver une nouvelle fois le drap, le deuxième servait à maximiser l’adhésion des matières tinctoriales et le troisième et dernier bain servait à appliquer la teinture[69].

    Une fois le processus de teinture achevé, les eaux dans lesquelles ont baigné les tissus sont maintenant chargées des nombreux ingrédients et matériaux employés lors du processus. À Montpellier, ces eaux usées sont déversées dans le Verdanson (appelé le Merdanson au Moyen Âge), un cours d’eau situé au nord et au nord-ouest de la ville[70]. On retrouve ici une autre fonction qu’occupait l’eau en milieu urbain, celle de dépotoir. En effet, le mouvement hydraulique recevait les matières nocives et nauséabondes émises par les habitants de la ville et posait du même coup un défi pour la salubrité des lieux de production[71]. Le déversement des ordures suscitait effectivement beaucoup d’inquiétude, car les eaux polluées étaient associées à la propagation d’épidémies. Cette crainte se traduisait parfois par une ségrégation des teinturiers qui, bien que disposant d’une position sociale confortable au sein de la communauté urbaine, se retrouvaient parfois jugés comme « des hommes sans souci et sans scrupules[72] ». Reste à savoir si la diffusion de ce genre de stéréotype permet d’établir un lien entre les représentations sociales d’un corps professionnel et les perceptions spatiales de l’environnement dans lequel celui-ci évolue.

    L’étude sur la ville médiévale de Montpellier en tant qu’espace de transformation permet de mettre en lumière l’importance du réseau fluvial dans la production drapière. De fait, les cours d’eau revêtent plusieurs usages pour la société : à la fois réservoirs de ressources, sources énergétiques et zones de déchargement pour les déchets, ils constituent le noyau écologique de toute activité économique[73]. On remarque par ailleurs que la quasi-totalité des étapes de la transformation du tissu se situe à proximité des eaux, sans doute afin d’optimiser la séquence logistique de la chaîne de production et ainsi maximiser la fluidité de son opérationnalisation.

    Conclusion

    En somme, l’analyse des spécificités environnementales de l’espace montpelliérain nous permet d’apprécier leur rôle dans le déploiement des activités drapières. De fait, le climat ambiant et le relief favorisent un élevage de moutons intensif dans la région, ce qui assure un approvisionnement constant en laine. Les forêts et les garrigues contiennent quant à elles des ressources d’une importance cruciale pour la draperie, telles que les cochenilles avec lesquelles on produit la teinture écarlate faisant la renommée de Montpellier depuis la fin du XIIe siècle. Enfin, les cours d’eau du Lez et du Merdanson, exploités et aménagés à des fins d’alimentation hydraulique et énergétique, sont également utilisés pour la disposition des matières résiduelles engendrées par la production. D’autre part, nous avons vu que le modèle centre/périphéries permet d’entrevoir les rapports socio-professionnels inhérents à la production drapière. Celle-ci s’amorce avec l’exploitation des matières premières dans les espaces ruraux grâce au travail de nombreux salariés employés par les patrons urbains. Les ressources sont ensuite acheminées vers la ville pour être transformées grâce au travail artisanal. La production drapière prend fin dans les quartiers notoires de la cité lorsque le drap, fini et apprêté, est remis aux mains du drapier, cet acteur à la fois si absent et si omniprésent de la production[74]. Faut-il en effet corroborer l’idée d’un drapier dominant l’ensemble de la chaîne de production? Comme le propose Jean-Louis Roch, il est douteux que les drapiers aient maintenu une telle influence sur la production tout au long du Moyen Âge. Il est plutôt probable que la draperie montpelliéraine ait connu un phénomène de « prolétarisation » progressif au cours du bas Moyen Âge grâce à une réglementation et un encadrement plus serré sur les artisans[75]. Il serait au demeurant utile d’approfondir la question en examinant la documentation juridique et administrative liée aux métiers composant la draperie montpelliéraine.

    ANNEXES 

    Annexe 1 : Cartes de Montpellier et ses environs, d’après Archives départementales de l’Hérault. Atlas dit du « Grand Saint-Jean », comportant la description des biens de la commanderie de Montpellier, 1750-1751. Cote 55 H 3. 

    Annexe 2 : Carte des moulins situés sur le Lez à Montpellier tirée de Coralie Naze. « Les cours d’eau et les moulins de Montpellier aux XIIIe-XVe siècles (annexes) ». Mémoire de maîtrise (histoire), Montpellier, Université Paul Valery, 2020. 

    Annexe 3 : principe du mécanisme du métier à tisser. D’après Dominique Cardon. La draperie au Moyen Âge: essor d’une grande industrie européenne. Paris, CRNS, 1999.

    Références

    [1] Kathryn Reyerson, « Le rôle de Montpellier dans le commerce des draps de laine avant 1350 », Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, vol. 94, n° 156, 1982, p. 17-40.

    [2] Reyerson, « Le rôle de Montpellier », p. 22-25.

    [3] Mathieu Arnoux et Jacques Bottin, « Autour de Rouen et Paris: modalités d’intégration d’un espace drapier (XIIIe-XVIe siècles) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 48, n° 2/3, 2001, p. 162‑191.

    [4] Arnoux et Bottin, « Autour de Rouen et Paris », p. 163.

    [5] Voir par exemple Lucie Galano, « Montpellier et sa lagune. Histoire sociale et culturelle d’un milieu naturel (XIe-XVe siècles) », Montpellier, Université de Sherbrooke – Université Paul Valery Montpellier III, thèse de doctorat (histoire), 2017, 672 p ; Coralie Naze, « Les cours d’eau et les moulins de Montpellier aux XIIIe-XVe siècles », mémoire de maîtrise (histoire), Montpellier, Université Paul Valery, 2020, 120 p.

    [6] Georges Saunier, « Quelques réflexions sur le concept de Centre et Périphérie », Hypothèses, vol. 3, n° 1, 2000, p. 177-178.

    [7] Dû à une documentation plus abondante à partir de ces années, les XIVe-XVe siècles bénéficieront d’une attention particulière, ce qui n’empêchera pas quelques incursions vers les siècles antérieurs. Également, l’étude ci-présente focalise son attention sur la production des draps de laine, le coton et la soie étant exclus du fait que leur production s’effectue dans un espace distinct.

    [8] Archives municipales de Montpellier (A.M. Montpellier), Livre des articles et des ordonnances relatives au fait et art de la drapperie de layne et de soye de la ville de Montpellier, 1493, cote HH 102. Le manuscrit à l’étude n’ayant pas été intitulé, le titre présenté ici est une construction personnelle à partir de l’une des formules qui apparaît le plus fréquemment dans le texte.

    [9] Les travaux de Dominique Cardon sur l’histoire de la draperie médiévale seront également utilisés pour enrichir l’analyse des éléments techniques de la production drapière, notamment en ce qui a trait au travail rural. Voir Dominique Cardon, La draperie au Moyen Âge: essor d’une grande industrie européenne, Paris, CRNS, 1999, 575 p ; Dominique Cardon, Le monde des teintures naturelles, Paris, Belin, 2003, 586 p.

    [10] Bien que les cartes soient postérieures à la période étudiée, certains indices documentaires dans le manuscrit HH 102 ainsi que dans les inventaires d’archives nous permettent de penser que la configuration spatiale de la production et les spécificités territoriales de Montpellier sont restées relativement semblables depuis la fin du Moyen Âge.

    [11] Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 73.

    [12] Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 50-52.

    [13] Jean Malaurie, « L’élevage ovin français (Cartes et commentaires) », L’Information Géographique, vol. 12, n° 5, 1948, p. 181.

    [14] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances relatives au fait et art de la drapperie de laine et de soie de la ville de Montpellier, cote HH 102, f. 10r°.

    [15] Jean Combes, « Les foires en Languedoc au moyen âge », Annales, vol. 13, n° 2, 1958, p. 233.

    [16] Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 56.

    [17] Roberto Lopez, La révolution commerciale dans l’Europe médiévale, Paris, Aubier Montaigne, 1974, p. 188-189.

    [18] Matthieu Scherman, « Un acteur de la transhumance : le cas d’un drapier trévisan à la fin du XVe siècle », dans Pierre-Yves Laffont, dir., Transhumance et estivage en Occident : Des origines aux enjeux actuels, Toulouse, Presses universitaires du Midi, 27 février 2020, p. 223.

    [19] Scherman, « Un acteur de la transhumance », dans Pierre-Yves Laffont, dir., Transhumance et estivage en Occident, p. 223.

    [20] Christine Rendu, « « Transhumance » : prélude à l’histoire d’un mot voyageur », dans Pierre-Yves Laffont, dir., Transhumance et estivage en Occident, p. 7‑29.

    [21] Matthieu Scherman, « Un acteur de la transhumance », dans Pierre-Yves Laffont, dir., Transhumance et estivage en Occident : Des origines aux enjeux actuels, Toulouse, Presses universitaires du Midi, 2006, p. 227.

    [22] Esther Pascua, « Communautés de propriétaires et ressources naturelles à Saragosse lors du passage du Moyen Âge à l’époque moderne », dans Pierre-Yves Laffont, dir., Transhumance et estivage en Occident, p. 137.

    [23] Lucie Galano, « Montpellier et sa lagune », p. 312.

    [24] A.M. Montpellier, Grand Thalamus, cote AA4, fol. 112. Inventaires et documents, tome III, Inventaire des cartulaires de Montpellier (980-1789), Montpellier, Imprimerie Serre & Roumégous, 1901-1907, p. 136-137.

    [25] Mathieu Arnoux, « Perception et exploitation d’un espace forestier : la forêt de Breteuil (XIe-XVe siècles) », Médiévales, vol. 9, n° 18, 1990, p. 20-22.

    [26] Monique Bourin, « Les droits d’usage et la gestion de l’inculte en France méridionale : un terrain de comparaison “avant la Peste” », dans Stéphane Boisselier, dir., L’espace rural au Moyen Âge : Portugal, Espagne, France (XIIe-XIVe siècle). Mélanges en l’honneur de Robert Durand, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2002, p. 193‑206.

    [27] Par exemple ce litige en 1307 où 17 moutons ont été saisis par l’Évêque de Maguelone sous prétexte que les moutons auraient pâturé sur ses terres. A. M. Montpellier, [s.n.] cote Louvet 2629. Inventaires et documents, tome I. Notice sur les anciens inventaires & Inventaire du Grand Chartier, Montpellier, Imprimerie Serre & Roumégous, 1895-1899, p. 217.

    [28] Corinne Denoyelle, « Les bergers : des ermites carnavalesques », Cahiers de recherches médiévales. Journal of medieval studies, n° 10, mars 2003, p. 154.

    [29] A.M. Montpellier, Grand Thalamus, AA4, f. 234 vº. Inventaires et documents, tome III, p. 165.

    [30] Lucie Galano, « Les recettes du consulat majeur de Montpellier au XVe siècle : impôts indirects et revenus domaniaux d’après les documents comptables. », Comptabilités. Revue d’histoire des comptabilités, n° 12, octobre 2019, p. 19.

    [31] Lucie Galano, « Les recettes du consulat majeur de Montpellier au XVe siècle », p. 19.

    [32]  Kathryn Reyerson, « Le rôle de Montpellier dans le commerce des draps de laine », p. 21.

    [33] Dominique Cardon, « La garrigue, monde de l’écarlate », Études rurales, n° 151/152, 1999, p. 33.

    [34] Dominique Cardon, Natural dyes: sources, tradition, technology and science, London, Archetype Publications, 2007, p. 612.

    [35] Archives départementales de l’Hérault (A.D. Hérault), Atlas dit du « Grand Saint-Jean », comportant la description des biens de la commanderie de Montpellier, 1750-1751, cote 55 H 3, v. 17.

    [36] A.D. Héreault, Atlas dit du « Grand Saint-Jean », 55 H 3, v. 29.

    [37] A.D. Héreault, Atlas dit du « Grand Saint-Jean », 55 H 3, v. 31.

    [38] A.D. Héreault, Atlas dit du « Grand Saint-Jean », 55 H 3, v. 59.

    [39] Lucie Galano, « Au-delà de la commune clôture : perspectives de recherche sur la juridiction montpelliéraine et les ressources territoriales languedociennes », dans Montpellier au Moyen âge: bilan et approches nouvelles, Turnhout, Brepols, 2017, p. 24.

    [40] Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 149-151.

    [41] A.M. Montpellier, Grand Thalamus, cote AA4, f. 66 rº. Inventaires et documents, tome III, p. 115.

    [42] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 9 v°.

    [43] Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 152-154.

    [44] Naze, « Les cours d’eau et les moulins de Montpellier », p. 11.

    [45] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 6 v°.

    [46] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 6 v°.

    [47] Dominique Cardon, « Arachné ligotée : la fileuse du Moyen Âge face au drapier », Médiévales, vol. 15, n° 30, 1996, p. 13.

    [48] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 24 r°.

    [49] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 24 r°.

    [50] Cardon, « Arachné ligotée », p. 15-17.

    [51] Ghislaine Fabre et Thierry Lochard, Montpellier: la ville médiévale, Paris, Imprimerie nationale, 1992, p. 65-66.

    [52] Charles Verlinden, « Marchands ou tisserands ? À propos des origines urbaines », Annales, vol. 27, n° 2, 1972, p. 397-398. Les drapiers sont d’ailleurs, pour la plupart, des tisserands ayant atteint un degré de fortune appréciable.

    [53] Lopez, La révolution commerciale, p. 188-190.

    [54] Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 391-394.

    [55] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 17 r°.

    [56] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 5 r°.

    [57] A.M. Montpellier, Livre des articles et des ordonnances, cote HH 102, f. 18 r°.

    [58] Sylvie Caucanas, Moulins et irrigation en Roussillon du IXe au XVe siècle, Paris, CNRS Éditions, 1995, p. 195.

    [59] Marc Héren, « Technique et vente de la draperie amiénoise à la fin du Moyen âge », Revue du Nord, vol. 24, n° 93, 1938, p. 17-19.

    [60] Reyerson, « Le rôle de Montpellier dans le commerce des draps de laine », p. 23.

    [61] Walter Endrei, « Changements dans la productivité lainière au Moyen Âge », Annales, vol. 26, n° 6, 1971, p. 1297.

    [62] Voir par exemple Cardon, La draperie au Moyen Âge, p. 570-573.

    [63] Urszula Sowina, « L’eau et les nouveautés techniques dans l’espace urbain et suburbain au Moyen Âge », Actes des congrès de la Société d’Archéologie Médiévale, vol. 6, n° 1, 1998, p. 84.

    [64] Reyerson, « Le rôle de Montpellier dans le commerce des draps de laine », p. 23.

    [65] Naze, « Les cours d’eau et les moulins de Montpellier », p. 27.

    [66] Naze, « Les cours d’eau et les moulins de Montpellier », p. 21.

    [67] Aline Durand, dir., Jeux d’eau: moulins, meuniers et machines hydrauliques, XIe-XXe siècles: études offertes à Georges Comet, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2008, p. 9.

    [68] Cardon, Le monde des teintures naturelles, p. 480.

    [69] Cardon, Le monde des teintures naturelles, p. 18-24.

    [70] Galano, « Montpellier et sa lagune », p. 316.

    [71] A. M. Montpellier, [s.n.] cote Louvet 938. Inventaires et documents, tome I, p. 80.

    [72] Jacques Heers, La ville au Moyen Âge, Paris, Fayard, 1990, p. 374-375.

    [73] Jean-Pierre Leguay, L’eau dans la ville au Moyen Âge, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2002, p. 17.

    [74] Lopez, La révolution commerciale, p. 185-187.

    [75] Jean-Louis Roch, Un autre monde du travail : La draperie en Normandie au Moyen Âge, Mont-Saint-Aignan, Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2013, p. 104-106.